Entre l’autel et le sanctuaire – Méditation du jeudi 17 octobre 2024

No 39 – série 2024-2025

Évangile du jeudi 17 octobre 28e semaine du Temps ordinaire

Tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions

« Cette génération devra rendre compte du sang de tous les prophètes depuis le sang d’Abel jusqu’au sang de Zacharie » Luc (11, 47-54)

En ce temps-là, Jésus disait : « Quel malheur pour vous, parce que vous bâtissez les tombeaux des prophètes, alors que vos pères les ont tués. Ainsi vous témoignez que vous approuvez les actes de vos pères, puisque eux-mêmes ont tué les prophètes, et vous, vous bâtissez leurs tombeaux. C’est pourquoi la Sagesse de Dieu elle-même a dit : Je leur enverrai des prophètes et des apôtres ; parmi eux, ils en tueront et en persécuteront. Ainsi cette génération devra rendre compte du sang de tous les prophètes qui a été versé depuis la fondation du monde, depuis le sang d’Abel jusqu’au sang de Zacharie, qui a péri entre l’autel et le sanctuaire. Oui, je vous le déclare : on en demandera compte à cette génération. Quel malheur pour vous, docteurs de la Loi, parce que vous avez enlevé la clé de la connaissance ; vous-mêmes n’êtes pas entrés, et ceux qui voulaient entrer, vous les en avez empêchés. »
Quand Jésus fut sorti de la maison, les scribes et les pharisiens commencèrent à s’acharner contre lui et à le harceler de questions ; ils lui tendaient des pièges pour traquer la moindre de ses paroles.

Méditation – Entre l’autel et le sanctuaire

Le Christ nous rappelle ce matin notre inscription : un pas dans la lignée divine, un pas dans la lignée humaine, une tresse qui s’étire sans fin. Entre l’autel et le sanctuaire, il n’y a que quelques pas. Un pas que toutes les histoires d’amour ont franchi, à commencer par les amours fous de Dieu, puis la passion des prophètes, les mariages de nos aïeux, mes rencontres furtives avec le Christ. Entre l’autel et le sanctuaire, certains se sont perdus, accourant vers l’idole, d’autres se sont unis, accroupis dans les mains de Dieu. Dans notre lignée trop humaine, des enfants furent immolés, des femmes, des voix dissidentes et toute la vivacité du vivant restent encore sacrifiés. Il faudra tôt ou tard rendre des comptes et le rejet de l’empreinte profonde du passé, condensée dans mon maintenant est aussi futile qu’inutile. Rendre compte de cet amour démesuré qui nous aura engendrés. Rendre compte par la vie donnée ici et qui fait advenir Dieu juste là, sous nos yeux.

En accompagnement spirituel nous écoutons, explorons de profondeurs en profondeurs toutes les surfaces de l’âme. Parfois égratignées, parfois creusées, les surfaces de l’âme demeurent imbriquées. Polies par l’amour, elles forment alors un autel sur lequel Dieu se repose. En accompagnement, en s’approchant de l’autel, nous contemplons des sanctuaires dans lesquels s’entassent une multitude. Parents, prophètes, anges et enfants prennent place dans les bancs. Ils observent et prient pour les moins vivants que nous sommes dans nos soucis, sur nos écrans. En marchant côte à côte vers l’autel, vers l’union, nous accompagnons la multitude du vivant qui peuple la terre sacrée de la personne accompagnée. Une multitude qui s’abrite tant bien que mal à l’intérieur de nos cathédrales. J’écoute cette amie, l’œil rouge peinturé de colère, elle rejette avec véhémence les parents ayant manqué, la société exempte de désir, les enfants fuyant le réel. Elle rejette ses aïeux ignares, chrétiens et crasseux de souffrance, pour encenser une spiritualité parée d’orient et d’inoffensif. Elle ne s’inscrit plus, s’affaisse dans un présent aux contours indéfinis. Un présent largué de sa tradition et de son ancrage mais plein d’appartenances éparses, de possessions exotiques. Un présent au passé biffé, ne formant plus substance du présent et ne donnant plus sens à l’advenir.

Entre l’autel et le sanctuaire, nous marchons au rythme de la consolation. Ces générations d’hommes et de femmes qui se sont donné la main et l’amour, dans le sein de Dieu pour engendrer la Vie et ses enfants. Les manquements, les trébuchements, les égarements sont nombreux du sanctuaire vers l’autel. Or, ils sont tous inscrits dans les pas de ce Dieu qui console, accourt et unit. L’espace entre l’autel et le sanctuaire perce le réel, il n’y a rien de caché, tout est là sous nos pas. La vie présente, la vie passée et la vie future réunies comme trois petits pages lors d’un mariage qui échangent des confidences en riant bruyamment dans l’allée fleurie. Il n’y a rien de caché, tout est là, la communion réunissant les vivants d’avant, de maintenant et de demain, marchent main dans la main avec ce Dieu qui advient et qui appelle. Avec ce Dieu qui flâne avec foi, avec joie, à la surface de nos âmes.

Barbara Martel – bmartel@lepelerin.org

DROIT D’AUTEUR

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