No 201 – série 2024-2025
Évangile du vendredi 11 avril – 5ème Semaine de Carême
Tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions
« Ils cherchaient à l’arrêter, mais il échappa à leurs mains » (Jn 10, 31-42)
En ce temps-là, de nouveau, des Juifs prirent des pierres pour lapider Jésus. Celui-ci reprit la parole : « J’ai multiplié sous vos yeux les œuvres bonnes qui viennent du Père. Pour laquelle de ces œuvres voulez-vous me lapider ? » Ils lui répondirent : « Ce n’est pas pour une œuvre bonne que nous voulons te lapider, mais c’est pour un blasphème : tu n’es qu’un homme, et tu te fais Dieu. » Jésus leur répliqua : « N’est-il pas écrit dans votre Loi : J’ai dit : Vous êtes des dieux ? Elle les appelle donc des dieux, ceux à qui la parole de Dieu s’adressait, et l’Écriture ne peut pas être abolie. Or, celui que le Père a consacré et envoyé dans le monde, vous lui dites : “Tu blasphèmes”, parce que j’ai dit : “Je suis le Fils de Dieu”. Si je ne fais pas les œuvres de mon Père, continuez à ne pas me croire. Mais si je les fais, même si vous ne me croyez pas, croyez les œuvres. Ainsi vous reconnaîtrez, et de plus en plus, que le Père est en moi, et moi dans le Père. » Eux cherchaient de nouveau à l’arrêter, mais il échappa à leurs mains.
Il repartit de l’autre côté du Jourdain, à l’endroit où, au début, Jean baptisait ; et il y demeura. Beaucoup vinrent à lui en déclarant : « Jean n’a pas accompli de signe ; mais tout ce que Jean a dit de celui-ci était vrai. » Et là, beaucoup crurent en lui.
Méditation – Espace de tumulte, espace de paix
En débutant cette méditation, j’entre en moi-même afin de recomposer dans mon esprit la scène que nous dépeint l’évangile de Jean que nous venons d’entendre.
Situons-nous… Jésus est à Jérusalem depuis quelque temps. Jérusalem, c’est la grande ville. C’est le coeur bouillonnant de l’activité politique et commerciale du pays, mais surtout c’est le lieu où se trouve le Temple, le lieu saint vers lequel convergent les pèlerins et autour duquel gravitent les autorités religieuses du pays. Je peux aisément m’imaginer que les foules sont particulièrement nombreuses en cette période de l’année, attirées par une fête importante qui y a lieu. Or, voici que, depuis la cohue, surgit un groupe composé de chefs religieux en colère! Rageurs, ils s’approchent agressivement de Jésus et l’entourent. Je constate leur fureur. La tension monte rapidement. Je m’aperçois que certains de ces individus ont même des pierres à la main et en menacent Jésus. J’observe ce qui se passe. Je regarde les visages enflammés des assaillants. Je prends le temps de ressentir toute la charge émotive présente dans cette altercation. Puis, je pose mon regard sur Jésus. Indéfectible, il répond à leurs accusations. Il leur parle de sa relation avec le Père. Enfin, constatant leur déraison, il part, il s’extrait de leur furie, il sort de la ville et retourne dans un lieu calme, près du Jourdain… Qu’est-ce qui me frappe dans son attitude? Qu’est-ce qui monte en moi ?
Que d’émotions dans cet épisode !
Dans cette alternance entre les forces de mort et les forces de vie, même les lieux nous parlent. Le théâtre principal du récit est Jérusalem, espace de la tourmente et de l’adversité. Malgré le Saint des Saints qu’elle abrite, les prêtres en ont fait un lieu de contradiction, déconnecté des réalités les plus profondes de l’existence. Jérusalem s’oppose à cet autre lieu, au-delà du Jourdain, là où Jean baptisait, un havre de paix et d’authenticité où Jésus retrouve refuge après ces événements tumultueux. C’est là qu’il va demeurer, comme le rapporte l’évangéliste, et se réunir avec ces gens simples et chaleureux qu’il chérissait.
Ces lieux habitent aussi notre propre quotidien. Notre Jérusalem, c’est là où nous nous éparpillons. C’est là où les forces aveuglantes nous font agripper la première pierre venue et vociférer des propos blasphématoires, tantôt envers les autres, tantôt envers nous-même. C’est là où un tourbillon nous disperse et nous détourne de ce qui compte vraiment. N’y a-t-il pas des moments où, plutôt que d’agir en vérité sur ma propre vie, je me contente de réagir à ce qui survient? Des moments où je n’arrive plus à prendre le recul nécessaire afin de recadrer les événements dans leur juste perspective parce que je suis submergé par le torrent de ma propre blessure? Quand surviennent de tels épisodes dans nos vies, ne disons-nous pas que nous avons « perdu le nord »? Mais, déjà, en le disant, nous avons fait le premier pas, la première prise de conscience qui contient déjà l’appel à un recentrement?
Et c’est précisément alors, depuis ce lieu paisible, dans l’œil du cyclone, que Jésus s’adresse à nous. C’est là qu’il se tient lorsqu’il dit : « le Père est en moi, et moi dans le Père ». Dès lors, la réalité, la nôtre et celle de tout ce qui nous entoure, prend un autre visage. Quand je me replace dans cet espace au centre de moi-même, debout dans mon Saint des saints dépouillé et défardé, je puis alors, comme Jésus, participer à l’expérience même de Dieu qui me fait voir indissociablement toute chose en Lui et Lui en toute chose. Dans la proximité avec celui qu’il appelait son Père, mon « je », ma réalité profonde, se découvre interpellé par Lui comme un « tu ». Puis, laissant cette lumière déborder de moi, je considère aussi mon prochain comme un « tu divin ».
En terminant cette méditation, j’entre de nouveau en moi-même et je m’interroge : Qu’est-ce que l’expérience de ma relation intime à Dieu change dans le concret de ma vie? Quelles lunettes me donne-t-elle pour aborder le monde?
Michel Rondeau – mikeround62@gmail.com

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