Évangile du Mardi 9 avril – 2e semaine de Pâques (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)
« Nul n’est monté au ciel sinon celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme » Jn 3, 7b-15
En ce temps-là, Jésus disait à Nicodème : « Il vous faut naître d’en haut. Le vent souffle où il veut : tu entends sa voix, mais tu ne sais ni d’où il vient ni où il va. Il en est ainsi pour qui est né du souffle de l’Esprit. » Nicodème reprit : « Comment cela peut-il se faire ? » Jésus lui répondit : « Tu es un maître qui enseigne Israël et tu ne connais pas ces choses-là ? Amen, amen, je te le dis : nous parlons de ce que nous savons, nous témoignons de ce que nous avons vu, et vous ne recevez pas notre témoignage. Si vous ne croyez pas lorsque je vous parle des choses de la terre, comment croirez-vous quand je vous parlerai des choses du ciel ? Car nul n’est monté au ciel sinon celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme. De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle. »
Alors l’ange la quitta.
Méditation
Frères et sœurs dans le Christ, la fête de Pâques est littéralement passée. La montée pascale, subséquente aux 40 jours au désert du Carême, nous a connecté à ces moments de nos vies qui nous font retenir notre souffle dans la traversée de nos « Pâques » mystérieusement associées à celle de Jésus. Il n’est d’ailleurs pas étranger que la « Pâques » porte justement la marque du pluriel. Elle intègre et porte temporellement, depuis l’Exode, l’ensemble de nos passages de la mort à la vie, petits et grands, d’hier à demain. Mais tout cela s’en est allé, le Ressuscité a rejoint le Père. Or, que/qui nous reste-t-il maintenant ? À la fois/la foi, rien n’a changé – Tout est déjà-là accompli dans l’Éternel Présent – et pourtant tout est Hautement et Autrement en changement sur notre continuum d’hier à demain. Nous sommes conviés en ce temps pascal, culminant à la Pentecôte, à nous laisser renouveler au cœur de notre cheminement pour vivre de plus en plus en « ressuscités » que nous sommes… pas encore en plénitude dans le Temps ordinaire de nos vies qui reprendra ci-après son cours. Toutefois, il demeure que « tout recommence en Jésus-Christ » fredonne le cantique. Une impulsion mystérieusement nouvelle est donnée. L’Amour et la Vie sont vainqueurs. Mais, Nicodème, impromptu, surgit là, en nous, dans l’ombre en question de nos nuits (Jn 3, 2), portant en écho l’interrogation existentielle déjà présente lors l’Annonciation d’hier qui rebondit dans l’entretien au cœur de l’Évangile du jour : « Comment cela peut-il se faire ? » (Cf. v. 4 et Lc 1, 34) La réponse est en quelque sorte la même, à peu de choses près, de Marie à Nicodème jusqu’à nous : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre; c’est pourquoi celui qui va naître sera saint, il sera appelé Fils de Dieu » (Lc 1, 35 : Nous soulignons). Voilà la promesse d’une naissance perpétuelle à notre identité filiale dans le Fils en Dieu-Père par l’Esprit ! Y « consentir, c’est être sauvé », atteste Saint Bernard de Clairvaux. Y croire, c’est vivre encore et toujours. Cette V(v)ie nouvelle d’en haut reçue dans la foi n’est ni une vaine poésie ni une figure de style ni même de belles paroles en l’air. Elle est bien réelle et effective, quoi qu’elle nous échappe toujours comme le Souffle du vent dont on « ne sait ni d’où il vient ni où il va » (cf. v 8). Mais, y crois-tu vraiment ? Ne te sens-tu pas, en quelque racoins de ton être, inapte et indigne d’y donner foi dans l’ombrage de tes fermetures à l’A(a)mour de toi-même, de l’a(A)utre et de Dieu dans l’en-bas blessé et souffrant de ta vie (maladie physique et/ou psychique, peur, angoisse mort, abandon, exclusion, violence meurtrière, exploitation, injustice, etc) ? « Si quelque