Méditation quotidienne du dimanche 7 avril : Corps de miséricorde (No 203 – série 2023-2024)

Évangile du Dimanche 7 avril Dimanche de la Miséricorde (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Huit jours plus tard, Jésus vient » Jn 20, 19-31

C’était après la mort de Jésus. Le soir venu, en ce premier jour de la semaine, alors que les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par crainte des Juifs, Jésus vint, et il était là au milieu d’eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! » Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur. Jésus leur dit de nouveau : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. » Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus. »
Or, l’un des Douze, Thomas, appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau), n’était pas avec eux quand Jésus était venu. Les autres disciples lui disaient : « Nous avons vu le Seigneur ! » Mais il leur déclara : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! »
Huit jours plus tard, les disciples se trouvaient de nouveau dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vient, alors que les portes étaient verrouillées, et il était là au milieu d’eux. Il dit : « La paix soit avec vous ! » Puis il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. » Alors Thomas lui dit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Jésus lui dit : « Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »
Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre. Mais ceux-là ont été écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom.

Méditation

Dimanche dernier, nous avons médité sur le Corps glorieux du Christ en lequel chaque humain a sa place comme corps glorifié.  Nous avons saisi que le temps après la Résurrection est un chemin de conversion en ce Corps glorieux. J’aimerais continuer cette méditation grâce à un homme qui a osé le courage de ce chemin : Thomas.

En fait, je n’ai jamais saisi son histoire dans cette perspective mais, en méditant le texte, n’éclaire-t-il pas en nous notre révolte contre ce Corps glorieux ? Comment, en réalité, est-il possible d’imaginer pour nous humains que notre corps puisse être glorieux quand, au plan même de ce corps, nous vivons tant de pertes et de souffrances ? Maladies, violences, famine, cataclysmes… le corps est continuellement mis à mal. Est-il possible que Thomas vit une révolte devant ce Fils de Dieu qui se présente avec les stigmates de sa Passion et que c’est pour lui une sorte d’absurdité insoutenable ? Comment la Résurrection est-elle alors un gain face à ce monde qui déchire le corps ? Et si, en ce dimanche où nous sommes appelés à contempler la miséricorde de Dieu, celle-ci devait être saisie en premier lieu comme une expérience profondément charnelle ?

Thomas, j’oserais dire, n’y va pas de mains mortes par sa demande mais, surtout, en notre nom à toutes et à tous, ose un appel de miséricorde au cœur même du corps :  « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! »

L’image que je voyais est celle du combat de Jacob avec Dieu où ce Dernier mal pris, car il n’arrive pas à maîtriser Jacob, lui démet la hanche. Mais cela n’arrête pas Jacob et Dieu est obligé de lui dire : « Lâche-moi, car l’aurore est levée, mais Jacob répondit : Je ne te lâcherai pas, que tu ne m’aies béni », ce qu’Il fit. Ce Dieu vaincu par l’humain est de nouveau vaincu, car il répond à la demande de Thomas et lui montre une miséricorde inimaginable. « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. »

Dans ce corps à Corps, Jésus laisse à Thomas de vivre l’union au Corps du Christ par ses plaies. Il lui révèle que l’humain est sauvé par ses plaies et que, par ses plaies, les plaies humaines unies aux siennes sont transfigurées. Cette expérience nous insère de corps, avec toutes nos souffrances, dans le Corps glorieux. L’accès à son Amour, au débordement de sa Miséricorde, sur nous ne peut survenir que dans ce corps à Corps où notre corps devient, de par son Corps, un corps glorieux, c’est-à-dire un corps complètement saisi, traversé et rayonnant de sa Miséricorde.

Nos plaies ne sont pas effacées, comme Jésus le montre pour son propre Corps, mais elles sont guéries, car tout le mal qui peut nous frapper ne peut plus s’inscrire, même dans notre corps, comme une rupture avec Dieu et entre nous. Même si le mal nous déchire le corps, spécialement de par la violence des autres, ce mal ne peut plus créer une rupture avec Dieu, car au creux de ses plaies Thomas découvre un Amour infini qui est une onction divine qui guérit cette rupture et sa révolte et fait de ses plaies des canaux de miséricorde.

Ce combat de Thomas avec Dieu évide Dieu de la plénitude de ses bénédictions. Ces dernières s’écoulent vers lui et vers nous sans que Dieu même puisse les retenir, car il est pris aux entrailles. En ce sens, la miséricorde demande le combat de chacun.e avec Dieu : un combat où nous plongeons nos plaies dans les siennes le laissant complètement désarmé, car ses plaies unis aux nôtres laissent s’écouler son Amour.  Toutes les œuvres de charité chrétienne sont, dans cette perspective, une façon de lutter avec Dieu, afin qu’Il nous bénisse en nous comblant de miséricorde, ce qui veut dire très réellement qu’Il transforme notre corps en son Corps glorieux ou qu’Il nous fait Un dans ce Corps glorieux.

Le chemin de la Résurrection, à ce titre, demeurera toujours le combat d’un corps à Corps avec Dieu où notre corps est divinisé et qu’il ne pourra plus jamais être séparé de Celui de Dieu. Ces corps des saintes et des saintes qui sont demeurés incorruptibles ne sont qu’un simple signe que Dieu laisse pour nous le rappeler.

Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)

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