Méditation : La marche sur les eaux (No 87)

Image par falco de Pixabay

Évangile du Mercredi après l’Épiphanie 5 janvier 2022 (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Ils le virent marcher sur la mer » Mc 6, 45-52

Aussitôt après avoir nourri les cinq mille hommes, Jésus obligea ses disciples à monter dans la barque et à le précéder sur l’autre rive, vers Bethsaïde, pendant que lui-même renvoyait la foule. Quand il les eut congédiés, il s’en alla sur la montagne pour prier. Le soir venu, la barque était au milieu de la mer et lui, tout seul, à terre. Voyant qu’ils peinaient à ramer, car le vent leur était contraire, il vient à eux vers la fin de la nuit en marchant sur la mer, et il voulait les dépasser. En le voyant marcher sur la mer, les disciples pensèrent que c’était un fantôme et ils se mirent à pousser des cris. Tous, en effet, l’avaient vu et ils étaient bouleversés. Mais aussitôt Jésus parla avec eux et leur dit : « Confiance ! c’est moi ; n’ayez pas peur ! »
Il monta ensuite avec eux dans la barque et le vent tomba ; et en eux-mêmes ils étaient au comble de la stupeur, car ils n’avaient rien compris au sujet des pains : leur cœur était endurci.

Méditation

L’évangile d’aujourd’hui est en directe ligne avec celui d’hier. Jésus quitte cette foule et ses disciples à qui il vient d’offrir un don inimaginable, qu’ils n’ont su accueillir. Ils se sont contentés de pain. Devant cet absurde qui marque trop souvent nos vies, Jésus a besoin de prier. Il se place devant le Père avec sa faim et sa soif infinies de chacun.e de nous. Il aimerait pouvoir se substituer à chacun.e de nous afin de nous faire connaître la « communion » divine, dans un véritable partage du « Pain de Vie ». Mais les disciples et nous ne sommes pas prêts.

Il prie là seul sur la montagne mais, comme le raconte l’évangile, il continue à garder son regard sur ses disciples et sur nous. Il les voit s’épuiser à ramer, comme il nous voit trop souvent ramer seuls dans nos vies contre les vents contraires. Pendant que nous traversons ces tempêtes avec la peur constante de périr et avec la triste habitude de ne pas compter sur Lui, par sa prière, Il continue à veiller sur nous et à nous communiquer sa grâce.

Il demeure présent tout près de nous même, même s’il nous apparaît comme un « fantôme ». Étrangement, au lieu que cette Présence nous rassure, on se met « à pousser des cris ». Pourtant, dit l’évangile, « il vient » vers nous ou, pour dire autrement, c’est pour nous qu’Il vient, qu’Il est venu en ce monde. Dans le texte d’hier, nous sommes inquiets de notre faim et, dans le texte d’aujourd’hui, nos yeux sont fixés sur la tempête, sur tous les problèmes qui traversent notre existence, et Lui, en devient un fantôme. Puis,  » tous, en effet, l’avaient vu et ils étaient bouleversés ».

À la multiplication des pains, nous avions notre faim à offrir ou à ouvrir pour glisser dans une autre faim, celle de Dieu pour nous et celle de Dieu en nous, et à découvrir comment Dieu et l’humain y trouvent chemin de rassasiement. Dans cette traversée sur cette mer agitée, nous avons à offrir et à ouvrir nos peurs, nos besoins et nos désirs de tout contrôler ou de tout maîtriser et, surtout, de tout perdre, car, si centrés sur nous-mêmes, nous perdons le mystère de la Présence divine et la nôtre en la sienne.

Dans un cas comme dans l’autre, nous refusons la perte de notre faim ou de notre être, et nous oublions le chemin, la route, la traversée… avec sa joie, au coeur des tempêtes, de marcher avec le Tout-Autre. Dans un cas comme dans l’autre, nous refusons au Fils notre pauvreté, notre faiblesse, notre vulnérabilité en se barricadant derrière notre peur et notre propre force. Étrangement, nous refusons de compter sur Lui et nous ne comprenons pas que ce n’est ni le pain multiplié ni le bateau accosté au port qui sont importants mais l’espace et le temps laissés pour accueillir Dieu, pour entrer dans le mystère de nos P(p)résences communiées.

Dieu demande notre faim et notre bateau qui sombre pour rassasier toutes les personnes qui ont faim, qui peinent et sont submergées par les milles vagues de la souffrance et du mal. Il n’y a rien de plus grand pour le Père que de voir une personne qui s’est laissée épouser par la pauvreté de son Fils jusqu’à s’abandonner entièrement.

Dans notre monde, la norme est la richesse; dans celui de Dieu, c’est la pauvreté de tout recevoir et de tout donner. Dans notre monde, nous cherchons des résultats; dans celui de Dieu, c’est l’éternel chemin de l’enfantement ou de l’engendrement. Dans notre monde, nous cherchons la fin (et nous le savons la fin justifie les moyens); dans celui de Dieu il n’y a que « commencement ». Dans notre monde, est promu un « coeur endurci »; dans celui de Dieu, un Coeur ouvert et transpercé.

Laissons-nous saisir par le Christ ! Laissons Lui tout notre être ! Et, de cette façon, tout sera chemin et toute traversée se fera dans la foi : « Confiance ! c’est moi ; n’ayez pas peur ! » Et nous apprendrons à marcher sur les eaux !

Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)

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