No 205 – série 2024-2025
Évangile du mardi 15 avril – Mardi Saint
Tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions
« L’un de vous me livrera… Le coq ne chantera pas avant que tu m’aies renié trois fois » (Jn 13, 21-33.36-38)
En ce temps-là, au cours du repas que Jésus prenait avec ses disciples, il fut bouleversé en son esprit, et il rendit ce témoignage : « Amen, amen, je vous le dis : l’un de vous me livrera. » Les disciples se regardaient les uns les autres avec embarras, ne sachant pas de qui Jésus parlait. Il y avait à table, appuyé contre Jésus, l’un de ses disciples, celui que Jésus aimait. Simon-Pierre lui fait signe de demander à Jésus de qui il veut parler. Le disciple se penche donc sur la poitrine de Jésus et lui dit : « Seigneur, qui est-ce ? » Jésus lui répond : « C’est celui à qui je donnerai la bouchée que je vais tremper dans le plat. » Il trempe la bouchée, et la donne à Judas, fils de Simon l’Iscariote. Et, quand Judas eut pris la bouchée, Satan entra en lui. Jésus lui dit alors : « Ce que tu fais, fais-le vite. » Mais aucun des convives ne comprit pourquoi il lui avait dit cela. Comme Judas tenait la bourse commune, certains pensèrent que Jésus voulait lui dire d’acheter ce qu’il fallait pour la fête, ou de donner quelque chose aux pauvres. Judas prit donc la bouchée, et sortit aussitôt. Or il faisait nuit.
Quand il fut sorti, Jésus déclara : « Maintenant le Fils de l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui. Si Dieu est glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera ; et il le glorifiera bientôt.
Petits enfants, c’est pour peu de temps encore que je suis avec vous. Vous me chercherez, et, comme je l’ai dit aux Juifs : “Là où je vais, vous ne pouvez pas aller”, je vous le dis maintenant à vous aussi. » Simon-Pierre lui dit : « Seigneur, où vas-tu ? » Jésus lui répondit : « Là où je vais, tu ne peux pas me suivre maintenant ; tu me suivras plus tard. » Pierre lui dit : « Seigneur, pourquoi ne puis-je pas te suivre à présent ? Je donnerai ma vie pour toi ! » Jésus réplique : « Tu donneras ta vie pour moi ? Amen, amen, je te le dis : le coq ne chantera pas avant que tu m’aies renié trois fois. »
Méditation – Mon Dieu, je ne vous aime pas
« Mon Dieu, je ne vous aime pas » (1)
Mon Dieu, moi aussi je Vous ai trahi.
Cet élan de vie qui jaillit en moi…
ce chant limpide comme l’hirondelle rustique qui surgit au printemps…
cet élan de vie qui parle de Vous…
cette clarté qui Vous dit, je l’ai trahie.
Détresse, désespoir et honte collent à moi
comme une boue aux chaussures qui ont traversé un champ après la pluie.
Mes sœurs d’âme sont restées blotties contre moi.
En me serrant, elles m’ont refroidi.
Je ne savais même pas que j’abritais, en moi, ce qui sombre.
C’est qu’il faut un peu de lumière pour repérer sa part d’ombre.
Pourtant, mon Dieu, Vous me le dites clairement :
« Amen, amen, je vous le dis : l’un de vous me livrera. »
Vous m’avertissez pour que je me rejoigne enfin.
Mais, je n’ai pas compris que Vous parliez de moi.
En entendant ces mots, je me suis demandé comme Pierre « de qui il veut parler ».
Face à moi, j’étais face à un inconnu.
Me regardant, je ne voyais que du vide.
Me regardant je disais : « Seigneur, qui est-ce ? »
Pourtant, mon Dieu, Vous ne m’avez pas condamné.
Votre lumière ne m’a pas rejeté.
Mon obscurité ne venait pas de Vous.
Au contraire, Votre amour s’est rapproché de moi.
Votre amour s’est penché vers moi pour tendre une bouchée à mon âme affamée.
Vous m’avez nourri d’une bouchée trempée dans le plat commun de Votre amour.
Vous m’avez lavé les pieds pour en nettoyer la boue.
Mais, moi, j’étais ailleurs, perdu dans ma manière de me sauver,
dans ma manière de me perdre.
Ma misère, rétrécie par l’angoisse, me collait si bien à la peau.
Vous ne me sauvez pas comme je veux.
Moi aussi, je Vous trahis pour vous envoyer au tribunal pour que Vous rendiez des comptes.
Vous ne me sauvez pas comme je veux.
Car, c’est trop injuste, c’est trop dur.
Après tout, il faut bien que la Parole dise quelque chose pour Se défendre !
Mon Dieu, pourquoi m’avez-Vous abandonné ?
Pourquoi dans ce champ inondé de pluies, suis-je resté collé à la boue ?
Dans ma vengeance, Vous déposez à côté de mon angoisse une Parole :
« Ce que tu fais, fais-le vite. »
Vous me disiez : « Je suis ».
Je suis avec toi, même dans ta colère.
Dans ce champ boueux, Vous venez à ma recherche.
Vous me serrez en disant : « Où es-tu ? » (Gn 3,9)
Que vais-je Vous répondre, mon Dieu ?
Je n’ai rien à donner.
Le vinaigre de mon angoisse… est-ce une boisson ?
Mais, Vous me le dites : « J’ai soif ! » (Jn 19,28)
Il fait nuit dans mon âme.
Je n’ai rien à donner.
Des questions se cognent contre mon âme comme des oiseaux pris au piège.
Mais, je sais que pour moi aussi, comme à Pierre, Vous faites chanter le coq.
Ce coq de ferme qui, les pattes dans ma boue, chante en levant le cou.
Vous m’avertissez. Vous m’éclairez.
Seigneur, je me rends à Votre amour.
Trois fois, je Vous trahis.
Trois fois, chante en mon âme ce qui réveille.
Seigneur, je me rends à Votre amour.
Je Vous donne mon angoisse acide,
Et de Votre coeur, Vous me donnerez une eau vive (Jn 19,34).
Vincent REIFFSTECK – vincent.reiffsteck@wanadoo.fr
Note :
(1) « Mon Dieu, je ne vous aime pas… », prière de la poétesse Marie Noël (1883-1967), extraite de « Notes intimes prière d’un pauvre ». La cause de béatification de Marie Noël a été officiellement ouverte le 23 décembre 2017.

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