Méditation : Identité véritable et suivance: les caractéristiques du disciple (No 28)

Stefano Ferrario de Pixabay

Évangile du dimanche 24 octobre (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Rabbouni, que je retrouve la vue ! » Mc 10, 46b-52

En ce temps-là, tandis que Jésus sortait de Jéricho avec ses disciples et une foule nombreuse, le fils de Timée, Bartimée, un aveugle qui mendiait, était assis au bord du chemin. Quand il entendit que c’était Jésus de Nazareth, il se mit à crier : « Fils de David, Jésus, prends pitié de moi ! » Beaucoup de gens le rabrouaient pour le faire taire, mais il criait de plus belle : « Fils de David, prends pitié de moi ! » Jésus s’arrête et dit : « Appelez-le. » On appelle donc l’aveugle, et on lui dit : « Confiance, lève-toi ; il t’appelle. » L’aveugle jeta son manteau, bondit et courut vers Jésus. Prenant la parole, Jésus lui dit : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » L’aveugle lui dit : « Rabbouni, que je retrouve la vue ! » Et Jésus lui dit : « Va, ta foi t’a sauvé. » Aussitôt l’homme retrouva la vue, et il suivait Jésus sur le chemin.

Méditation

Ce récit intervient après les 3 annonces de la Passion, au cours de la montée à Jérusalem, le lieu final de la mission de Jésus. On est donc nettement dans la dynamique qui conduit à la Passion.

Bartimée c’est un nom judéo-grec. Voilà donc un homme frontière dont le CV ne semble pas très brillant. Alors que toute la foule est en marche vers Jérusalem, Bartimée, lui, est statique comme si sa vie s’était arrêtée au bord du chemin. Sa cécité le classe parmi les impurs.

Bartimée est typiquement ce qu’on appellerait aujourd’hui un exclu. Il n’appartient pas à la foule, il ne marche pas avec elle, et la foule le fait taire, il n’a pas droit à la parole. Pourtant lui, interpelle Jésus par son prénom, « Jésus », qui veut dire « Dieu sauve ». Déjà là on comprend que Bartimée voit clair ! Contrairement à la foule. C’est le comble puisque c’est l’aveugle qui voit le mieux ! La fausse prière des fils de Zébédée (vous ne savez pas ce que vous demandez) est suivie par la vraie prière de l’aveugle qui sera exaucée comme le dernier acte de Jésus avant Jérusalem.

En plus de l’appeler « Jésus », Bartimée ajoute « Fils de David » et il est rabroué à cause de ce titre. Durant toutes les pages de l’Évangile qui précèdent, Jésus interdisait même de se faire appeler comme ça, donc la foule et les disciples font ce que Jésus leur disait de faire : taire qu’il est le messie. Mais Bartimée persévère. Il veut voir Jésus, mais ne le peut pas physiquement. Les disciples et la foule le rabrouent dans sa demande, comme ils l’ont fait pour les petits enfants. « N’embête pas le Maître ».

Mais lui va voir en Jésus ce que ceux qui voient ne voient pas ! On lui dit « le Nazaréen », il crie « fils de David ». Il y a bien des aveugles qui voient et d’autres qui voient mais sont aveugles. Cet homme est donné à la foule qui ne voit pas qui est Jésus. C’est un pauvre qui enseigne. Les riches ne voient pas.

Ce titre est messianique. Il veut dire ROI et en plus Jésus va vers la capitale de David. Pour y être institué roi. Mais la confusion sur ce mot et cette royauté est grande pour ceux qui ne voient pas. Car son trône sera sa croix.

Bartimée demande non pas à voir, mais à « retrouver la vue ». Comme si ses yeux voyaient, mais pas le vrai : la vraie réalité, c’est que Jésus marche vers Jérusalem. Comme si Bartimée voulait que Jésus lui ouvre les yeux sur la signification de cette marche.

Jésus ne va pas à la rencontre de l’infirme comme il l’avait fait pour Jaïre (5,24). De même ce ne sont pas des autres qui apportent l’infirme comme pour le paralytique (2,3) ou l’aveugle de Bethsaïde (8,22). Ici Jésus s’arrête (se tient débout tandis que Bartimée est assis) et demande à ce qu’on appelle Bartimée. Que Bartimée choisisse librement, qu’il se mette en mouvement, qu’il agisse. Jésus aurait pu lui-même appeler Bartimée (par ex. Eh ! Bartimée viens !). Non il choisit de passer par ceux qui l’ont rabroué.

En effet Jésus va en profiter pour retourner la foule. Il va guérir leur médiation en faisant passer leur attitude d’hostilité à une attitude solidaire.

« Et lui rejetant son manteau, bondit et vint à Jésus » : la réponse de Bartimée est immédiate, il répond d’abord par des gestes avant de parler, son obéissance est immédiate, l’aveugle conforme ses gestes à la volonté de Jésus.

Ici Bartimée nous donne le témoignage de la véritable suivance de Jésus…. En actes avant tout, par une mobilisation, un engagement de toute sa volonté d’aller à Jésus et pas seulement par une belle parole « Seigneur je crois ! ». Ses gestes disent sa Foi.

Bartimée représente la foule des disciples, l’Église en mission. Il a supplié « prends pitié de moi ! » », qui va devenir la forme liturgique du « Kyrie Eleison ». Cette demande est susceptible de nous guérir de notre cécité spirituelle quand elle est humble et vraie.

 Jésus lui pose la même question qu’aux frères Zébédée « que voulez-vous ? » Que veux-tu que je fasse pour toi ? « Seigneur que je retrouve la vue ». Il dit ça pour lui, mais c’est aussi comme une parabole de ce que Jésus veut que ces disciples disent. Cet homme est une parabole pour l’Église. Il dit que le Nazaréen est le Fils de David et qu’il est Seigneur.

Il était immobile, et ne bouge et même bondit que lorsque Jésus l’appelle. Lui qui ne voit pas, comprend que cet appel c’est son baptême : il jette son vieux vêtement, se sépare de ses sécurités, de ses possessions. Il ne voit rien mais il a tout compris à l’inverse des Apôtres qui voient tout mais ne comprennent rien.

Il est l’image du catéchumène

« Que je re-voie » : Il devient le vrai disciple qui suit Jésus vers Jérusalem.

Jésus guérit l’aveugle, signe messianique par excellence. Il accepte de lever le secret messianique à partir de maintenant. C’est pour ça qu’à l’entrée à Jérusalem ils l’acclameront comme messie Fils de David… « Et il suivait Jésus sur le chemin » c’est la première fois qu’un guéri le suit. Bartimée passe de croyant à disciple, qui suit. Croire n’est pas encore suivre. Tant que je ne conforme pas ma vie à la suite de Jésus, je ne suis pas encore disciple.

A la fin de sa guérison il suit Jésus, comme la foule au début : cette inclusion est une manière de dire qu’avant il ne voyait pas pourquoi suivre Jésus, mais que maintenant ses yeux se sont ouverts. Cette suite de Jésus est celle de l’apôtre qui accepte de voir jusqu’où Jésus va : Jérusalem et la croix. Pour être missionnaire de Jésus il faut voir cela, sinon ce n’est pas lui qui est annoncé ! C’est peut-être ici une réponse à l’attitude des deux fils de Zébédée (qui sont comme deux aveugles) qui voulaient se passer de la croix !

Sr Bénédicte (beneyou@yahoo.fr)

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