Méditation quotidienne du vendredi 21 avril : Dépositaire de Ses Grâces (No 215 – série 2022 – 2023)

Image par Pete Linforth de Pixabay

Évangile du Vendredi 21 avril 2023 – 2e semaine du Temps pascal (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Il en distribua aux convives, autant qu’ils en voulaient » Jn 6, 1-15

En ce temps-là, Jésus passa de l’autre côté de la mer de Galilée, le lac de Tibériade. Une grande foule le suivait, parce qu’elle avait vu les signes qu’il accomplissait sur les malades. Jésus gravit la montagne, et là, il était assis avec ses disciples. Or, la Pâque, la fête des Juifs, était proche. Jésus leva les yeux et vit qu’une foule nombreuse venait à lui. Il dit à Philippe : « Où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? » Il disait cela pour le mettre à l’épreuve, car il savait bien, lui, ce qu’il allait faire. Philippe lui répondit : « Le salaire de deux cents journées ne suffirait pas pour que chacun reçoive un peu de pain. » Un de ses disciples, André, le frère de Simon-Pierre, lui dit : « Il y a là un jeune garçon qui a cinq pains d’orge et deux poissons, mais qu’est-ce que cela pour tant de monde ! » Jésus dit : « Faites asseoir les gens. » Il y avait beaucoup d’herbe à cet endroit. Ils s’assirent donc, au nombre d’environ cinq mille hommes. Alors Jésus prit les pains et, après avoir rendu grâce, il les distribua aux convives ; il leur donna aussi du poisson, autant qu’ils en voulaient. Quand ils eurent mangé à leur faim, il dit à ses disciples : « Rassemblez les morceaux en surplus, pour que rien ne se perde. » Ils les rassemblèrent, et ils remplirent douze paniers avec les morceaux des cinq pains d’orge, restés en surplus pour ceux qui prenaient cette nourriture.
À la vue du signe que Jésus avait accompli, les gens disaient : « C’est vraiment lui le Prophète annoncé, celui qui vient dans le monde. » Mais Jésus savait qu’ils allaient venir l’enlever pour faire de lui leur roi ; alors de nouveau il se retira dans la montagne, lui seul.

Méditation

« Une grande foule le suivait, parce qu’elle avait vu les signes », St Jean parle de signes et non de miracles. Il y a toujours quelque chose de déconcertant dans le miracle, surtout pour notre mentalité dite moderne; d’autant plus si le miracle porte sur la matière et non sur la guérison.

Pendant la guerre, on a dû se cacher dans un abri souterrain pendant toute une semaine sans aucun contact possible avec l’extérieur, dû à l’intensité des bombardements. Il ne nous restait qu’une tranche de pain et quelques gouttes d’huile dans le réchaud; le froid intense, la faim et la peur mordaient nos estomacs. Dans cette désespérance et cette pauvreté absolue, mon père s’était recueilli discrètement, priant toute la nuit à genoux sur le sol humide. Le lendemain, il y avait, déposé à la porte extérieure de l’abri, un pain et une tasse d’huile. Le surlendemain aussi la même chose, et ainsi pendant toute la semaine des combats intenses. Nous n’avons jamais su qui avait déposé ces pains et cette huile; force de prière? miracle? Assurément un signe. Cet espace d’ouverture du cœur humain à Celui de Jésus, a laissé Dieu circuler et agir et, c’est justement là le miracle, le signe de Sa Présence avec nous.

Dans la multiplication des pains, les gestes de Jésus sont un signe, une révélation:  le signe du Père avec Lui et le dévoilement de la force de Son Esprit en Lui. Sa communion à Dieu infiniment discrète et totale, a libéré Sa puissance: ceux qui étaient tout près purent voir qu’en puisant dans la corbeille, il y avait toujours du pain et du poisson pour nourrir ceux qui se présentaient.

Cette foule qui suivait Jésus devait être épuisée et affamée (Mc 8,2). Un ventre creux, sans énergie ne peut écouter, Jésus savait que son auditoire avait besoin de pain terrestre, afin de pouvoir recevoir le pain de Vie. L’œuvre de Dieu passe par nos besoins aussi matériels qu’ils soient. Sa grâce ne flotte pas en apesanteur dans un monde spirituel qui se surélève de notre condition humaine, au contraire Elle vient transfigurer le corporel dans ses moindres recoins. Jésus est venu sauver des personnes humaines, corps, psyché et âme. Le miracle révèle un Dieu attentif, bienveillant et compatissant; les signes de Jésus approfondissent, imposent le sens, donnent la grâce de la Paix et de l’Espérance.

« Où pourrions- nous acheter du pain, pour qu’ils aient à manger ? » Jésus aurait bien pu faire ce miracle tout seul, cependant Il a sollicité l’aide des apôtres. La réponse de Philippe montre l’impossibilité de la tâche « le salaire de deux cents journées ne suffirait pas pour que chacun reçoive un peu de pain »; André quant à lui arrive à trouver cinq pains et deux poissons, mais succombe rapidement à la désespérance de ses ressources dérisoires, « mais qu’est-ce que cela pour tant de monde ! » Oui, c’est disproportionné devant une foule immense, mais c’est justement sur ce peu insignifiant mis à la disposition du Seigneur que le miracle va se produire.

Qu’est-ce que cela dit à chacun.e de nous aujourd’hui? Face aux défis et épreuves de la vie, ne considérons-nous pas d’abord comme Philippe, que la solution est hors de notre portée, ou bien ne comptons-nous pas comme André, avec désespoir, nos ressources insuffisantes? Ne nous disons-pas souvent que nous sommes impuissants devant la famine, la guerre et les misères du monde? Mais Dieu a besoin de nous, avec nos petits riens; Il ouvre Ses bras pour qu’on y mette nos ressources médiocres, afin qu’Il les multiplie en surabondance. Il sollicite notre aide pour nous rassasier par Sa Grâce et afin qu’on en fasse de même pour les autres « Donnez-leur vous-mêmes à manger. » (Lc 9,13).

Dieu qui nous a créés sans nous, ne veut pas nous sauver sans nous, disait St Augustin. Et de notre pauvre participation à Son œuvre, Il tirera une surabondance de grâces pour nous et pour le monde. Dieu se donne pour qu’on Le donne à notre tour et notre histoire humano-divine doit continuer, grâce à Lui, avec et en Lui. Jésus reste l’initiateur, Il ouvre la voie, suggère les opportunités, soutient les initiatives et les fructifie, mais Il veut notre collaboration et sollicite notre responsabilité, « Où pourrions- nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? » Il désire rejoindre le monde, à travers chacun.e de nous. La grâce est autant personnelle qu’ecclésiale, elle bâtit le Royaume.

La vie ne sera jamais facile, elle n’en reste pas moins le lieu de notre croissance personnelle et communautaire. Sur ce chemin caillouteux et broussailleux, le Christ nous révèle un passage fait de signes, nous invite à la confiance et à l’abandon. Le miracle trouvera son sens dans la découverte de cette Présence aimante qui oriente notre vie à travers les épreuves et les difficultés du quotidien, et nous procure espérance et paix.

Tendons une main au Christ et une main à notre frère et sœur, pour qu’Il nous conduise ensemble, vers le Père par l’Esprit. Il se fait nourriture et pain de Vie et nous sommes dépositaires de Ses grâces pour que rien ne se perde.

Gladys EL Helou (gladyshelou@gmail.com)

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