No 172 – série 2024-2025
Évangile du jeudi 13 mars – 1re semaine de Carême
Tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions
« Quiconque demande reçoit » (Mt 7, 7-12)
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira. Ou encore : lequel d’entre vous donnera une pierre à son fils quand il lui demande du pain ? ou bien lui donnera un serpent, quand il lui demande un poisson ? Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est aux cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent !
Donc, tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux, vous aussi : voilà ce que disent la Loi et les Prophètes. »
Méditation – Par monts et merveilles
Il est de ces Paroles de l’Évangile qui sont menacées d’usure, le sens peut paraître défraîchi. Mille fois entendue, demandez, on vous donnera… L’exaucement empressé de Dieu sous toutes ses invitations à entrer en relations nouvelles, créatrices de joie et fertilisantes se contient difficilement en quelques mots. Puis la traduction s’affine, je demande, j’interroge. Puis, les mots se dépouillent, le vernis du truisme s’écaille, révélant un éclairage inouï, m’ouvrant à la merveille :
« Demandez et il vous sera donné. Interrogez et vous apprendrez. Frappez et il vous sera ouvert. Oui, quiconque demande reçoit. Et qui interroge apprend. Et à qui frappe, on ouvre » (Mt 7.7-8, trad. F. Boyer, Évangiles, 2022). »
Demander, interroger, frapper. Des verbes qui sollicitent un élan vers l’autre, un goût de l’autre voire un redressement. Comme le fils prodigue qui reprend le chemin pour aller frapper à la porte de chez lui. Gravir pour être à la hauteur, face à un horizon. Être debout à hauteur de Dieu, à hauteur d’homme, à hauteur de la porte. Demander, n’est pas mendier mais prier l’autre; interroger n’est pas se plaindre mais dialoguer, frapper n’est pas exiger mais inviter à la rencontre. Tous ces verbes conduisent à la révélation de ce qui m’est donné grâce au don du Père à travers l’autre. La gratuité de la réponse de l’autre, à travers la dignité et l’accueil qu’il m’insuffle pour me relever, m’invite à présenter mon visage, ma vérité et ma vulnérabilité devant cet autre. Demander, interroger, frapper forment l’alliance de l’humilité et de la vérité de ce que je suis, quand je dépends de l’autre, quand j’ai besoin de l’autre, quand je désire l’autre.
La réponse évangélique est un appel à grandir, une élévation accordée en toute interdépendance. Donner, apprendre, ouvrir. Des verbes incarnant la bonté, le souci, l’accompagnement. Donner n’est pas répondre, c’est le surplus de vie débordant de la réponse. Apprendre, n’est pas répondre, c’est le surplus de présence qui fait grandir. Ouvrir, n’est pas répondre comme on le ferait à travers la porte, à travers le judas. C’est un mouvement de confiance vers l’autre, qui le découvre en le recevant, en lui permettant d’être reçu et de se recevoir tout à la fois. Une réponse comme un appel à s’élancer, à s’élever.
Il n’y a pas de récit d’Ascension dans l’Évangile de Matthieu mais le Christ de Matthieu nous ascensionne par le renversement initié par le Royaume, par la conversion de ce qui est pauvre et humble, de ce qui fait la richesse de la petite voie et de l’enfance du cœur. À travers ses versets, c’est par le redressement, le gravissement et le franchissement des monts que l’on embrasse les Béatitudes et que l’on participe à la Transfiguration. L’Ascension traverse subtilement ses écrits et nos vies. Elle n’est pas un évènement appartenant au merveilleux mais elle est merveilleuse au cœur des croyants. Monter c’est se montrer en vérité. Comme l’hostie montée à hauteur d’homme durant l’Eucharistie à laquelle je demande une seule Parole pour être guérie. Une élévation comme une ascension qui consacre et vivifie le tout-bas. L’intime de la mie est élevée en un pain de vie qui nourrit d’infini notre existence et pétrit l’éternité au sein du monde. Pour le dire avec la poésie du Frère François Cassingena-Trévedy : « Et de fait, il est merveilleux, il est toujours merveilleux de monter. De monter depuis le tout-bas des choses. De monter au plus haut, dans le tout-bas des choses. L’intime de toute chose attend de notre part une ascension qui l’explore (Propos d’altitude, 2022, p. 39) ». Et ce qui est merveilleux, c’est qu’il suffit de demander.
Barbara Martel – bmartel@lepelerin.org

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