Méditation quotidienne du samedi 30 septembre : Une vie livrée (no 27 – série 2023-2024)

Image par Kurt Bouda de Pixabay

Évangile du Samedi 30 septembre – 25e semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Le Fils de l’homme va être livré aux mains des hommes. Les disciples avaient peur de l’interroger sur cette parole »Lc 9, 43b-45

En ce temps-là, comme tout le monde était dans l’admiration devant tout ce qu’il faisait, Jésus dit à ses disciples : « Ouvrez bien vos oreilles à ce que je vous dis maintenant : le Fils de l’homme va être livré aux mains des hommes. » Mais les disciples ne comprenaient pas cette parole, elle leur était voilée, si bien qu’ils n’en percevaient pas le sens, et ils avaient peur de l’interroger sur cette parole.

Méditation

Je méditais la Parole de ce matin en arpentant le quai de la gare, attendant le train qui m’emporterait vers le bureau. Ce verbe « livrer » s’ouvre à l’esprit, telle une voie, suscitant la peur de suivre, tête baissée, les traces d’un ressuscité jamais conquérant. Cette réflexion m’amena jusqu’au bout du quai, là où gisait comme un concentré de délicatesse, la dépouille toute fraîche d’un oiseau mort. Sans doute une petite mésange, elle me fixait tout en ne me voyant déjà plus. Sa vie discrète nous a été livrée, elle s’est déployée entre chants, séduction, inlassables nids, saisons après saisons. Contemplant cette petite vie qui s’est glissée dans l’indifférence de l’entourage et la beauté de son plumage, je fus touchée par sa pureté. Levant les yeux, je croise la splendeur d’un lys tigré, debout devant nous, comme pour rendre hommage. Cette création est sans péché, elle nous est livrée dans sa pureté et l’instinct de vie qui l’anime, parfois pendant un battement, n’a rien à voir avec notre esprit conquérant.

Dans cet oiseau déposé à mes pieds, avec ses souvenirs et son ramage qui s’est tu, je pris conscience que la création a été livrée entre nos mains. La création livrée, comme le Fils a donné sa vie car personne ne lui a pris, c’est au fond Dieu qui se livre à nous entièrement, en sa création. Une création comme kénose de ce Dieu fou, fragile et pur. Dans cette création qui se livre, le mal n’a jamais pris racine, la convoitise n’y a jamais fait son nid quoi qu’en dise les théories. Il y a quelque chose d’infantile dans notre compréhension du Royaume, qui est si éloigné de l’enfance, du Christ, et de l’oiseau.

Dans notre cheminement, nous avons cru un temps qu’il fallait gérer nos comportements, travailler sur ce soi hors d’atteinte et pourtant tellement moi. Au bout de nos quais de gare, nous avons été saisis, par un moment de splendeur qui dépassait ce soi et anéantissait joyeusement ses efforts. Le saisissement qu’il fallait abandonner notre mort aux mains de la vie. Étrangement, la résurrection devenait une vitalité nouvelle, et l’Amour, l’énergie qui tisse le monde par la prière et le Souffle. Urgemment, nous réalisons que nous sommes co-créateurs de ce monde unique, responsable de l’hospitalité qui l’anime et à travers laquelle, la bonté de ce Dieu innocent se livre jour après jour. Déposant le petit oiseau sous un feuillage alors que le train siffle bruyamment son arrivée, je prends conscience de ma condition d’enfant bien-aimée qui enveloppe celle de pécheur. Alors que la création brûle et crie sa souffrance, qu’ai-je fait pour mériter autant ? Immergée dans la kénose de Dieu, j’hésite encore à croire qu’à Ses yeux mon visage a plus de valeur que la splendeur du lys, que la candeur d’une mésange. La grandeur de l’oiseau qui a vécu et du lys tranquille, la blancheur de ce Christ-Dieu qui se remet entre nos mains, rappellent à mon âme, la pleine confiance en un salut qui ne vient pas de moi.

Barbara Martel (bmartel@lepelerin.org)

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