Méditation : La joie du Père court le monde (No 113 – série 2022-2023)

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Évangile du Lundi 9 janvier 2023 – Le Baptême du Seigneur (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Dès que Jésus fut baptisé, il vit l’Esprit de Dieu venir sur lui » Mt 3, 13-17

Alors paraît Jésus. Il était venu de Galilée jusqu’au Jourdain auprès de Jean, pour être baptisé par lui. Jean voulait l’en empêcher et disait : « C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens à moi ! » Mais Jésus lui répondit : « Laisse faire pour le moment, car il convient que nous accomplissions ainsi toute justice. » Alors Jean le laisse faire.
Dès que Jésus fut baptisé, il remonta de l’eau, et voici que les cieux s’ouvrirent : il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. Et des cieux, une voix disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie. »

Méditation

Jésus est là… sur le bord du Jourdain…  Il se présente à Jean le baptiste pour un baptême. Descendant dans l’eau, Jésus s’assimile aux pécheurs, ces pénitents qui initient une conversion. Jean le baptiste hésite : « C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens à moi ! » Lui, ce prophète, sensible au péché du monde, reconnaît qu’il a besoin du baptême que donne Jésus. Lui qui se sait pécheur, peut-il baptiser Jésus et l’inviter à la conversion ? N’est-ce pas mettre le monde à l’envers ? Un instant, Jean recule devant l’idée de baptiser « l’agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,29).

Mais, c’est Jésus lui-même qui insiste pour que « toute justice » soit accomplie : « il convient que nous accomplissions ainsi toute justice. » La justice ne se définit pas dans un règlement dont un Dieu chicaneur viendrait imposer le respect. Ce n’est pas le règlement d’un compte. La justice est l’ajustement à l’amour de Dieu, c’est le cœur humain qui bat à l’unisson du cœur de Dieu. Mais, où existe-t-elle cette justice ? Dans quel cœur, cet unisson délivre-t-il son harmonie divine ?

La Bible qui donne le récit de l’alliance de Dieu avec son peuple ne cesse de dire également les manquements à cette alliance et les renouvellements incessants du Dieu « lent à la colère et plein d’amour » (Ex 34). Moïse, les tables de l’alliance à la main, n’est pas descendu de la montagne de la rencontre avec Dieu que déjà le peuple danse autour d’une idole. Dans sa colère, Moïse brise les tables de la loi (Ex 32,19). Que de malentendus entre Dieu et son peuple ! L’alliance avec les hommes est l’histoire d’une alliance rompue, brisée, fracassée. Pour que la justice soit accomplie, il faut que cette justice que Dieu offre aux hommes s’accomplisse dans une vie en alliance qui remonte de l’homme vers Dieu. Aucun cœur humain ne vibre des harmonies célestes. Chacun est occupé par ses intérêts à courtes vues. Le regard humain ne s’élève vers le ciel que pour se recourber sur lui-même… et l’homme, entraîné par le poids de son péché, retombe la face contre terre.

On comprend que Jean Baptiste tremble devant Jésus qui avance pour le baptême. Comment serait-il digne de cette démarche face à Jésus ? En effet, Jésus, c’est l’alliance enfin vécue. Le fils de Marie et de Joseph est le Fils de Dieu. En Jésus, c’est l’homme et c’est Dieu dans leur unité. C’est le Ciel et la terre attachés par un lien irréfragable.  

Jésus demande à Jean d’obéir au « moment » qui se présente : « Laisse faire pour le moment ». Jean obéit, il « laisse faire », il permet à Dieu d’accomplir Son œuvre de salut. Car, ce « moment » est celui de la remontée vers Dieu de toute l’humanité en Jésus. La grande heure de Jésus qui s’accomplira sur la croix n’est pas encore venue. Cette heure fondra le baptême chrétien sur le pardon des péchés, le renouveau de notre filiation divine, le temps sera imbibé enfin d’éternité. Ce « moment » dans le Jourdain montre que Jésus est venu pour se mouiller à l’eau de nos péchés et s’unir à nos timides désirs de conversion. Bien-sûr, Jésus sait que cette ablution n’est qu’un rite qu’Il devra remplir. Il sait que la pénitence des hommes n’est qu’un balbutiement imparfait qu’Il devra conduire à sa perfection. Il sait que les hommes ballottent au gré de l’indécision et des tentations… Il sait que cette conversion, Il lui faudra la vivre, sur la croix, jusqu’au retournement complet de l’existence humaine vers Dieu.

Alors, en Jésus, la distance qui séparait les hommes de Dieu change de nature. Cet abîme qu’aucun homme ne pouvait franchir est comblé. Cette distance devient, en Jésus, l’occasion d’une rencontre. La distance qui, dans la Trinité, permet la circulation d’amour entre les personnes divines et leur unique communion, cette distance se rend visible, sensible à tous. Le Dieu unique en trois Personnes s’engage : Jésus « vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. » Le Père, l’Esprit et le Fils se parlent dans une langue connue des hommes. Ils englobent les hommes dans leur amour. Désormais, tous savent que le monde n’est pas une chose extérieure à Dieu, une chose irrémédiablement séparée. Tous découvrent que le monde des hommes est contenu en Dieu. Que dit cette voix qui retentit du ciel ? Elle proclame que la Trinité embrasse l’univers ! La circulation d’amour de la Trinité irrigue le monde de vaisseaux sanguins où pulse la grâce : désormais aucun homme n’est éloigné du Dieu qui s’est fait proche. La vie du pécheur n’est séparée de Dieu que par l’épaisseur d’une conversion. Une Parole éclate qui rend possible cette remontée : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui je trouve ma joie. » La joie du Père est dans l’eau avec les pécheurs, elle remonte sur la rive et se manifeste aux hommes comme Parole sur nos chemins caillouteux. La joie du Père court le monde. Par notre baptême, nous sommes véritablement enfants de Dieu. Notre nom est inclus dans le Nom de Dieu. Nous pouvons donc faire nôtre ce verset en ajoutant à cette parole du Père notre prénom reçu au baptême : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui je trouve ma joie. »

Vincent REIFFSTECK,  vincent.reiffsteck@wanadoo.fr

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