No 93 – série 2024-2025
Évangile du mardi 10 décembre – 2ème Semaine de l’Avent
Tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions
« Dieu ne veut pas qu’un seul de ces petits soit perdu » (Mt 18, 12-14)
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Quel est votre avis ? Si un homme possède cent brebis et que l’une d’entre elles s’égare, ne va-t-il pas laisser les 99 autres dans la montagne pour partir à la recherche de la brebis égarée ? Et, s’il arrive à la retrouver, amen, je vous le dis : il se réjouit pour elle plus que pour les 99 qui ne se sont pas égarées. Ainsi, votre Père qui est aux cieux ne veut pas qu’un seul de ces petits soit perdu. »
Veuillez noter que l’équipe des méditations prendra une pause pour le temps des fêtes. La dernière méditation de 2024 sera pour le dimanche 22 décembre et nous serons de retour le lundi 6 janvier 2025. Nous vous remercions de nous avoir lu et avons hâte de vous retrouver en janvier ! Joyeux Noël et que Dieu vous accompagne ! Alice (celle qui prête sa voix aux méditations), Barbara, Dany, Halyna, Laurence, Marie-Emmanuel, Martial, Michel, Paolo, Stéfan et Vincent.
Méditation – Au rendez-vous, quand on se manque, on se manque à deux
Nous avançons vers Noël à grands pas. Sentons-nous l’impatience de Dieu ?
Dans les Exercices spirituels, Saint Ignace nous met face au mystère de l’Incarnation. Il imagine une mise en scène pour se représenter le mystère de la présence de Dieu parmi les hommes. Les trois personnes de la Trinité regardent les hommes : « Les trois Personnes divines, contemplant la surface de la terre couverte d’hommes » (§102) sont saisies devant la détresse des hommes qui vivent en ignorance de l’amour divin. Les hommes ne considèrent pas Dieu. « Les hommes qui sont sur la terre si divers de costumes et de visage : les uns blancs, les autres noirs ; les uns en paix, les autres en guerre ; les uns pleurant, les autres riant ; les uns sains, les autres malades ; les uns naissant et les autres mourant » (§106) ; les « hommes qui sont sur la terre ; ils s’attaquent, ils s’entretuent, ils tombent dans les enfers » (§108) tous ces hommes, au lieu d’être amour les uns pour les autres, tous ces hommes se perdent dans les enfers qu’ils se créent les uns pour les autres. Alors, les personnes de la Trinité se parlent, elles prennent une décision : « opérons la rédemption du genre humain » (§107). Sous une forme imagée, Saint Ignace met en récit, le grand mystère de l’Incarnation.
Depuis la Création, Dieu est entré dans l’équipe de l’homme, Il a revêtu le même maillot pour jouer sur le même terrain. Avant le premier jour, l’Esprit planait déjà sur les eaux (Gn 1,2). Dans ce monde, rien n’est étranger à Dieu : « Rien de ce qui fut, ne fut sans lui » (Jn 1,3). Dieu était partout chez lui en parcourant le domaine des hommes. Pourtant, ceux de son équipe ne l’ont pas reconnu : « Il est venu dans son propre bien et les siens ne l’ont pas accueilli » (Jn 1,11).
L’amour éternel de Dieu se traduit, dans notre temps et nos manières humaines, par un amour qui va jusqu’au bout. L’amour de Dieu est « élastique », car plus l’homme s’éloigne et plus Dieu avance pour le rejoindre. Jésus au dernier repas exprima en geste humain cet amour inlassable : « Avant la fête de la Pâques, Jésus sachant que son heure était venue, l’heure de passer de ce monde au Père, lui, qui avait aimé les siens qui sont dans le monde, les aima jusqu’à l’extrême. » (Jn 13,1).
L’amour divin ne se résout pas à la rupture d’Alliance. C’est la logique de l’amour infini que d’aimer infiniment. C’est la loi de l’amour divin que de Se livrer pieds et poings liés à celui qu’Il aime. Le poète Charles Péguy dévoile ce mystère de l’amour divin :
« Celui qui aime tombe dans la servitude de celui qui est aimé.
C’est l’habitude, c’est la loi commune.
C’est fatal.
Celui qui aime tombe, se met sous la servitude, sous un joug de servitude.
Il dépend de celui qu’il aime.
C’est pourtant cette situation-là, mon enfant, que Dieu s’est faite, en nous aimant. » (1)
Le théologien Urs von Balthasar reprend les mots de Péguy pour méditer la parabole de la recherche de l’homme par Dieu : « Celui qui aime entre dans la dépendance de celui qui est aimé… Ainsi Dieu lui-même entre dans la dépendance de celui qu’il veut gagner. Quand le bon pasteur part à la recherche de la brebis égarée, il entre dans la dépendance de la brebis égarée… La faute de l’homme fait manquer Dieu lui-même. Quand l’homme manque Dieu, Dieu manque l’homme. Quand on se manque, on se manque à deux » (2)
Et pourtant, même pour Dieu, surtout pour Dieu, il y a une limite. Il y a une limite frêle comme une coquille d’oeuf, il y a une limite fragile comme une aile de papillon. Dans sa toute-puissance, il y a une limite que Dieu respecte : Dieu ne peut froisser la liberté de l’homme. « Si l’homme refuse Dieu, le Sauveur, le bon pasteur se trouve dans une impasse, car les brebis sont toujours libres de le suivre ou non. Le juste n’est sauvé qu’avec peine (1P 4,18) car il y aura toujours quelque part une insuffisance et un refus » (3)
L’insistance d’un Dieu qui ne se résigne pas et la délicate toute-puissante de l’amour se retrouvent dans un signe. Le signe d’un enfant aux portes de notre cœur : « Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur. Et voici le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. » (Lc 2, 11-12). En étant couché par Marie dans la mangeoire qui lui sert de berceau sur notre terre, Dieu est déposé dans nos vies.
Vincent REIFFSTECK – vincent.reiffsteck@wanadoo.fr
Notes :
(1) Charles Péguy, Le Porche du Mystère de la deuxième vertu, (p.141).
(2) von Balthasar, La gloire et la croix, II, 2, (p. 333).
(3) von Balthasar, Dramatique, IV, (p.264).
DROIT D’AUTEUR
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