humain est descendu dans l’en-bas, jusqu’à goûter la grande mort, sans que pourtant soit détruite en lui la semence de vie, alors nous pouvons tout croire et tout espérer[2] » et naître d’en-haut. Mais, es-tu ainsi disposé(e) à plier les genoux vis-à-vis la pseudo-toute-puissance de ton infernale culpabilité et/ou de ta suffisance hégémonique sur le duvet de l’Amour Miséricordieux du Dieu de Jésus-Christ étendu au plus profond de l’en-bas de ta vie ? Autrement dit, désires-tu accueillir, apprivoiser, accepter, voire « re-co-naître » l’ombre blessé/blessant de tes fragilités, vulnérabilités, faiblesses, fermetures à l’Amour qui font te perdre le « Souffle » et te font « dévivre dégonflé(e) ». En re-con-naissant que l’être humain n’est grand qu’à Je-Nous, es-tu prêt(e) à te laisser accompagner et relever en disciples d’Emmaüs, fractionnant par Lui, avec Lui et en Lui le pain de cet en-bas de ta vie et que, le cœur tout brûlant, tu puisses v(V)ivre à son image et à sa ressemblance en bienheureux, pauvre et humble « ressuscité cicatrisé » de cœur, prêt à tout recevoir, à tout donner ? En effet, il ne faut pas se bercer d’illusions et re-con-naître que : « Jésus est ressuscité avec des cicatrices[3] et nous allons aussi ressusciter avec nos cicatrices. Cela fait partie des limites de l’être humain. C’est une réalité dure à accepter car il est difficile de ne pas se rêver sans limites, entièrement et immédiatement guéris. Ce n’est pas parce qu’il subsiste des fragilités que nous sommes encore en désordre. Si nous avons laissé l’Esprit faire la clarté, il sera possible de les vivre avec un cœur pacifié, car alors nous entrerons dans la véritable humilité[4] ». Cette humilité saine et bienheureuse, au service véritable de soi et de la relation à l’a(A)utre et à mille lieues de l’humiliation, se décline dans le carnet de Dieu comme la re-con-naissance de ses forces, richesses et potentialités sans orgueil et la re-con-naissance de ses faiblesses, pauvretés et limites sans mépris. Au cœur de cette humilité se profile la vie divine qui nous donne de naître en Dieu et de laisser Dieu naître en soi en offrant toujours-déjà l’opportunité d’une « a(A)utre » chance qui s’appelle « du jour au lendemain ». Guérir psycho-spirituellement en profondeur n’est-ce pas porter un regard neuf sur soi-même et sur l’a(A)utre (prochain, Création, Dieu), qui opère un retournement (metanoïa) de l’en-bas vers l’en-haut et permet d’éprouver dans toutes les instances de son être que « les vrais regards d’amour sont ceux qui nous espèrent ». N’est-ce pas là le miracle… de l’Amour ! « Voici que je vais faire une chose nouvelle, déjà elle pointe, ne la reconnaissez-vous pas ? Oui, je vais mettre dans le désert un chemin, et dans la steppe, des fleuves. […] Le peuple que je me suis formé publiera mes louanges » (Is 43 19. 21). Alors, si tu le veux bien, con-sens (sentir avec) à apprivoiser et traverser avec l’a(A)utre, ton prochain-accompagnateur et, en lui, « le Christ ressuscité, axe de maturation universelle[5] », l’en-bas de ta vie. La Vie d’en haut t’appelle à du neuf, à vin nouveau, outres nouvelles (Mc 2, 22) ! Mais, peut-être que mon propos ne parle pas de toi, mais de quelqu’un d’autre ? En ce qui me concerne, il parle sans conteste et humblement de moi ! Si tu veux te joindre à moi, ne te gêne pas, il y a une place pour toi dans mon cœur et surtout dans le Cœur de Dieu !
Bénédiction et union de prière !
Dany Charland
[1] Du titre du livre de Maurice Bellet publié en (2013).
[2] Ibid.
[3] Jn 20, 27.
[4] Simone Pacot, L’évangélisation des profondeurs. Un chemin vers l’unité intérieure, Paris, Cerf, coll. « Points Vivre », P4149, 2015, p. 322.
[5] Pape François, Laudato Si, no 83.
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