Évangile du Jeudi 8 février – 5e semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)
« Les petits chiens, sous la table, mangent bien les miettes des petits enfants ! » Mc 7, 24-30
En ce temps-là, Jésus partit et se rendit dans le territoire de Tyr. Il était entré dans une maison, et il ne voulait pas qu’on le sache, mais il ne put rester inaperçu : une femme entendit aussitôt parler de lui ; elle avait une petite fille possédée par un esprit impur ; elle vint se jeter à ses pieds. Cette femme était païenne, syro-phénicienne de naissance, et elle lui demandait d’expulser le démon hors de sa fille. Il lui disait : « Laisse d’abord les enfants se rassasier, car il n’est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens. » Mais elle lui répliqua : « Seigneur, les petits chiens, sous la table, mangent bien les miettes des petits enfants ! » Alors il lui dit : « À cause de cette parole, va : le démon est sorti de ta fille. » Elle rentra à la maison, et elle trouva l’enfant étendue sur le lit : le démon était sorti d’elle.
Méditation
Ce texte est un exemple vivant de la thématique de l’impureté et de la pureté développée dans l’Évangile d’hier. Un exemple donné par Jésus, toutefois, pour défier nos jugements. La scène est la suivante. Une femme « syro-phénicienne de naissance », une païenne donc, se présente devant un homme juif et est, avant même d’avoir parlé, affublé des traits de l’impureté. Preuve plus accablante encore, sa « petite fille est possédée par un esprit impur ». D’entrée de jeu, nous commençons tout de suite à la juger et à la condamner, et Jésus pour marquer sa leçon à notre égard exprime ce que nous pensons toutes et tous : « Laisse d’abord les enfants se rassasier, car il n’est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens ». Voilà le scandale de nos jugements mis en lumière par Jésus et voilà l’expression vivante de l’impureté de notre cœur : la petite fille est comparée à un chiot, à un animal.
Pour marquer avec plus de force son point, Jésus y ajoute la question de la nourriture, car, précédemment, ne disait-il pas, qu’« il n’est rien d’extérieur à l’homme qui, pénétrant en lui, puisse le souiller » et le texte ajoute « il déclarait purs tous les aliments ». Alors pourquoi refuser la nourriture à cette petite fille, une enfant, spécialement que Lui-même affirme devant la femme : « Laisse d’abord les enfants se rassasier ». Il apparaît évident qu’Il essaie ainsi de nous faire entrer, avec ses disciples, dans notre cœur afin d’y percevoir ce mal qui le souille.
Jésus, quant à lui, connaît le cœur de cette femme et, par sa remarque, a voulu susciter chez elle, chez cette païenne, ce qui se trouve de pur en son cœur. Et elle de répondre : « Seigneur, les petits chiens, sous la table, mangent bien les miettes des petits enfants ! ». Il nous est si facile de juger les gens sans connaître leurs cœurs, la pureté de l’Amour qui y réside, et cela en pure contradiction avec l’impureté des nôtres.
Cette femme avec une humilité désarmante n’est pas, comme en notre siècle, celle qui revendique son « dû » (« j’ai le droit à »), mais qui, simplement reconnaît sa pauvreté et s’en remet à cette gratuité de la Providence divine qui se répand sur tous les êtres. L’Amour de Dieu est donné en nourriture à toutes et à tous. Si nous apprenons à regarder sous la table de nos excès, de nos égoïsmes, de nos suffisances, de notre « fausse pureté », celle d’une élite qui se sent meilleure que les autres, avec ses pouvoirs, de ses possessions, etc., nous découvririons l’infini d’un Amour qui s’émiette dans le cœur de chacun.e. Oui, Dieu « rassasie toujours ses enfants » et ne sait que donner, pour ne pas dire « sur-donner », devant un cœur qui demande dans une humble pureté.
Cette pureté était déjà visible pour Jésus avec la venue de cette femme, une païenne, qui ose frapper à la porte d’un homme juif par amour de son enfant. Jésus, dans une perspective d’impureté et de pureté, veut renforcer ses paroles prononcées précédemment (Mt 7, 11) : « Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est dans les cieux en donnera-t-il de bonnes à ceux qui l’en prient ».
La linéarité possible de l’interprétation du texte d’hier sur le pur et l’impur, si facile à utiliser par toute fausse religiosité pour juger les enfants de Dieu, est ici mise à mal par cette situation avec cette femme, situation qui conduit à un réel retournement du cœur.
Si l’impureté est dans le cœur, c’est d’abord là que nous sommes appelés à discerner notre propre impureté, dont tous nos jugements sont des signes. Et c’est là aussi que nous sommes appelés à regarder, avant de juger l’autre, afin de découvrir l’Amour qui y a pris demeure. Ce travail intérieur est essentiel, car plus nous laisserons la Parole qu’est le Fils descendre dans notre cœur et le purifier, plus notre propre parole et notre propre existence deviendra source de dépossession du mal pour nos enfants et petits-enfants.
Le chemin du cœur, sa purification par la Parole, est un chemin de libération pour nous mais pour toute personne, car, malheureusement, c’est à partir de notre cœur, et de l’impureté qui s’en répand, que nous tressons le mal dans la vie de nos enfants et de nos proches, tout comme en ce monde. Puissions-nous apprendre de Dieu à libérer de nos cœurs cet Amour qui guérit et qui sauve ! À devenir en Dieu des sources d’Amour !
Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)
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