Méditation quotidienne du mardi 7 novembre : Se confondre en excuses mais, bien humblement, pourquoi ? (No 65 – série 2023-2024)

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Évangile du Mardi 7 novembre – 31e semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Va sur les routes et dans les sentiers, et fais entrer les gens de force, afin que ma maison soit remplie » Lc 14, 15-24

En ce temps-là, au cours du repas chez un chef des pharisiens, en entendant parler Jésus, un des convives lui dit : « Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu ! » Jésus lui dit : « Un homme donnait un grand dîner, et il avait invité beaucoup de monde. À l’heure du dîner, il envoya son serviteur dire aux invités : “Venez, tout est prêt.” Mais ils se mirent tous, unanimement, à s’excuser. Le premier lui dit : “J’ai acheté un champ, et je suis obligé d’aller le voir ; je t’en prie, excuse-moi.” Un autre dit : “J’ai acheté cinq paires de bœufs, et je pars les essayer ; je t’en prie, excuse-moi.” Un troisième dit : “Je viens de me marier, et c’est pourquoi je ne peux pas venir.” De retour, le serviteur rapporta ces paroles à son maître. Alors, pris de colère, le maître de maison dit à son serviteur : “Dépêche-toi d’aller sur les places et dans les rues de la ville ; les pauvres, les estropiés, les aveugles et les boiteux, amène-les ici.” Le serviteur revint lui dire : “Maître, ce que tu as ordonné est exécuté, et il reste encore de la place.” Le maître dit alors au serviteur : “Va sur les routes et dans les sentiers, et fais entrer les gens de force, afin que ma maison soit remplie. Car, je vous le dis, aucun de ces hommes qui avaient été invités ne goûtera de mon dîner.”

Méditation

Distingué(e)s invité(e)s convié(e)s à la lecture de cette méditation. Nous rejoignons aujourd’hui Jésus à un banquet avec les grands de ce monde qui n’ont de cesse de scruter à la loupe tous ses faits et gestes ainsi que ses paroles en vue « de le piéger à la croisée des chemins ». Sans doute, le cœur à la fête, l’un d’eux s’exclame : « Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu ! » (v. 15.) Or, excusez ma familiarité, mais il me semble entendre Jésus rétorquer : « Bien ! Je suis en effet en joie de te l’entendre dire. Mais, le temps venu, seras-tu véritablement des nôtres ou feras-tu faux bond à la dernière minute en te confondant en excuses ? Il ne s’agit évidemment pas de vous (ironie), mais pour certains, les bottines ne suivent pas les babines et « se refusent à […] remuer du doigt » (Mt 23,4). Ce convive, à première vue tout feu tout flamme, n’est-ce pas moi, toi, nous ? Jésus nous fait don, ici et maintenant, d’un faire-part personnalisé à chacun(e), afin de participer, de prendre une part active, au déploiement du Royaume en nous et autour de nous. « Car voici que le Royaume de Dieu est au milieu de vous », rapporte l’évangéliste Luc (17, 21). « Le ciel, on n’y entre pas, on le devient », renchérit avec sagesse Zundel. Mais, encore faut-il accueillir et répondre affirmativement au faire-part et s’engager à entrer dans la danse, et non simplement se contenter d’y assister passivement en simple spectateur.

