Évangile du Vendredi 30 septembre 2022 – 26e semaine du temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)
« Celui qui me rejette rejette celui qui m’a envoyé » Lc 10, 13-16
En ce temps-là, Jésus disait : « Malheureuse es-tu, Corazine ! Malheureuse es-tu, Bethsaïde ! Car, si les miracles qui ont eu lieu chez vous avaient eu lieu à Tyr et à Sidon, il y a longtemps que leurs habitants auraient fait pénitence, avec le sac et la cendre. D’ailleurs, Tyr et Sidon seront mieux traitées que vous lors du Jugement. Et toi, Capharnaüm, seras-tu élevée jusqu’au ciel ? Non, jusqu’au séjour des morts tu descendras !
Celui qui vous écoute m’écoute ; celui qui vous rejette me rejette ; et celui qui me rejette rejette celui qui m’a envoyé. »
Méditation
Dans cet extrait évangélique de Luc, il me semble que Jésus annonce l’expérience d’échec à laquelle les missionnaires risquent de faire face. « Celui qui vous écoute m’écoute ; celui qui vous rejette me rejette »; comme s’Il prévenait Ses disciples qu’ils seront rejetés!
À maintes reprises, les évangiles nous rapportent que Jésus soulève le refus de conversion des personnes et des peuples, l’aveuglement et l’indifférence face à la Grâce. Il Lui est extrêmement douloureux de voir le détournement des hommes de la Lumière qui s’était levée dans leurs ténèbres (Mt 4,16). D’ailleurs, et comme Il l’a souvent prédit, Jésus connaitra lui-même cet échec jusqu’à la Croix. Nous comprendrons bien alors que tout envoyé.e, consacré.e ou missionnaire devra se convertir, comme Jésus, à l’échec et à la Croix pour que triomphe l’Amour, car « un serviteur n’est pas plus grand que son maître, ni un envoyé plus grand que celui qui l’envoie » (Jn 13,16).
La tragédie de Corazine, de Bethsaïde et de Capharnaüm ne représente-t-elle pas également la nôtre à certains moments de notre vie? Ou celle de nos communautés devenues malheureusement sourdes, aveugles et insouciantes face à la foi?
Aimer Jésus et Le faire aimer, Le suivre et proclamer Sa Parole de Vie est un chemin laborieux voire périlleux. Nous risquons fort le découragement face à une société pour qui, Dieu lui est devenu inutile.
Les risques de faire ombrage à la Parole sont multiples, parfois ils viennent des auditeurs, parfois de chacun.e de nous et parfois du messager lui-même. Avant même de pointer du doigt la lourdeur de la résistance de nos sociétés à la conversion, ou bien encore les déficiences de notre Église messagère, jetons d’abord un regard de vérité sur nos propres impuissances et incrédulités. Que de fois, avons nous-mêmes, intercepté la Parole de Jésus et empêché Son écho en nous et en l’autre; que de fois, avons-nous fait attendre Jésus à la porte de notre cœur, alors qu’Il est venu nous offrir Sa grâce. Nous sommes invités à se questionner sur ce que nous mettons à la première place dans notre quotidien et au Nom de Qui nous signons notre vie.
Comme les habitants de ces trois villes qui n’ont pas su se convertir, quoique privilégiées par Jésus, nous nous arrêtons souvent sur la défaillance des messagers et nous nous hâtons de les condamner par un regard extérieur qui n’entrevoit que leur trahison. Nous ne savons plus reconnaitre qu’au plus profond de chacun.e, Dieu a ensemencé une graine de sainteté, même si sa terre de surface est rocailleuse ou asséchée.
Dans cette page évangélique au ton un peu dur et décourageant, se profile l’admirable mystère de notre liberté, que Jésus même a dû affronter. Aucun miracle, aucun prodige ne forcera jamais l’adhésion au Christ, seule notre liberté intérieure peut donner des ailes au désir de notre cœur et peut ouvrir les yeux de notre âme afin qu’elle puisse embrasser la révélation du Salut à travers Jésus ; quelle est grande notre dignité devant Dieu!
Alors, quel choix faisons-nous au quotidien? Choisissons-nous de rester dans une bulle confortable, imperméable à l’A(a)utre ? ou choisissons-nous le risque de la Foi et de l’Espérance?
Ne perdons point notre énergie et notre temps à s’appesantir sur nos échecs, choisissons l’Espérance qui se renouvelle à chaque lever de soleil, qui pointe derrière les gros nuages gris de nos déroutes et orientons notre regard vers la Cité du ciel à laquelle nous appartenons.
Osons l’audace de la Cananéenne (Mt 15,22-28), courons comme Zachée, sans hésitation, vers l’endroit où passe Jésus (Lc 19,2-9), tendons-Lui, avec confiance, notre main desséchée (Lc 6, 6-10), disons-Lui avec la foi des aveugles : « Oui Seigneur, je crois que Tu peux nous guérir » (Mt 9,27-31).
Marchons paisiblement sur le chemin de l’humilité et de la pauvreté, nos petits pas bien frêles nous conduiront au cœur de Son Amour où résident la véritable richesse et l’inaltérable Joie.
Gardons toujours une brèche ouverte à l’Esprit même lorsque notre désir de voir la Parole fleurir dans les cœurs n’est pas rassasié, l’Œuvre n’est pas la nôtre mais bien la Sienne. Je cite cette merveilleuse expression de Thérèse de Lisieux : « Il nous faut se convertir à l’Infini du désir dans la totale impuissance ».
Ne laissons pas l’accablement nous gagner lorsque nos voix de porte-Parole ne touchent pas les Corazines et Bethsaïdes de notre monde, ne nous laissons pas ébranler par l’amertume lorsqu’ils nous rejettent et nous accusent cruellement. Rappelons-nous que Jésus a été repoussé avant nous, les Saints aussi ont dû subir les mêmes rejets, parfois par leurs propres familles jusqu’au profond dépouillement. Dieu compte sur chacun.e de nous pour être une semence de Son Royaume, la semence ne donnera fruit que si elle meurt à elle-même, enfouie dans la terre profonde.
Croyons au trésor de la Parole, croyons à l’Esprit-Saint qui laboure discrètement les cœurs pour accueillir l’Amour du Père. Nourrissons-nous de Sa Parole jusqu’à devenir nous-mêmes Parole Vivante, afin que celui et celle qui nous écoute, L’écoute.
Gladys EL Helou (gladyshelou@gmail.com)
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