Méditation quotidienne du dimanche 5 novembre : L’abaissement (No 63 – série 2023-2024)

Évangile du Dimanche 5 novembre – 31e dimanche du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Ils disent et ne font pas » Mt 23, 1-12

En ce temps-là, Jésus s’adressa aux foules et à ses disciples, et il déclara : « Les scribes et les pharisiens enseignent dans la chaire de Moïse. Donc, tout ce qu’ils peuvent vous dire, faites-le et observez-le. Mais n’agissez pas d’après leurs actes, car ils disent et ne font pas. Ils attachent de pesants fardeaux, difficiles à porter, et ils en chargent les épaules des gens ; mais eux-mêmes ne veulent pas les remuer du doigt. Toutes leurs actions, ils les font pour être remarqués des gens : ils élargissent leurs phylactères et rallongent leurs franges ; ils aiment les places d’honneur dans les dîners, les sièges d’honneur dans les synagogues et les salutations sur les places publiques ; ils aiment recevoir des gens le titre de Rabbi. Pour vous, ne vous faites pas donner le titre de Rabbi, car vous n’avez qu’un seul maître pour vous enseigner, et vous êtes tous frères. Ne donnez à personne sur terre le nom de père, car vous n’avez qu’un seul Père, celui qui est aux cieux. Ne vous faites pas non plus donner le titre de maîtres, car vous n’avez qu’un seul maître, le Christ. Le plus grand parmi vous sera votre serviteur. Qui s’élèvera sera abaissé, qui s’abaissera sera élevé. »

Méditation

L’Évangile d’aujourd’hui nous offre une clef vitale pour un chemin de sainteté : l’abaissement. Car il nous est difficile, comme ces scribes, de passer de la parole aux actes, de ne pas transférer nos fardeaux sur les autres, dans ce désir le plus souvent inconscient de s’en délester, de les abandonner à ces fardeaux ou de ne pas chercher les titres et les honneurs afin d’avoir un vague sens d’existence et de reconnaissance. Qu’est-ce que notre vie enseigne ? Comment notre vie parle-t-elle Dieu ? Et à quoi renvoie cette notion d’abaissement ?

Comme Jésus est Fils de Dieu, qu’Il est sortie d’auprès du Père et que sa vie ne fait que parler d’éternité ou de la vie en Dieu, son abaissement nous parle donc de la vie cachée du Fils en Dieu. C’est dans cette vie cachée que se trouve la réponse à nos chemins d’humanité.

En Dieu, entre les Personnes divines, il n’y a qu’abaissement. Cet abaissement se décrit comme une dépossession constante des Personnes divines entre elles, c’est-à-dire par le don amoureux mutuel d’Elles-mêmes. Elles ne se posent jamais devant l’Autre comme plus grandes mais comme plus « basses », car l’Amour s’agenouille continuellement devant la beauté et la grandeur de l’Autre. Cette attitude entre elles peut littéralement être appelée « prière ». Toute la vie en Dieu est une « prière éternelle » où, dans l’accueil et le don mutuels, chacune des Personnes vivent les unes dans les autres.

L’Amour n’est pas de s’élever mais de s’abaisser, dans le don comme dans l’accueil, afin de se poser devant l’Autre dans l’humilité aimante nécessaire à la rencontre. Il n’y a pas en Dieu de titres que les Personnes divines se donnent mais le fait d’être appelé Père, Fils ou Esprit naît des deux Autres. C’est dans le regard de l’Autre, par exemple du Fils et de l’Esprit, que le Père se reçoit Père. Sans les deux Autres, il n’y a non seulement pas d’Amour mais aucune reconnaissance possible de son propre mystère.

Cet « être bas » des Personnes divines a conduit le Père par le Fils dans l’Esprit à créer ce monde, à faire Alliance avec les humains et à envoyer son Fils par Amour. Ce mouvement kénotique, où Dieu inimaginablement se fait « bas » ou se rend accessible à l’humain, montre l’extraordinaire Toute-Grandeur de Dieu dans sa « capacité » à devenir le « Très-Bas ». La Trinité se remet en quelque sorte d’Amour entre nos mains et se fait Pain de Vie afin de donner accès à sa Vie éternelle. Cette eucharistie trinitaire est le miracle incompréhensible de l’Amour de Dieu, si grand que, trop souvent, nous refusons d’entrer dans son abaissement.

Nous préférons de loin les élévations dans nos vies que les voies d’abaissement. Intérieurement, il y a une résistance incroyable en nous pour participer à cette grâce d’abaissement de la Vie divine où, devant Dieu comme devant les humains, nous nous plaçons plus bas que l’autre, comme un « laveur de pieds » à la suite de Jésus. Il nous est difficile d’entrer dans leur prière éternelle où, agenouillés devant la beauté et le mystère de l’A(a)utre, nous adorons en esprit et en vérité… si bas que se révèle toute grandeur.

Pourtant, nous sommes appelés par l’A(a)utre à entrer en son mystère, mais seul l’abaissement nous le rend accessible, car c’est aux tout-petits que Dieu révèle les mystères de son Royaume. Nous ne pouvons contempler un être par en-haut mais seulement par en-bas. À la messe, quand survient « l’élévation », cet instant où le prêtre élève l’hostie en disant « par lui, avec lui et en lui, à toi, Dieu le Père tout-puissant, dans l’unité du Saint-Esprit, tout honneur et toute gloire, pour les siècles des siècles», cette élévation n’est possible que par l’abaissement infini du Fils en son incarnation, en sa Passion jusqu’à la mort et à sa descente aux enfers. Ce n’est pas Lui qui s’élève mais c’est nous qui l’élevons en le louant dans son abaissement. « Le plus grand parmi vous sera votre serviteur. Qui s’élèvera sera abaissé, qui s’abaissera sera élevé. »

Puissions-nous apprendre que l’essence de la Vie divine et humaine est une prière d’Amour qui ne se déploie que dans l’abaissement. Cet abaissement est le seul véhicule de cet Amour, car il exprime le don complet et « bas » de soi par Amour de l’A(a)utre et l’accueil entier du don de l’A(a)utre en y offrant notre abaissement comme le vase précieux où l’A(a)utre peut écouler son mystère, présent le plus précieux qui soit.

La vie spirituelle, à la fois vie humaine et divine, appelle l’abaissement afin que l’A(a)utre soit élevé en nous et que nous soyons élevés nous-mêmes par l’A(a)utre.

Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)

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