Méditation quotidienne du jeudi 21 septembre : Le passeur de Miséricorde (no 18 – série 2023-2024)

Image par Peter Fischer de Pixabay

Évangile du Jeudi 21 septembre – Saint Matthieu – 24e semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Suis-moi. L’homme se leva et le suivit » Mt 9, 9-13

En ce temps-là, Jésus sortit de Capharnaüm et vit, en passant, un homme, du nom de Matthieu, assis à son bureau de collecteur d’impôts. Il lui dit : « Suis-moi. » L’homme se leva et le suivit.
Comme Jésus était à table à la maison, voici que beaucoup de publicains (c’est-à-dire des collecteurs d’impôts) et beaucoup de pécheurs vinrent prendre place avec lui et ses disciples. Voyant cela, les pharisiens disaient à ses disciples : « Pourquoi votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ? » Jésus, qui avait entendu, déclara : « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Allez apprendre ce que signifie : Je veux la miséricorde, non le sacrifice. En effet, je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs. »

Méditation

L’appel de chaque personne est unique tout comme la rencontre avec le Christ et la conversion qu’elle provoque. Et j’ai toujours été fasciné comment Dieu nous épouse dans qui nous sommes et selon la mission qu’Il veut nous confier. Si nous prenons simplement le récit du paralytique qui précède le texte évangélique que nous méditons, l’expérience de guérison, de conversion et d’appel du paralytique se vit entourée d’une communauté de personnes. Ici, notre ami Matthieu est là, au contraire, assis seul à sa table de collecteur d’impôts et Jésus, en passant, « lui dit : « Suis-moi ». « L’homme se leva et le suivit. »

Pour qu’une telle réponse survienne, je ne peux que penser que, là à sa table de collecteur, Matthieu depuis longtemps est seul et se questionne sur le sens de sa vie. Cet homme assis est un homme, à la fois souffrant mais, plus encore, en recherche. Il pressent, vaguement, qu’il y a autre chose pour lui. Cette réalité me semble d’autant plus vrai que si Dieu, dès le sein maternel nous appelle, cela implique que, dès notre plus jeune âge, l’appel de Dieu a commencé à nous travailler le cœur; comme si l’Esprit nous labourait l’intérieur doucement jusqu’à la rencontre avec le Fils, avec le Verbe, qui éclairera alors notre mission en ce monde. Il existe en chacun.e un appel fondamental, celui de notre identité filiale unique, notre parole de Dieu unique, qui, depuis toujours, est présent en nous et s’épanouit doucement dans le secret de notre être.

Puis un jour dans ces épousailles de Dieu avec nous, Il se présente et, par son appel, mobilise toute notre vie. Il le fait ici en respectant cette solitude de Matthieu, car cette solitude cherchante en lui demande une réponse au lieu même de cette solitude; d’autant plus que le Christ veut saisir cette solitude afin de lui faire porter du fruit. Matthieu ne le sait pas encore mais l’appel d’aujourd’hui recèle un autre appel : écrire un Évangile afin de faire connaître au monde la vie de Jésus et, surtout, son enseignement. Une telle écriture lui demandera beaucoup de solitude, solitude qui lui demandera de plus en plus d’être habité par le Verbe qui voudra se dire par lui.

Il est intéressant aussi de s’attarder à ces simples mots de cette rencontre : « en passant » ou « passant par là » (Chouraqui). Dans cette rencontre avec Jésus, il n’y a aucun éclat mais bien plutôt une simplicité et une sobriété qui offre à Matthieu, dans sa rencontre avec le Verbe de Vie, les attitudes intérieures qui lui seront nécessaires pour écrire. Il y a sûrement dans ces attitudes la prédisposition nécessaire à l’adoration et à la contemplation pour écrire, sans crainte, l’Évangile. Écrire pour Matthieu se fera en laissant « passer le Verbe » dans ce qu’il écrit et, comme lors de son appel, il le suivra avec simplicité et sobriété, jusqu’où le Verbe veut l’inspirer.

Mais le texte nous révèle plus que ces attitudes, il nous précise le contenu de son expérience qui lui servira à écrire son Évangile ou, peut-être, devrait-on dire, il met en lumière son identité filiale la plus profonde, c’est-à-dire le don que le Verbe veut être par Lui ou la Figure de révélation que le Fils veut prendre par lui afin de révéler le Père. Et il me semble que nous avons un indice de cela dans le repas qui suit.

Matthieu, d’abord, n’a pas été retiré de ce milieu, ainsi défini par les pharisiens, de « publicains et de pécheurs ». Bien au contraire, car le Fils lui montre que c’est là qu’Il veut prendre par lui demeure, car c’est en eux qu’Il veut habiter :« Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades». Le cœur de l’expérience vécue par Matthieu est révélé par Jésus même : « Je veux la miséricorde, non le sacrifice ». Matthieu pourrait ainsi dire : « Mon nom est miséricorde ». Lui, le collecteur d’impôts, lui le publicain et le pécheur, lui l’homme honni à cause de son péché, a vécu sa conversion, sa guérison et son appel comme la découverte que Dieu n’est que miséricorde et qu’il est donc aimé infiniment par Dieu.  Que Dieu n’a que faire de son péché !

Matthieu ne pourra se départir de sa solitude mais elle sera devenue son lieu de la rencontre avec le Verbe, le lieu pour le laisser passer en une onction de Miséricorde.  Il ne pourra jamais oublier cette dernière, qui aura effacé tous ses péchés. Plus encore, il ne saura renier sa réalité de publicain et de pécheur comme il ne saura renier tous ces pauvres déjà jugés en ce monde. Il devra être avec le Verbe au milieu d’eux comme le témoin de la miséricorde de Dieu, et il le sera avec simplicité et sobriété.

Puisse chacun.e de nous veiller chaque jour à ce Fils qui passe et qui demande de le suivre !

Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)

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