Méditation : De la parole aux actes (No 50)

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Évangile du lundi 15 novembre (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

«Que veux-tu que je fasse pour toi ? – Seigneur, que je retrouve la vue » Lc 18, 35-43

Alors que Jésus approchait de Jéricho, un aveugle mendiait, assis au bord de la route. Entendant la foule passer devant lui, il s’informa de ce qu’il y avait. On lui apprit que c’était Jésus le Nazaréen qui passait. Il s’écria : « Jésus, fils de David, prends pitié de moi ! » Ceux qui marchaient en tête le rabrouaient pour le faire taire. Mais lui criait de plus belle : « Fils de David, prends pitié de moi ! » Jésus s’arrêta et il ordonna qu’on le lui amène. Quand il se fut approché, Jésus lui demanda : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » Il répondit : « Seigneur, que je retrouve la vue. » Et Jésus lui dit : « Retrouve la vue ! Ta foi t’a sauvé. » À l’instant même, il retrouva la vue, et il suivait Jésus en rendant gloire à Dieu. Et tout le peuple, voyant cela, adressa une louange à Dieu.

Méditation

Chaque matin, nous reprenons la route, le chemin. Frottons bien nos yeux : nous serons témoins de la rencontre de Jésus avec l’aveugle de Jéricho et avec l’aveugle en nous.

 À la lecture du récit de Luc, j’ai vu se poindre l’horizon d’une joie désirée depuis longtemps. Quelle est donc cette joie soudaine qui s’accroche à nos pas ?

Un premier mouvement : prends acte de ce qui t’habite.

« Un aveugle mendiait, assis au bord de la route. » (v.35) au temps où Jésus s’approchait de la ville de Jéricho. Il mendie et qui plus est, il fait partie des exclus : cet homme est un pécheur méritant ce qui lui arrive.

De la cécité que pouvons-nous dire ? Un homme perd la vue de manière foudroyante et voici ce qu’il dit : « À voir un aveugle avec sa face souvent inexpressive, figée, presque pétrifiée dans son corps, reflet de la prison dont l’entoure l’obscurité (…), on pourrait croire que la cécité est un état, sinon tranquille, du moins stable. Il n’en est rien. À tout instant, c’est comme un volcan prêt à exploser. »

L’état d’égarement et de désorientation dont témoignent les aveugles dans leurs déplacements n’est pas sans toucher nos propres tâtonnements. Entendez les frappes d’une canne blanche sur le pavé, entendez les pas hésitants que l’on voudrait si sûrs, à l’abri des dangers, des cassures, des faux pas ou des mauvaises directions.

Quel est mon propre lieu de cécité ? Le chaos d’une vision déformée par la peur qui s’empare de moi ? La route de l’anxiété qui me fige sur place ? L’appréhension des événements qui fait naître en moi une succession de scénarios hors du réel ? Tout est là pour retenir l’aveugle que je suis sur le bord du trottoir et empêcher l’être des « fils et filles de Dieu » de s’avancer vers Jésus avec la foi pour seule « lampe sur ses pas » (Ps 118).

Un deuxième mouvement : regarde Jésus et laisse-toi regarder par Lui.

 L’aveugle, « en entendant la foule, » demande ce qui arrive. On luiapprend que c’est Jésus le Nazaréen qui passe. (v.37) Un grand cri traversa la foule. Un cri que l’on veut faire taire. Il est fou cet homme s’il croit que Jésus l’entendra. « Ceux qui sont en tête le rabrouent pour qu’il garde silence. (Chouraqui v.39) » ; cela vous rappelle-t-il les enfants rabroués ? Le cri déchire par deux fois tous les interdits et Jésus l’entend et l’aime de plus belle. « Fils de David, prends pitié de moi ! » (v.39)

Il y a quelque chose d’une simplicité désarmante dans cette Parole de Luc. Il décrit avec chaleur cet homme aveugle, qui saisit sa chance de se retrouver en contact avec Jésus. Il a entendu parler de lui. À chaque fois, quelque chose du « cœur brûlant » s’attachait à son désir d’être touché par lui. Il ne veut plus être tenu à l’écart. Jésus l’entend. Il m’entend, il t’entend aussi.

Simplicité de la parole aux actes. Jésus s’arrête, ordonne qu’il lui soit amené ; et quand il s’approche, l’interroge : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? Il dit : « que je puisse voir à nouveau ! » (Chouraqui v.40-41). « Retrouve la vue ! Ta foi t’a sauvé. » À l’instant même, il retrouva la vue, et il suivait Jésus en rendant gloire à Dieu. » (Bible liturgique v.42-43) Tout le peuple aussi voit et rend gloire à Dieu.

Un troisième mouvement : garde ton cœur ouvert.

La joie de l’Esprit-Saint est à l’œuvre comme un courant souterrain dans notre propre humanité. Au bon moment, il fait surface et déborde, apportant sa nouveauté : un jaillissement de foi, de confiance, au creux de nos vies. Encore un pas, un petit pas ! L’aveugle de Jéricho ne s’arrêta pas au miracle, il touche une joie nouvelle et entreprend sa route à la suite de Jésus.

François Varillon nous donne des mots exceptionnels pour la compréhension de l’aveugle de Jéricho. « Jésus demande toujours la foi aux hommes et aux femmes qu’il rencontre. Il ne dit jamais : « Je t’ai sauvé », il dit toujours : « Ta foi t’a sauvé. » On n’est pas sauvé par un autre, cet autre fût-il Dieu. L’homme c’est quelqu’un. C’est l’homme qui se sauve, lui-même dans la foi et par la foi. Nous n’imaginons pas à quelle profondeur Dieu respecte l’homme. C’est là qu’il faut absolument que nous soyons d’une extrême rigueur. Autrement notre Dieu ne sera qu’une idole et Dieu ne veut pas être pour nous une idole. »

Michelle Arcand (michelle.arcand@hotmail.com)

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