Évangile du Mardi 28 mai – 8e semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)
« Vous recevrez, en ce temps déjà, le centuple, avec des persécutions, et, dans le monde à venir, la vie éternelle » Mc 10, 28-31
En ce temps-là, Pierre se mit à dire à Jésus : « Voici que nous avons tout quitté pour te suivre. » Jésus déclara : « Amen, je vous le dis : nul n’aura quitté, à cause de moi et de l’Évangile, une maison, des frères, des sœurs, une mère, un père, des enfants ou une terre sans qu’il reçoive, en ce temps déjà, le centuple : maisons, frères, sœurs, mères, enfants et terres, avec des persécutions, et, dans le monde à venir, la vie éternelle. Beaucoup de premiers seront derniers, et les derniers seront les premiers. »
Méditation
Depuis une semaine nous voilà de retour au temps dit “ordinaire”! L’ordinaire de la vie dans l’Esprit, du quotidien traversé par son Souffle … qui n’a rien d’ordinaire! Tout peut recommencer et renaître à chaque instant! Au Pèlerin, nous apprenons comme essentiel à découvrir et lire ce mouvement de l’Esprit en soi, en l’autre, en tout ce qui advient “tout au long de nos jours” (Lc 1,75). Et c’est passionnant!
“Amour qui planais sur les eaux et les berças du premier souffle,
Nos âmes dorment ; prends-les d’un battement nouveau”[1]
Ce matin, “Doux hôte de mon âme”, prends-la de ton battement nouveau. Viens en moi, “Père amoureux du pauvre, Lumière divine, entre jusqu’au plus intime de mon coeur et enrichis-moi. Vois le vide en l’être humain si Tu lui manques intérieurement.”[2] Viens, guide-moi dans la prière et tout au long de cette journée.
“Père amoureux du pauvre, enrichis-moi”. A la lumière de ces simples mots, l’Évangile de ce matin a résonné d’une manière nouvelle pour moi. Le passage de St Marc fait suite à celui d’hier où Jésus avait dit à ses disciples: « Comme il sera difficile à ceux qui possèdent des richesses d’entrer dans le royaume de Dieu! » Ils “étaient stupéfaits de ces paroles” nous dit l’évangéliste. C’est dans cet état de stupéfaction que Pierre se met à dire à Jésus: « Voici que nous avons tout quitté pour te suivre. » Un peu comme si Pierre voulait s’assurer de son avenir et de celui de ses compagnons en Lui disant: “Jésus, regarde, il ne nous reste plus rien, plus de richesses. Nous sommes devenus pauvres! Nous avons tout quitté pour Te suivre. Est-ce qu’alors on y entrera, dans le Royaume?”
La réponse de Jésus à Pierre est magistrale: « Amen, je vous le dis : nul n’aura quitté, à cause de moi et de l’Évangile, une maison, des frères, des sœurs, une mère, un père, des enfants ou une terre sans qu’il reçoive, en ce temps déjà, le centuple”. Cette déclaration du Maître a dû rassurer Pierre bien qu’elle ne réponde pas exactement à sa question sur l’entrée dans le Royaume.
Esprit Saint, “amoureux du pauvre”, que veux-Tu nous dire à travers cette page d’Évangile?
Ce “nous avons tout quitté” – si audacieux – m’a d’abord fait penser à tant de frères et soeurs qui ont dû réellement “tout quitter”, souvent dans la peur, dans le fracas des bombes, dans l’impossibilité de survivre là où ils habitaient: les réfugiés, les migrants, les exilés. … les “derniers” de nos sociétés. Dans mon enfance, un soir de fin novembre, j’ai découvert que dans notre monde on pouvait tout d’un coup “tout” perdre à cause de la guerre. Non pas parce que moi j’avais dû fuir, mais parce que ce soir-là, dans ma petite ville natale de Belgique, une quarantaine de réfugiés du Laos étaient arrivés. Lorsque je les ai rencontrés avec ma famille – des jeunes mamans avec leurs bébés, des enfants, des jeunes hommes et quelques grands-mères vêtues de leurs habits traditionnels -, ils étaient tous réunis dans une grande salle d’un ancien orphelinat, avec juste quelques sacs en plastique au bout des bras. C’était le peu de choses qu’ils avaient pu emporter dans leur exil. Ils avaient dû “tout quitter” pour survivre et trouver une terre d’accueil.
Depuis ce fameux soir-là, suivi par de nombreuses années de partage avec nos amis Laotiens – du haut de mes 9 ans – j’ai compris beaucoup de “choses de l’Évangile”. Même si nos frères et soeurs du Laos n’avaient pas quitté leur terre, leurs maisons, leurs familles au nom de Jésus et de son Évangile, ils m’ont fait découvrir ‘la richesse des pauvres’ … celle du Dieu de l’Évangile! “Beaucoup de premiers seront derniers,et les derniers – aux yeux de ce monde – seront les premiers. » conclut Jésus à la fin de l’Évangile d’aujourd’hui. La générosité de nombreuses personnes leur avait “donné au centuple” – en maison, travail, vêtements et nourriture – ce qu’ils avaient dû abandonner dans leur pays. Mais ceux qui avons reçu “au centuple” en frères, soeurs, pères, mères, amis, c’est bien nous!
Depuis cette expérience fondatrice, depuis cette rencontre avec la ‘richesse des pauvres’, l’Esprit Saint a semble-t-il laissé en moi une question ouverte et brûlante encore … Qu’ai-je réellement ‘quitté’ pour Lui? De quoi me suis-je détachée au nom de l’Évangile? Qu’ai-je librement ‘laissé’ pour suivre le Dieu des petits et des derniers? Le “nous avons tout quitté pour te suivre” apparemment si affirmé et audacieux de Pierre, peut-on vraiment oser le dire, nous aussi? “Tout” c’est tellement “total”! Ne nous reste-t-il réellement “plus rien” à donner, à perdre?
Esprit Saint, “amoureux du pauvre”, viens illuminer notre coeur profond
pour nous aider à reconnaître tout ce à quoi nous sommes encore ‘accrochés’.
Tout cela que nous “possédons” – et qui parfois nous possède –,
tout cela qui ne nous laisse pas libres pour Toi.
Viens lever les amarres en nous pour nous disposer à recevoir le ‘centuple’ que Tu désires nous offrir.
Viens laver notre regard pour que nous puissions discerner ta présence
et accueillir tes dons … dans le plus ordinaire de ce jour.
Viens nous murmurer à nouveau ces Paroles de Jésus et les laisser germer en fruits de vie, au centuple!
“ Amen, je vous le dis : nul n’aura quitté, à cause de moi et de l’Évangile, une maison, des frères, des sœurs, une mère, un père, des enfants ou une terre sans qu’il reçoive, en ce temps déjà, le centuple : maisons, frères, sœurs, mères, enfants et terres”
Laurence Vasseur, vasseurlaurence@hotmail.com
[1] Hymne des laudes du dimanche de la Pentecôte, Amour qui planais sur les eaux, La Tour du Pin.
[2] Extrait de la Séquence de la Pentecôte, traduction de la version en espagnol.
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