No 21 – série 2024-2025
Évangile du Dimanche 29 septembre – 26e dimanche du Temps ordinaire
Tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions
« Celui qui n’est pas contre nous est pour nous. Si ta main est pour toi une occasion de chute, coupe-la » Mc 9, 38-43.45.47-48
En ce temps-là, Jean, l’un des Douze, disait à Jésus : « Maître, nous avons vu quelqu’un expulser les démons en ton nom ; nous l’en avons empêché, car il n’est pas de ceux qui nous suivent. » Jésus répondit : « Ne l’en empêchez pas, car celui qui fait un miracle en mon nom ne peut pas, aussitôt après, mal parler de moi ; celui qui n’est pas contre nous est pour nous. Et celui qui vous donnera un verre d’eau au nom de votre appartenance au Christ, amen, je vous le dis, il ne restera pas sans récompense.
Celui qui est un scandale, une occasion de chute, pour un seul de ces petits qui croient en moi, mieux vaudrait pour lui qu’on lui attache au cou une de ces meules que tournent les ânes, et qu’on le jette à la mer. Et si ta main est pour toi une occasion de chute, coupe-la. Mieux vaut pour toi entrer manchot dans la vie éternelle que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux mains, là où le feu ne s’éteint pas. Si ton pied est pour toi une occasion de chute, coupe-le. Mieux vaut pour toi entrer estropié dans la vie éternelle que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux pieds. Si ton œil est pour toi une occasion de chute, arrache-le. Mieux vaut pour toi entrer borgne dans le royaume de Dieu que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux yeux, là où le ver ne meurt pas et où le feu ne s’éteint pas. »
Méditation – Le Souffle n’aime pas les bouteilles… si belles soient-elles!
Nous avons payé cher, chacun, chacune d’entre nous, pour que se construisent en nous notre vision de la vie, notre vision de la foi, de la vie spirituelle… notre vision de l’amour. Nous avons investi beaucoup et le fruit de tout ce que nous avons vécu a été l’occasion pour nous de découvrir ce « précieux » qui devient un noyau dur de convictions.
À travers notre vie, à travers nos blessures, à travers ce qu’il nous a été donné de vivre, à travers nos expériences, nos connaissances, tout ce que notre volonté a mis en œuvre, s’est forgé un noyau de convictions qui nous est précieux.
D’une certaine manière, Jean, le bien-aimé, est aussi celui qui, à partir de l’expérience qu’il a vécu avec Jésus pendant ses 3 ans de marche avec lui, Jean, le bien-aimé, est aussi celui qui absolutise ce chemin qui est le sien. Il nous fait découvrir qu’il nous est facile de nous servir de ce noyau dur de convictions qui est en nous, pour en faire un absolu, pour se donner le monopole de la vérité, pour redire que, si cet homme n’appartient pas au groupe des disciples, ça ne peut pas être bon. Au point d’empêcher l’autre de vivre du don qu’il a reçu.
C’est étonnant aussi de voir que Jésus se réjouit, et qu’en même temps, il ne demande pas d’aller chercher cette personne qu’on a empêchée de parler, il ne demande pas que celui-là, qui est lointain, mais fidèle à un Esprit qu’il a reçu, il ne demande pas qu’il se joigne aux disciples. Jésus permet et reconnaît la validité de ce chemin, la validité de l’autre, qui ne vient pas suivre le groupe des disciples, qui ne vient pas le suivre même.
Au fond, nous trouvons là la racine du réflexe du colonisateur qui peut nous habiter, qui veut faire de notre culture l’absolu à imposer aux autres. Ici même, au Québec, nous portons cette blessure profonde d’avoir voulu éradiquer la culture de l’autochtone, d’avoir voulu faire sortir tout ce qui était indien dans l’autochtone, pour lui imposer notre culture, perçue comme l’absolu.
D’une manière plus subtile, les algorithmes qui nous manipulent à notre insu, saisissent, à travers les pages que nous consultons, nos préférences, nos intérêts, nos convictions. Et voilà qu’ils font surgir d’autres pages qui, au fond, nous abonnent au « même », à ce que nous croyons, à ce que nous pensons… favorisant ainsi que se durcissent et se fortifient encore notre manière unique de penser.
Jésus nous rappelle que l’Esprit est sans frontières et, dans la rencontre de l’autre, nous sommes invités à nous laisser déplacer. Une rencontre qui peut se vivre à travers le simple échange d’un verre d’eau, ce qu’il y a de plus quotidien, ce qu’il y a de plus simple… se laisser déplacer.
Et en ce dimanche qui est la journée mondiale du migrant et du réfugié, nous sommes aussi invités à reconnaître la grandeur de tous ces déplacements qui ont été faits, souvent au nom de la vie de leurs enfants pour qui ils désiraient une vie meilleure. Tous ces déplacements qui font en sorte que de nouvelles personnes, de nouveaux arrivants, se joignent à nous au cœur de nos communautés.
Et il n’y a pas que leur déplacement à eux, nous sommes, nous aussi, invités à nous déplacer, pour nous laisser enseigner que l’Esprit déborde la bouteille dans lequel nous l’avons enfermé par la réalité de nos convictions, de nos manières de voir, qui peuvent demeurer figées.
En étant attentif à ce que l’Évangile exprime, je me laissais aussi interpeller : souvent lorsqu’on rencontre quelqu’un, lorsqu’on entre aussi dans cette mission privilégiée de vouloir l’accompagner, souvent, j’ai fait cette expérience de vouloir imposer à l’autre ma manière de voir, mes réponses. À travers ce que l’évangile nous dit, à travers ce que Jésus exprime, c’est comme si, au fond, j’entends ce qui peut nous permettre de demeurer dans le Souffle.
Coupez l’un de nos pieds pour faire en sorte que, même boiteux, nous puissions nous laisser enseigner par le pied, par la marche de l’autre.
Coupez la main qui est la nôtre en se laissant enseigner de quelle manière l’agir surgit dans la personne que nous rencontrons, un agir qui lui aussi est habité par le Souffle de l’Esprit, un Souffle qui ne le conduit pas au même noyau dur de convictions, mais qui est le chemin propre qui lui est donné de vivre.
Entrer aussi dans cette réalité de s’arracher un œil… être capable de laisser le regard de l’autre, sa vision, sa manière de voir, la laisser nous enseigner pour y découvrir le Souffle qui est à l’œuvre.
Si nous n’entrons pas dans cette fragilité d’être conscient que nous sommes borgnes, d’être conscient que nous sommes boiteux, que nous n’avons pas l’absolu de l’agir, nous ne pouvons pas être ouverts à l’Esprit. C’est comme si nous enfermions le Souffle dans la bouteille du noyau dur de convictions qui est le nôtre, et le Souffle… ne souffle plus !
Merci Seigneur d’être celui qui nous invite à faire de la rencontre de l’autre le lieu où nous sommes déplacés, où nous sommes invités à nous mettre à l’écoute de ton Souffle. Continue de nous faire prendre conscience du danger où nous sommes d’absolutiser nos manières de voir. Rends-nous serviteurs du Souffle qui est en l’autre par le Souffle de ton Esprit. Ainsi chacun, chacune, nous serons conduits au Royaume, cet univers sans frontières où ton Amour sait rejoindre chacun pour nous sauver.
Paolo Maheux – maheux.paolo@gmail.com
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