Méditation quotidienne du jeudi 22 février : Nés de Dieu (No 158 – série 2023-2024)

Évangile du Jeudi 22 février – Chaire de Saint Pierre (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Tu es Pierre, et je te donnerai les clés du royaume des Cieux » Mt 16, 13-19

En ce temps-là, Jésus, arrivé dans la région de Césarée-de-Philippe, demandait à ses disciples : « Au dire des gens, qui est le Fils de l’homme ? » Ils répondirent : « Pour les uns, Jean le Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres encore, Jérémie ou l’un des prophètes. » Jésus leur demanda : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Alors Simon-Pierre prit la parole et dit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! » Prenant la parole à son tour, Jésus lui dit : « Heureux es-tu, Simon fils de Yonas : ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux. Et moi, je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle. Je te donnerai les clés du royaume des Cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux. »

Méditation

Dans notre monde souvent limité, notre connaissance cherche toujours des points de référence auxquels comparer ce que nous voyons. Il nous faut comme trouver une sorte d’emprise en limitant les choses à ce que nous en comprenons. C’est plus facile et, disons, plus sécuritaire pour nous. Dans le texte d’aujourd’hui à la question « qui est le Fils de l’homme ? », les gens le comparent à Jean le Baptiste, d’autres à Élie puis, encore d’autre à Jérémie ou à quelque prophète. Même si en Jésus, il y a du surprenant, de l’impondérable, de l’indicible… il y a une limite à saisir le mystère du Fils. Et disons-le un inconfort…

Pierre, quant à lui, est touché par une connaissance qui lui vient non « de la chair et du sang » mais du Père qui est aux cieux ». Même là à lire le texte, nous avons de la difficulté à l’accueillir, car Pierre ne saisit pas le Fils par sa tête mais par une rencontre intérieure vivante avec Lui. Dans ce qui s’est révélé du Fils en lui, « tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! », Pierre a connu le Fils du ciel, « le Fils du Dieu vivant ». Ce n’est pas une abstraction mais l’expérience d’une Vie, qui lui vient de Dieu, et qui lui donne de non seulement entrer dans la relation d’Amour entre le Père et le Fils mais d’éprouver la naissance d’une Autre Parole en lui.

Il saisit le Fils, comme l’Envoyé du Père, le Christ ou, plus justement, il est saisi intérieurement par l’Envoyé du Père.  Plus encore, il naît comme Pierre en Celui qui est l’unique pierre : « la pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle : c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux ! » (Mt 21, 42). Son être, son être-mission, son identité filiale de « Pierre », lui est communiqué par, avec et en le Fils. Il est engendré dans le Fils par le Père sous le souffle de l’Esprit, comme « Pierre » : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ». Sa vie ne lui appartient plus, elle appartient à Dieu, et ce, pour le besoin de Dieu : bâtir son Église. Déjà un Autre a commencé à lui « ceindre et le mener où il ne voudrait pas » (Jn 21, 18); et tout ce qui suivra dans la vie de Pierre, concourra à bâtir l’Église.

C’est là la beauté d’une mission : nous laissons le Fils vivre en nous, régner en nous comme Il le désire. Et un tel abandon n’est pas une perte de qui nous sommes mais l’entrée dans la plénitude non seulement de notre mystère mais de Celui de Dieu en nous. « Né de Dieu », Pierre éprouve en sa chair de n’être plus de ce monde. Tous les repères d’hier sont inutiles, il a glissé en la terre de Dieu. Une terre qui le laisse dans l’inconnaissance de l’Inconcevable. Le Simon d’hier a été jeté dans la démesure de Pierre, saisi en « la pierre d’angle » qu’est le Fils et, en regard duquel, même, « la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle ».

Son être est plein de la Vie de Dieu, contre laquelle la « Mort » n’a plus d’emprise ni de victoire. À partir de la révélation vécue aujourd’hui, le nouveau Pierre apprendra doucement, au quotidien, ce que signifie cette désemprise de la mort en lui.  Il découvrira plus encore que cette Vie donnée du Fils en lui par le Père ne renvoie pas à un rapport extérieur mais que la Vie de Dieu et la sienne sont appelées à devenir Une. Ce n’est pas comme un cadeau que l’on reçoit mais une Vie qui se donne si entièrement qu’Elle se laisse entre nos mains pour la donner à notre tour.

Pierre n’est pas encore acclimaté d’être à cette nouvelle Vie mais viendra un temps où « je te donnerai les clés du royaume des Cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux ». Bien sûr, le Fils ne peut lui remettre immédiatement les clefs, car Il n’a pas encore vécu sa Passion, mort, descente aux enfers et résurrection. Ce n’est qu’alors que les clefs lui seront remises. Et il aura alors le pouvoir de lier à la Vie les personnes qu’il rencontrera et de délier celles prises dans la mort. Mais, pour ce faire, il devra lui-même traverser la mort avec Jésus, le renier à cause du mal en lui, et ce, afin qu’il puisse lui-même vivre l’humilité du déliement et saisir le pouvoir de Résurrection de la Vie. Ce n’est que là que Pierre deviendra Église et, en son être, en l’être du Fils en lui et de son être en le Fils, il pourra abriter toutes les personnes qui viennent à lui.

Puissions-nous comme Pierre, en ce Carême, écouter en nous le Père afin qu’il nous révèle le Fils dans l’Esprit, c’est-à-dire qu’il nous le donne par Amour afin que, par, avec et en Lui, nous recevions notre nom nouveau et nous naissions de Dieu. Nés de Dieu, voilà notre mission !

Stéfan Thériault (stheriautl@lepelerin.org)

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