Évangile du Vendredi 8 mars – 3e semaine de Carême (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)
« Le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur : tu l’aimeras » Mc 12, 28b-34
En ce temps-là, un scribe s’avança vers Jésus pour lui demander : « Quel est le premier de tous les commandements ? » Jésus lui fit cette réponse : « Voici le premier : Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force. Et voici le second : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas de commandement plus grand que ceux-là. » Le scribe reprit : « Fort bien, Maître, tu as dit vrai : Dieu est l’Unique et il n’y en a pas d’autre que lui. L’aimer de tout son cœur, de toute son intelligence, de toute sa force, et aimer son prochain comme soi-même, vaut mieux que toute offrande d’holocaustes et de sacrifices. » Jésus, voyant qu’il avait fait une remarque judicieuse, lui dit : « Tu n’es pas loin du royaume de Dieu. » Et personne n’osait plus l’interroger.
Méditation
« Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force ». Jésus répète au scribe le même précepte explicitement énoncé dans le livre du Deutéronome: Écoute Israël… (Dt,6,4-5). Il lui redit ce que les prophètes avaient déjà transmis et qui est bien consignés dans les écrits de la Torah, c’est l’essentiel qu’il ne doit en aucun cas oublier.
Écoute Israël, écoutons-nous aussi, le premier et le dernier des commandements, la quintessence de l’essentiel. Écoutons Dieu au cœur de notre être nous murmurer son Amour et laissons-Lui toute la place pour que notre cœur se dilate à la dimension de Son Souffle. Il ne s’agit pas seulement de croire en l’existence de Dieu, de la répéter avec des formules toutes faites, mais il s’agit de L’aimer et c’est l’essentiel.
Aimer c’est entrer en relation, c’est choisir, c’est s’ouvrir et se laisser aimer, c’est se donner par amour à l’A(a)utre. Aimer Dieu ne peut pas s’emprisonner dans un précepte de loi et être alimenté par la peur des représailles; c’est avant tout un désir, un choix d’aller à Sa rencontre, d’expérimenter Son Amour, Sa bonté et Sa bienveillance.
Tu aimeras, verbe conjugué au futur, il indique une action incomplète projetée dans l’avenir. L’amour de Dieu nous précèdera toujours, nous ne pouvons L’aimer qu’au rythme de notre vie comme un élan qui se renouvelle à chaque instant et donne la couleur à notre quotidien. Saint Vincent de Paul disait : « aimer le Seigneur, c’est vivre chaque instant dans un acte continuel d’amour »
Jésus continue en nous rappelant que l’amour de Dieu, l’amour du prochain et l’amour de soi sont étroitement liés. Le Souffle de l’Esprit circule entre les personnes qui s’aiment. Il est aussi cet Amour qui s’est déjà offert à celui ou à celle que nous ne sommes pas en mesure d’aimer. Dès lors que nous portons notre attention sur ce Souffle vivant, source inépuisable et inaltérable d’Amour qui se trouve entre nous et autrui, nous serons alors capables d’aimer au-delà de ce qui est aimable chez l’autre car c’est l’Amour qui intercède en nous et à travers nous; comme dirait St Paul si je n’ai pas l’Amour, je n’ai rien, je n’y peux rien, et je ne suis rien(1Co,13).
Le premier prochain à aimer est soi-même, un amour de soi qui coïncide avec l’amour de Dieu selon Saint Augustin, c’est « s’aimer soi-même en Dieu » et non pas n’aimer que soi et se complaire dans un regard narcissique centré uniquement sur son nombril. L’amour de soi est le premier tressaillement de Dieu dans la jubilation d’un cœur écrit Christian Bobin. La recommandation d’aimer Dieu ne peut s’accomplir qu’à travers l’amour du prochain et de soi-même. La vie de Dieu se dresse en moi ainsi qu’entre moi et mon prochain, car Dieu vit en mon prochain tout comme Il vit en moi. C’est la mission du prendre soin, prendre soin de Dieu en nous, selon Zundel, et ce faisant prendre soin de l’autre comme de moi-même. En cultivant sa vigne, on cultive celle du prochain disait Catherine de Sienne.
L’exigence d’aimer Dieu a longtemps nourri la notion de mérite dans notre conscience chrétienne. En cherchant à mériter l’Amour, toutes les forces naturelles ne seraient guère suffisantes et on s’engage alors sur la voie de l’insurmontable amour de Dieu. L’Amour est toujours premier, être aimé et désiré ne peut jamais se mériter ni être contrôlé. Cependant, le Souffle demande notre consentement pour accueillir cet infini Amour inconcevable. L’Amour ne se commande certes pas mais Il est une promesse qui peut s’accomplir jusqu’à l’infini, si elle se désire et s’accueille. Il ne nous reste donc qu’à suivre Son Souffle qui réside en nous, sans chercher à le qualifier ni à le quantifier, afin de devenir pleinement qui nous sommes. « Celui qui a la charité porte Dieu en lui » (saint Éphrem).
Aujourd’hui encore Jésus nous redit, écoute Israël, écoute le commandement de l’Amour, il est une voie vers un accomplissement sans frontières. « L’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » (Rm 5,5). Écoutons-Le sans s’attarder sur le pourquoi et le comment, sans ausculter nos capacités et nos faiblesses, sans nous perdre dans les comparaisons et les proportions, mais laissons-Le simplement couler de Source. Nous ne saurons jamais ni d’où Il vient, ni où Il va, (Jn 3,8), moins encore où Il souffle mais nous saurons certainement jusqu’où Il peut nous entrainer. On ne comprendra jamais comment Il s’y prend, mais une chose est certaine : que nous dormions ou que nous nous réveillions, que nous nous activons ou que nous veillons, le Souffle d’Amour germe et croit silencieusement, Il grandit en nous et par nous.
Gladys EL Helou (gladyshelou@gmail.com)
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