La vie perdue – Méditation du jeudi 26 septembre 2024

No 18 – série 2024-2025

Évangile du Jeudi 26 septembre S. Jean de Brébeuf et Isaac Jogues, prêtres, et leurs compagnons, martyrs

Tiré de l’AELF

« Si le grain de blé meurt, il porte beaucoup de fruit » Jn 12, 24-26

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Amen, amen, je vous le dis : si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit. Qui aime sa vie la perd ; qui s’en détache en ce monde la gardera pour la vie éternelle. Si quelqu’un veut me servir, qu’il me suive ; et là où moi je suis, là aussi sera mon serviteur. Si quelqu’un me sert, mon Père l’honorera. »

Méditation – La vie perdue

Qui aime sa vie la perd… dernièrement, je priais pour un proche qui s’est suicidé, la quarantaine à peine effleurée. Deux jeunes enfants laissés dans le désarroi, des funérailles muées en une célébration insignifiante où seul le père hébété était présent. Il répétait en marmonnant que son fils unique avait perdu la vie alors d’autres chuchotaient qu’il s’était donné la mort. En ces temps tourmentés, la vie se perd et la mort se donne. Avait-il déjà aimé sa vie ? Avait-il déjà été vivant, tirant la vie de la mort quand le temps se faisait plus jeune encore ?

Des épreuves qui assaillent depuis la mort d’une mère ou la maladie qui tournaille avec ses pronostics, est vivant celui ou celle qui donne naissance, est ressuscité.e celui ou celle qui fait de sa vie une continuelle mise au monde. Chaque battement de cœur, chaque minute écoulée doit être incarné par ce que nous sommes en vérité :  le rêve de Dieu pour nous au premier matin où il nous a ouvert les yeux. La main sur l’urne, j’évangélise mon deuil et mes tristesses. Les passages trop étroits de la vie, ceux qui écorchent la chair et embrument l’esprit ne sont pas entraves pour nos marches vers nous-mêmes, ils sont provocations pour éprouver notre puissance de résurrection.

Ma main ne peut se détacher de l’urne, les nervures de son bois m’apparaissent si jeunes, comme étonnées de contenir une vie qui s’est perdue dans la noirceur. Une vie qui a oublié qu’elle a triomphé de la mort, une vie mal aimée ou reniée peut-être, qui s’est vissée dans la désespérance. Celle-là même qui nie le don qui nous est donné de renouveler toute chose, de sortir de nos tombeaux, du non-sens et de nos souffrances. Du don qui nous est donné jusqu’à nous renouveler nous-mêmes, habillés par la grandeur et la beauté, enfant bien-aimé digne d’un Royaume alors que nous ne sommes pas présentables. Engendrer joyeusement l’impossible et l’impensable même teintés de souffrance. Devenir ce rêve de Dieu et d’enfance où ma vie perdue entre ses fausses croyances, ses mesures pleines d’admiration et de mérites sur l’inhumaine balance permettront la naissance de ce Christ porté en moi.

Je contemple ces lys blancs qui rappellent le sublime entêtement et la joie du vivant même devant la cendre et devant ce qui fut réduit. Je me rappelle ses deux enfants qui rient, ô mort où est ta victoire ? (1Co 15.55).

Je sors et souris, comme tout croyant, il y aura toujours un ciel accueillant. Un ciel qui rappelle à celui qui y entre que la Vie qui enveloppe la sienne n’est jamais perdue. Que même s’il meurt, il porte beaucoup de fruit. Contemplant le ciel, il me fait signe, un rappel que déjà vient le temps de la victoire, le temps de ses enfants qui rient.

Barbara Martel – bmartel@lepelerin.org

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