Évangile du Samedi 16 décembre – 2e semaine de l’Avent (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)
Élie est déjà venu et ils ne l’ont pas reconnu Mt 17, 10-13
Descendant de la montagne, les disciples interrogèrent Jésus : « Pourquoi donc les scribes disent-ils que le prophète Élie doit venir d’abord ? » Jésus leur répondit : « Élie va venir pour remettre toute chose à sa place. Mais, je vous le déclare : Élie est déjà venu ; au lieu de le reconnaître, ils lui ont fait tout ce qu’ils ont voulu. Et de même, le Fils de l’homme va souffrir par eux. » Alors les disciples comprirent qu’il leur parlait de Jean le Baptiste.
Méditation
En ce temps de l’Avent, en ce temps de l’Annonciation, la douceur nous travaille et nous hante avec les prophètes, avec le Messie. Du Carmel à l’Horeb, Élie s’est laissé précéder par ce Dieu qui annonce. En attente et désemparé, il s’est laissé purifier par la douceur d’une brise afin d’entreprendre sa mission d’aller furieusement oindre des rois. De la fureur à la douceur, Jean le Baptiste s’est laissé précéder par Dieu qui annonce. Ameutant tout le désert pour la conversion des Judéens, Jean a été touché par l’humilité de Jésus au Jourdain. Le cœur obéissant et missionnaire, il présentera le Christ non pas en conquérant mais comme l’Agneau de Dieu, celui qui enlève les péchés du monde (Jn 1.35).
Au lieu de le reconnaître, ils lui ont fait tout ce qu’ils ont voulu. La Parole de ce matin nous rappelle que l’Amour n’est pas aimé en ce monde déchiré, furieux et guerrier. D’Élie en passant par Jean-Baptiste jusqu’au Fils de l’homme, l’Amour s’est pourtant fait annonce prophétique, annonce incarnée, annonce d’une douceur appelée Royaume. L’Amour s’est livré, s’est laissé faire, comme un agneau pascal. Comment peut-il en être autrement ? C’est l’Amour, fragile, gratuit et dépendant comme un enfant. Mais libre encore, même décapité; donné encore, même crucifié.
Quand l’extérieur, ses bruits de fureur et de fin du monde s’estompent, c’est dans la prière et l’intérieur, qu’une brise légère jaillit. C’est le gémissement du cœur en travail, le murmure de l’Avent, c’est le bruit que fait la douceur quand elle se fait Annonce. L’Avent est ce temps qui interrompt la marche vers la mort pour remettre l’enfance devant, il est mystère qui nous précède en pétrissant notre cœur pour le rendre soyeux et brillant. C’est le mystère qui nous précède et contient déjà la royauté de notre être à naître dans son regard. L’Avent c’est la purification, le discernement, l’obéissance et la prière tous ensemble et en même temps, en un seul temps. De la fureur d’exister par ses moyens propres et blessés jusqu’à la douceur de vivre en remettant sa pauvreté entre Ses mains, l’Avent c’est la joie de l’amour toujours naissant qui nous fait annonce du Dieu vivant, éternellement.
Matthieu rédigeait en pleine fin de son monde, je rédige cette méditation à la veille d’une conférence pour sauver le vivant, humanité comprise. Les chrétiens continuent de connaître la persécution, la technologie s’édifie et une crise sociale nous engloutit. À travers la fureur de son époque, en s’efforçant de préserver le caractère juif des fils d’Abraham, Matthieu a rédigé sur l’enfance. À travers la fureur de mon époque, je m’efforce de préserver notre part d’humanité et je rédige sur l’Avent.
Précédée par le mystère d’amour que je suis où Dieu traverse tous les précurseurs, il vient me rejoindre telle une brise dans ma frayeur. Dans cette fin du monde et dans mon désarroi, j’accueille son labeur intérieur, j’accueille l’Avent. Il veut faire de moi, il veut faire de toi, son œuvre de douceur, un cœur soyeux, au milieu de la fureur.
Barbara Martel (bmartel@lepelerin.org)
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