Coup de théâtre, voilà que mon imaginaire s’emballe, ne m’en tenez point rigueur, mais le dialogue s’engage : « Je m’excuse, Jésus, je n’ai pas de quoi me vêtir convenablement. Je ne suis tout de même pas pour me présenter avec mes lambeaux ! Ah si, j’ai bien quelques couvre-chefs et une paire de chaussettes pas mal, mais c’est tout ». « Parfait ! C’est tout ce qu’il faut, mon fils, de répondre Jésus, ton humilité me suffit. Loin de moi l’idée de te forcer la main, mais viens, j’insiste, car tu te crois à tort indigne pour participer au banquet du Royaume de Dieu et tu te confonds en excuses, confondant justement humilité et dignité, mais je ne souhaite qu’une digne humilité, un cœur charitable et sans partage de ta part comme habit de noce. Viens, j’ai besoin de ta participation pour te faire don de moi, et pour faire ce même don à tous tes frères et sœurs en humanité via les talents dont Notre Père t’a gratifié. J’ai fait part du banquet à tous, mais plusieurs ont décliné l’invitation prétextant que, pour le moment, ils n’étaient pas disponibles ou disposés, ou trop accaparés, voire préoccupés, par leurs « affaires » de tout acabit. À mots couverts, j’ai décelé chez nombre d’entre eux qu’ils se confondaient en excuses, puisque, le torse bombé, ils se considéraient « pleins », imbus et repus d’eux-mêmes, croyant n’avoir ni faim, ni soif du pain de vie et du vin du salut offerts « par-dons » au banquet. Mais, toi et tes semblables, vous avez faim et soif de vie en plénitude et de joie durable, vous cheminez à acquiescer avec confiance à la plénitude du manque en devenir au cœur de votre vie irriguée à la Source du Salut. Celui ou celle qui consent à reconnaître humblement et avec abandon sa fragilité, sa vulnérabilité et son manque trouve sa force dans l’accueil de la Vie sans cesse renouvelée en Dieu, offerte gracieusement au centuple. Or, je vous prie, « ne ralentissez pas votre élan, restez dans la ferveur de l’Esprit » (Rm 12,11) en reconnaissant dignement vos forces et vos dons tout comme vos blessures, fragilités, faiblesses ou pauvretés, sans jamais pour autant vous en mépriser. Mettez ainsi tout ce que vous êtes, en tant que fils et filles bien-aimés de Dieu, au service du Royaume qui est en vous et autour de vous, et ce pour la plus grande gloire de Dieu Notre Père et le Salut du monde. N’oubliez jamais que la gloire du Père, c’est de vous voir pleinement debout et vivants. Puis, inversement, votre vie en plénitude réside dans la joie de voir Dieu le Père (Cf. S. Irénée de Lyon). N’oubliez jamais que mon Père et moi, nous sommes Un et, qu’à la différence de certains bien-pensants qui ont tendance à exclure l’a(A)utre en tant qu’a(A)utre, Nous avons un « petit faible » pour les aveugles, les boiteux, les infirmes, les pauvres, les petits, les exclus, les païens, les pécheurs et bien d’autres… Je compte sur vous pour entrer ainsi dans la Joie du Père, pour être et devenir parmi Nous « heureux », c’est-à-dire « en marche » (Cf. traduction de Chouraqui des Béatitudes) vers la Plénitude de la vie en devenir d’actualisation. C’est une Bonne Nouvelle, ne croyez-vous pas ? Tout le monde ne partage évidemment pas mon échelle de valeurs, affairés qu’ils sont en ce monde. Mais, qu’à cela ne tienne, je considère en fait qu’il faut peu de chose pour prendre part, une seule même, alors, toi, tu choisis la meilleure part et elle ne te sera pas enlevée, comme je le disais en la chaumière de mes amies Marthe et Marie (Lc 10, 42). Rassemblons-nous et faisons corps. En communion les uns les autres, engageons-nous les uns pour les autres. Le cœur vous en dit, n’est-ce pas ? »

La Lettre de Paul aux Romains nous rappelle à cet égard que : « Nous qui sommes plusieurs, nous sommes un seul corps dans le Christ et membres les uns des autres, chacun pour sa part (nous soulignons). Et selon la grâce que Dieu nous a accordée, nous avons reçu des dons qui sont différents. […] n’ayez pas le goût des grandeurs, mais laissez-vous attirer par ce qui est humble » (12, 5-6. 16). Nous sommes ainsi bienheureusement « divers et unis », appelés à reconnaître l’altérité relationnelle pour être et vivre en plénitude, appelés également à vivre et à promouvoir « la culture de la rencontre » pour reprendre les termes du Saint-Père François dans un récent ouvrage (Divers et unis, 2020) où il atteste que : « le courage de l’altérité est l’âme du dialogue ». N’est-ce pas ipso facto l’âme qui anime le banquet du Royaume de Dieu auquel nous sommes tous et toutes conviés ? Mon inconscient spirituel repart de plus belle en un rêve éveillé : Jésus, se tenant à la porte, vit accourir un premier convive : « Alors Jésus fixa sur lui son regard et l’aima. Et, il lui dit : “ Une seule chose te manque : va, ce que tu as, vends-le et donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel; puis, viens, suis-moi ”. Mais lui, à ces mots, s’assombrit et il s’en alla contristé, car il avait de grands biens » (Mc 10, 21-22). Puis, soudain, Jésus accourut vers le prochain convive et se jeta à son cou et l’embrassa tendrement : « Vite, apportez la plus belle robe et l’en revêtez, mettez-lui un anneau au doigt et des chaussures aux pieds. Amenez le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons, car mon fils que voilà était mort et il est revenu à la vie; il était perdu et il est retrouvé » (Lc 15, 20. 22-24). Or, ce dernier convive, reconnaissant qu’il n’était grand qu’à Je-Nous, se confondait en excuses après une telle faveur. Autrement dit, cette fois en un sens converti, il multipliait les remerciements. « Se confondre en actions de grâce. Ciel, c’est le Paradis, le Royaume de Dieu, ma foi ! » Alors, lequel des convives vous convie (littéralement « vivre-avec ») au plus profond de votre cœur ? Pour ma part, bien humblement, je dois reconnaître que je suis bienheureusement en marche entre les deux et avec les deux ! Et, réverbère cette parole de Jésus comme en écho : « lorsque deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là au milieu d’eux » (Mt 18, 20). De sorte que « le Royaume de Dieu est au milieu de vous » (Lc 17, 21).

Bénédiction et union de prière !

Dany Charland

DROIT D’AUTEUR

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