Pour favoriser la prière des personnes qui sont dans d’autres pays, nous avons décidé de rendre disponible par courriel la méditation de chaque jour le soir précédent à 17 h heure du Québec. Sur le site du Pèlerin, elle sera déjà accessible à 16 h.
Évangile du Lundi 18 septembre – 24e semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)
« Même en Israël, je n’ai pas trouvé une telle foi ! » Lc 7, 1-10
En ce temps-là, lorsque Jésus eut achevé de faire entendre au peuple toutes ses paroles, il entra dans Capharnaüm. Il y avait un centurion dont un esclave était malade et sur le point de mourir ; or le centurion tenait beaucoup à lui. Ayant entendu parler de Jésus, il lui envoya des notables juifs pour lui demander de venir sauver son esclave. Arrivés près de Jésus, ceux-ci le suppliaient instamment : « Il mérite que tu lui accordes cela. Il aime notre nation : c’est lui qui nous a construit la synagogue. » Jésus était en route avec eux, et déjà il n’était plus loin de la maison, quand le centurion envoya des amis lui dire : « Seigneur, ne prends pas cette peine, car je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit. C’est pourquoi je ne me suis pas autorisé, moi-même, à venir te trouver. Mais dis une parole, et que mon serviteur soit guéri ! Moi, je suis quelqu’un de subordonné à une autorité, mais j’ai des soldats sous mes ordres ; à l’un, je dis : “Va”, et il va ; à un autre : “Viens”, et il vient ; et à mon esclave : “Fais ceci”, et il le fait. » Entendant cela, Jésus fut en admiration devant lui. Il se retourna et dit à la foule qui le suivait : « Je vous le déclare, même en Israël, je n’ai pas trouvé une telle foi ! » Revenus à la maison, les envoyés trouvèrent l’esclave en bonne santé.
Méditation
L’amitié, selon Aristote, se fonde sur une égalité des échanges. Cette amitié peut être une vertu politique lorsqu’elle s’exerce dans l’espace public. C’est par une amitié de réciprocité que s’édifient les nations. « Des notables juifs » repèrent que ce centurion est un ami d’Israël : « Il aime notre nation. » Ils soulignent auprès de Jésus les services rendus pour la construction la synagogue de Capharnaüm. C’est pourquoi, ces « notables » pensent qu’il a droit à la compassion de Jésus. Il mérite que Jésus vienne pour « sauver son esclave ». « Il mérite que tu lui accordes cela. »
Nous aussi, nous pensons avoir des droits sur Dieu. Nos prières, nos bonnes pratiques, nos engagements pastoraux, notre effort de formation nous ouvriraient des droits que nous pourrions faire valoir sur Dieu. C’est ainsi que nous comprenons l’injonction de Jésus à croire que nous avons déjà obtenu satisfaction de nos prières (Mc 11,24 ; Mt 21,22). Dans sa faiblesse, l’homme s’adresse à Dieu comme Celui en qui repose la satisfaction totale de nos besoins. Comme nous savons que Dieu est Père, nous pensons qu’Il est dans l’obligation de répondre à nos demandes (Mt 7,11).
Tout cela n’est pas faux, mais la musique est-elle juste ? De nombreux passages de l’Écriture invite à cette confiance filiale de l’enfant qui se tourne vers le visage du Père. Mais, pouvons-nous brandir l’évangile contre Dieu ? La foi est-elle une exigence que l’homme adresse à Dieu ? À l’opéra, les mots sont moins importants que le rythme qu’imprime leur mise en musique. À la maison, un sourire incurve le sens des mots plus qu’une longue explication. Dans la prière, est-ce différent ? Quelle est l’atmosphère de la confiance ? Avec quel ton Jésus nous invite-t-il à prier le Père ? Quelle est l’ambiance de ma relation au Père ? Saint Paul indiquait le parfum de la vie chrétienne. La théologie nous a tellement habitué au mot « grâce » que nous oublions d’en humer la saveur… « Car c’est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. » (Éph 2,8).
Les « notables juifs » étaient touchés par ce centurion bâtisseur de synagogue. Il empile les pierres qui édifient Israël. Mais, Jésus semble touché par une autre attitude : ce centurion présente une position spirituelle très différente de ces notables qui évaluent le mérite. « Jésus fut en admiration » devant cet officier romain qui déclare « je ne suis pas digne ».
Le centurion ne se pose pas dans une situation d’égalité avec Dieu. Il tire profit de son métier pour en faire une parabole qui lui parle : « Moi, je suis quelqu’un de subordonné à une autorité ». Il médite ainsi le mystère de la puissance de Dieu à partir de sa vie ordinaire de soldat. Paradoxalement, ce militaire romain retrouve l’antique sagesse d’Israël. Qui peut se prévaloir d’avoir donné des conseils à Dieu (Jr 23,18) ? Qui peut exiger un retour (Rm 11,34-35) ? Comme cette attitude paraît étrange dans nos démocraties libérales habituées à revendiquer des droits…
Dans la prière, notre pauvreté s’ouvre face à Dieu. Notre foi indigente ne craint pas de parler au Très-Haut. Avant chaque communion, la liturgie trace un sillon qui nous conduit à cette mendicité pleine de confiance : « Je ne suis pas digne de Te recevoir, mais dis un mot et je serai guéri. » Dans cette prière de la messe, devant Jésus-hostie, nous sommes le centurion qui avoue son indignité et nous sommes également l’esclave guéri : « Revenus à la maison, les envoyés trouvèrent l’esclave en bonne santé. » Nous sommes celui qui confesse la souveraineté de Dieu et le pauvre malade qui reçoit la guérison de son maître qui tient à lui.
Vincent REIFFSTECK. vincent.reiffsteck@wanadoo.fr
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