Évangile du Vendredi 7 octobre 2022 – 27e semaine du temps ordinaire (tiré de AELF)
« Si c’est par le doigt de Dieu que j’expulse les démons, c’est donc que le règne de Dieu est venu jusqu’à vous » Lc 11, 15-26
En ce temps-là, comme Jésus avait expulsé un démon, certains dirent : « C’est par Béelzéboul, le chef des démons, qu’il expulse les démons. » D’autres, pour le mettre à l’épreuve, cherchaient à obtenir de lui un signe venant du ciel. Jésus, connaissant leurs pensées, leur dit : « Tout royaume divisé contre lui-même devient désert, ses maisons s’écroulent les unes sur les autres. Si Satan, lui aussi, est divisé contre lui-même, comment son royaume tiendra-t-il ? Vous dites en effet que c’est par Béelzéboul que j’expulse les démons. Mais si c’est par Béelzéboul que moi, je les expulse, vos disciples, par qui les expulsent-ils ? Dès lors, ils seront eux-mêmes vos juges. En revanche, si c’est par le doigt de Dieu que j’expulse les démons, c’est donc que le règne de Dieu est venu jusqu’à vous. Quand l’homme fort, et bien armé, garde son palais, tout ce qui lui appartient est en sécurité. Mais si un plus fort survient et triomphe de lui, il lui enlève son armement auquel il se fiait, et il distribue tout ce dont il l’a dépouillé. Celui qui n’est pas avec moi est contre moi ; celui qui ne rassemble pas avec moi disperse. Quand l’esprit impur est sorti de l’homme, il parcourt des lieux arides en cherchant où se reposer. Et il ne trouve pas. Alors il se dit : “Je vais retourner dans ma maison, d’où je suis sorti.” En arrivant, il la trouve balayée et bien rangée. Alors il s’en va, et il prend d’autres esprits encore plus mauvais que lui, au nombre de sept ; ils entrent et s’y installent.
Ainsi, l’état de cet homme-là est pire à la fin qu’au début. »
Méditation
« En ce temps-là, comme Jésus avait expulsé un démon, certains dirent : ‘C’est par Béelzéboul, le chef des démons, qu’il expulse les démons’ ».
Face aux paroles et aux actions miraculeuses de Jésus, certains sont bousculés, dérangés et réagissent par du mépris et du rejet. Quoi de plus souffrant pour un cœur fermé et ankylosé que de se voir confronté au bien, à l’Amour! Lorsque Moise avait accompli des prodiges au nom de Dieu, les magiciens de l’Égypte jadis, reconnurent que c’était le doigt de Dieu qui était à l’œuvre (Ex 8, 15). Mais n’est-il pas alors si triste, de constater que les fils d’Israël ne reconnaissent pas l’œuvre de Dieu en Son Fils qui est venu jusqu’à chez eux? Plus émouvant encore, de voir comment l’auteur même du Royaume est accusé de sa destruction.
Jésus ne se suffit pas de démontrer l’absurdité des propos qui se tiennent contre Lui, mais Il va dépasser le simple cadre du démon qui travaille contre Lui pour nous lancer un appel déchirant. « Celui qui n’est pas avec moi est contre moi ; celui qui ne rassemble pas avec moi disperse ». Des paroles mystérieuses qui suscitent un grand questionnement en chacun-e de nous : sommes-nous réellement engagés avec le Christ? Est-ce que nous bâtissons avec Lui le Royaume, ou nous avons tourné le dos à Son œuvre parce que nous sommes bien occupés à construire nos propres gloires éphémères?
Ne pas choisir, ne pas prendre position avec Lui, c’est déjà Le trahir. Celle ou celui qui n’œuvre pas pour l’unité, déchire le tissu de la fraternité. Tous nos refus, nos éloignements, nos errances, nos froideurs… sont des pistes qui nous font glisser insensiblement vers les ténèbres. Des paroles, peut être abruptes mais qui nous tiennent éveillés aux heures des nuits de la foi. Des paroles austères mais qui n’effacent guère le message de miséricorde.
Être avec Jésus et le suivre est un chemin de grand dépouillement, beaucoup risquent de s’arrêter en route. Il ne s’agit pas d’une course folle pour arriver en premier, pour être les meilleurs, les plus savants, les plus brillants; il s’agit de ne désirer que Jésus seul, de ne rechercher que Son Royaume. Ce désir permettra au Berger de nous rattraper, de nous relever et de nous porter sur Ses épaules lors de nos chutes, de nos inerties et de nos divagations. Notre histoire personnelle et communautaire est un constant tiraillement entre l’appel de Dieu et nos refus. Tous les saints, les priants, les consacrés, les missionnaires, et toutes celles et ceux qui ont suivi Jésus connurent ces heures de déchirements et de tourments. Le Royaume divin qui gît mystérieusement au fond de notre cœur, blotti sous la cendre fumante de tous nos petits royaumes, ne peut émerger qu’à travers une mort à soi, un lâcher-prise de toutes les fausses possessions auxquelles nous nous agrippons, par un balayage de tous nos encombrements intérieurs. Ne paniquons pas devant nos déchirements intérieurs, ne désespérons pas devant nos fragilités, nos faiblesses et nos lâchetés, évangélisons tous nos zones d’ombres et elles deviendront des passages vers le cœur de Dieu. « Le péché nous fait tomber entre les mains de Dieu » disait Dom André Louf. Non qu’Il se plaise de nous voir pécher mais qu’Il désire toujours nous embrasser d’Amour et de Miséricorde. Il nous faut peut-être commencer à se défaire de cette image défigurée, encore vivante dans nos mémoires collectives, d’un Dieu pervers qui a tant pesé lourd.
L’humain a en lui, cette inclination naturelle de fuir Dieu, de fuir « le paradis », cette tendance à être séduit par une fausse liberté. Cependant, en chacun-e de nous est enfouie une essence divine, qui par pure grâce, peut nous transformer en une icône de Sa Vie. Existe au plus profond de nous, une empreinte indélébile du divin qui provoque en nous toujours une nostalgie de Dieu.
Les paroles provocatrices de Jésus ouvrent sur l’expérience d’une nouvelle liberté, de la vraie liberté qui nous invite à faire des choix de Vie, qui nous permet de traverser la vie tout en restant debout, qui nous apprend à assumer la croix, à aller jusqu’au bout avec Lui, jusqu’au bout de notre réponse à Son appel, jusqu’au bout de toutes nos solidarités humaines.
Afin de ne pas devenir des lieux arides propices à l’installation du mal, il nous faut protéger notre terre intérieure par la prière. Avec la prière, nous accédons à notre espace intérieur de silence et nous nous plaçons en présence de Dieu. Plus nous prions et plus les murs de Son Royaume en nous s’élèvent et se fortifient. Dans ce Royaume nous sommes entiers, intacts, le malin n’y a pas accès et le mal ne nous séduit plus. Les épreuves extérieures peuvent bien continuer mais n’atteindront pas cet espace intérieur où nous habitons sereinement notre identité filiale.
Dieu vient à chaque instant nous offrir notre dignité, notre gloire et notre divinité. Contemplons cette vérité, laissons-là nous illuminer de l’intérieur. Et que tous nos choix au quotidien, soient sous le signe de la liberté intérieure qui refuse d’être esclave du mal et qui s’engage à rassembler et à bâtir avec le Christ.
Gladys EL Helou (gladyshelou@gmail.com)
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