Méditation : L’irrésistible (No 115 – série 2022-2023)

Image par Ria Sopala de Pixabay

Évangile du Mercredi 11 janvier 2023 – 1re semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Il guérit beaucoup de gens atteints de toutes sortes de maladies » Mc 1, 29-29

En ce temps-là, aussitôt sortis de la synagogue de Capharnaüm, Jésus et ses disciples allèrent, avec Jacques et Jean, dans la maison de Simon et d’André. Or, la belle-mère de Simon était au lit, elle avait de la fièvre. Aussitôt, on parla à Jésus de la malade. Jésus s’approcha, la saisit par la main et la fit lever. La fièvre la quitta, et elle les servait.
Le soir venu, après le coucher du soleil, on lui amenait tous ceux qui étaient atteints d’un mal ou possédés par des démons. La ville entière se pressait à la porte. Il guérit beaucoup de gens atteints de toutes sortes de maladies, et il expulsa beaucoup de démons ; il empêchait les démons de parler, parce qu’ils savaient, eux, qui il était.
Le lendemain, Jésus se leva, bien avant l’aube. Il sortit et se rendit dans un endroit désert, et là il priait. Simon et ceux qui étaient avec lui partirent à sa recherche. Ils le trouvent et lui disent : « Tout le monde te cherche. » Jésus leur dit : « Allons ailleurs, dans les villages voisins, afin que là aussi je proclame l’Évangile ; car c’est pour cela que je suis sorti. »
Et il parcourut toute la Galilée, proclamant l’Évangile dans leurs synagogues, et expulsant les démons.

Méditation

À quelle vie, la parole reçue nous appelle-t-elle ? Les maladies, infirmités et possessions étaient tissées à même la réalité de l’Antiquité. De ce riche univers spirituellement chargé à notre désert d’incroyance occidentale, comment accueillir ces récits d’exorcisme ? Ni bibliste ni exégète, je m’aventure entre les lignes de ces versets, de cette Parole de vie qui est creuset. Là où fondent et se fondent l’existence nouée de nos expériences, de la confiance et cette parole mâchée.

Dans la synagogue puis à la maison de Simon-Pierre, Jésus délivrera plusieurs personnes habitées par un esprit impur ou souffle contaminé. Une première lecture fait le constat que la possession est ce qui parle à la place de, à la place du Je comme à la place de ce qui est pur en soi, le site de l’immaculé. La possession reconnaît immédiatement la Parole sainte, la Parole de vie. Mieux, elle lui obéit, l’autorité et l’irrésistibilité de la Parole de Jésus chassent le souffle impur. Elle ne le convertit pas, ne négocie pas, n’argumente pas. Elle est voie qui redonne la parole, elle est voix qui redonne la place. Elle est parole qui fait naître l’être à travers la confusion, à travers l’imposture.

Dans la perspective anthropologique, la possession entretient le faux système de salut, ce qui nous possède quand nous ne sommes pas nous-mêmes. Ce que nous possédons pour être autre et se sauver soi-même. La possession parle, nargue, harangue, elle ne laisse aucune place au Je premier, à la profondeur de son identité encore moins à sa filiation. Au fond, c’est la stérilité qui parle à ma place, je peux le constater à ses effets. Un vrai souffle contaminé, toxique, qui réduit ma pensée, me replie sur ma suffisance, appauvrit mes relations, amenuise mon espérance. C’est la stérilité qui occupe toute la place comme un recensement de nos souffrances, comme un 25 décembre à Bethléem. Pas de place!

Et pourtant, la Parole qui sauve est née dans la saleté d’une étable, près du crottin, dans le froid et sans soins. Irrésistible, la Parole féconde à même l’accueil le plus simple, l’ouverture infime. La souillure reconnaît la sainteté, cette autorité, elle l’a déjà connue quand elle a contaminé la terre sacrée et son souffle. La possession s’étiole quand le Christ parle, elle se dépouille lorsque touchée par le Christ.

Son agonie est comme un 25 décembre en nos vies. Tout au fond de la mangeoire, la nudité s’amourache de notre âme rajeunie qui retrouve la joie de veiller sur notre oui. Le souffle impur sera chassé. Peut-être ne peut-il supporter l’éclat de la vérité qui naît en soi, sans voix devant la parole unique que nous sommes et qui germe dans l’unique parole qu’est le Christ ? Une parole reçue, purifiante, agissante comme une liberté libérée. Une parole irrésistible et d’autorité comme un appel à vivre une abondance dépossédée. Comme le cri d’un Dieu enfant naissant au cœur de notre propre humilité.

Barbara Martel (bmartel@lepelerin.org)

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