Méditation : Au bout de l’humain (No 165)

Évangile du Jeudi 24 mars 2022 – 3e semaine de Carême (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions

« Celui qui n’est pas avec moi est contre moi » Lc 11, 14-23

En ce temps-là, Jésus expulsait un démon qui rendait un homme muet. Lorsque le démon fut sorti, le muet se mit à parler, et les foules furent dans l’admiration. Mais certains d’entre eux dirent : « C’est par Béelzéboul, le chef des démons, qu’il expulse les démons. » D’autres, pour le mettre à l’épreuve, cherchaient à obtenir de lui un signe venant du ciel. Jésus, connaissant leurs pensées, leur dit : « Tout royaume divisé contre lui-même devient désert, ses maisons s’écroulent les unes sur les autres. Si Satan, lui aussi, est divisé contre lui-même, comment son royaume tiendra-t-il ? Vous dites en effet que c’est par Béelzéboul que j’expulse les démons. Mais si c’est par Béelzéboul que moi, je les expulse, vos disciples, par qui les expulsent-ils ? Dès lors, ils seront eux-mêmes vos juges. En revanche, si c’est par le doigt de Dieu que j’expulse les démons, c’est donc que le règne de Dieu est venu jusqu’à vous. Quand l’homme fort, et bien armé, garde son palais, tout ce qui lui appartient est en sécurité. Mais si un plus fort survient et triomphe de lui, il lui enlève son armement, auquel il se fiait, et il distribue tout ce dont il l’a dépouillé. Celui qui n’est pas avec moi est contre moi ; celui qui ne rassemble pas avec moi disperse. »

Méditation

Jésus nous met devant le mystère du mal tout autant que devant celui de la puissance de l’Amour de Dieu. Le royaume du mal et le Royaume de l’Amour se livrent combat autour de nous mais surtout en nous. Notre cœur est en tension permanente entre l’Amour et la haine, entre le oui et le non, il se dit et se contredit. C’est ce que Saint Paul a si bien exprimé : « Je ne fais pas le bien que je voudrais, mais je commets le mal que je ne voudrais pas » (Rm7,19)

« En revanche, si c’est par le doigt de Dieu que j’expulse les démons, c’est donc que le règne de Dieu est venu jusqu’à vous ». L’Esprit de Dieu, Sa Parole et Sa Lumière sont venus jusqu’à nous pour nous libérer, car Dieu souffre du mal qui nous atteint, souffre de nous voir mourir. Sa Volonté éternelle est que nous ayons la Vie; nous sommes Ses enfants bien-aimés, Son sanctuaire, Son temple sacré, Il nous a gravé sur la paume de Sa main.

L’homme adhère d’une manière effrayante à un univers qui piétine toute sa dignité et ses valeurs humaines, il est associé à un monde qui s’acharne à l’écraser et à détruire sa grandeur et sa liberté.  

Si le Père veille sur nous, s’Il a érigé en nous Son Royaume, Il nous rappelle qu’il est de notre responsabilité de Le protéger et d’en prendre soin. Les voleurs et les bandits peuvent s’y glisser pour voler, égorger et faire périr (Jn10, 10). Le mal cherchera toujours à s’y infiltrer et profitera de la moindre baisse de garde de notre part. Il ne suffit guère, et nous le savons bien dans nos expériences au quotidien, d’entendre et de se réjouir une fois pour toute de la bonne nouvelle. La maison intérieure balayée et rangée favorise le retour du démon si elle n’est pas continuellement gardée et renforcée. « C’est pour que nous soyons libres que le Christ nous a libérés. Alors tenez bon, ne vous mettez pas de nouveau sous le joug de l’esclavage » (Ga 5,1).

Dans nos sociétés modernes, on insiste beaucoup sur l’importance de la santé physique et mentale, la bonne alimentation, l’exercice physique, les loisirs, la diminution du stress…, afin d’éviter et ou de bien combattre les maladies. Tout cela est très bon mais qu’en est-il de notre santé spirituelle ? Que faisons-nous pour tenir bon contre nos démons, pour éviter que notre terre sacrée ne soit ravagée par toutes sortes de vices et de maladies ? Les blessures et les maladies spirituelles, bien que moins visibles que celles physiques et psychologiques, nous dévorent de l’intérieur puisqu’elles atteignent notre identité profonde.

« Notre monde souffre d’un manque chronique de conscience de notre nature profonde » (Zundel). Nous avons perdu la connaissance qu’un Être divin nous habite, nous sommes tellement accaparés par tout ce qui est extérieur à nous que nous n’avons plus accès à notre être profond, nous ne savons plus entrer dans cette relation fondamentale avec nous-même et avec Dieu, ce qui fait que nous sommes devenus de moins en moins équipés pour faire face au mal.

« Celui qui n’est pas avec moi est contre moi ». La présence de Dieu menace l’existence même du mal mais lorsque le Maître est absent, loin, Son Royaume en nous est en péril, il devient la cible des voleurs qui le dépouillent et il devient un repaire de démons et de serpents (Is 34,14-15).

Ne nous décourageons pas du combat qui nous habite, ne perdons guère l’espérance car, au bout de l’humain et dans toute sa nudité, il n’y a pas de place au mal, au bout de l’humain il y a l’Amour, il y a l’incarnation de Dieu en nous, il y a Son projet pour nous de devenir semblables à Lui. Au bout de l’humain se trouve cet espace de fécondité, là où la nature divine s’ouvre et se déverse en nous.

« Ne savez-vous pas que vous êtes un sanctuaire de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous? » (1 Co 3,16). Protégeons ce sanctuaire, gardons bien notre terre sacrée, afin qu’un plus fort ne vienne le dépouiller, maintenons une garde continue à la porte de notre cœur afin d’enrayer le mal qui veut triompher de lui.

Pour se maintenir en état de bonne santé spirituelle, en bonne tenue de combat quand surgit ce plus fort, il nous faut s’abreuver continuellement à la Parole et rester unis à la source de Vie en nous. La prière est l’unique chemin et la voie royale pour s’unir au cœur de Dieu. Elle nous apprend l’écoute du Fils en nous, elle nous donne la grâce de reconnaitre les signes de Sa Présence et de nous immerger dans Sa Lumière; toute lumière si faible soit elle, repousse l’opacité des ténèbres.

La prière commence avec nous en ce monde que l’on peut situer dans le temps et l’espace, cependant elle nous fait naitre à l’être nouveau que nous sommes, un être qui n’est plus fini, puisqu’il participe à la nature divine éternelle. Cette naissance se perpétuera dans une continuité qui ne prendra fin qu’à l’heure de notre naissance éternelle en Lui.

Avec la prière, allons jusqu’au bout de l’humain, jusqu’au bout de l’A(a)mour alors seulement le mal n’aura aucune emprise sur nous, la paix, la joie et la Vie ne se perdront jamais en nous.

Gladys El Helou

DROIT D’AUTEUR

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