Évangile du Mercredi 21 février – 1re semaine de Carême (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)
« À cette génération il ne sera donné que le signe de Jonas le prophète » Lc 11, 29-32
En ce temps-là, comme les foules s’amassaient, Jésus se mit à dire : « Cette génération est une génération mauvaise : elle cherche un signe, mais en fait de signe il ne lui sera donné que le signe de Jonas. Car Jonas a été un signe pour les habitants de Ninive ; il en sera de même avec le Fils de l’homme pour cette génération. Lors du Jugement, la reine de Saba se dressera en même temps que les hommes de cette génération, et elle les condamnera. En effet, elle est venue des extrémités de la terre pour écouter la sagesse de Salomon, et il y a ici bien plus que Salomon. Lors du Jugement, les habitants de Ninive se lèveront en même temps que cette génération, et ils la condamneront ; en effet, ils se sont convertis en réponse à la proclamation faite par Jonas, et il y a ici bien plus que Jonas. »
Méditation
Génération mauvaise ! Est-ce le cas de notre génération ? Est-ce que nous en sommes au point que le seul signe que nous avons est celui de Jonas ? Et est-ce que, comme les habitants de Ninive, nous oserons nous convertir à sa seule parole ?
J’avoue que, lorsque je lis l’histoire de Jonas, ce prophète m’apparaît plutôt comme un anti-prophète. Quand le Seigneur demande à Jonas d’aller prêcher contre la méchanceté des ninivites, Jonas préfère « s’enfuir à Tarsis, loin de la face du Seigneur » (Jo 1, 3). Son choix fait en sorte que tous les passagers du bateau sur lequel il s’est embarqué risque de mourir. Peut-être nous est-il important de réfléchir en passant sur l’impact de nos choix sur les autres ? Si nous refusons la mission que Dieu nous confie, n’a-t-on pas une responsabilité envers ceux vers qui Il voulait nous envoyer afin d’être sauvés ?
Devant la situation, Jonas en vient à proposer aux passagers du navire de le jeter à l’eau, « car, dit-il, je le reconnais, c’est à cause de moi que cette grande tempête vous assaille » (Jo 1, 12). Mais le Seigneur, pour sauver son prophète, « donna l’ordre à un grand poisson d’engloutir Jonas. Jonas demeura dans les entrailles du poisson trois jours et trois nuits » (Jo 2, 1). Il entre alors dans « le ventre des enfers » (2, 3) « rejeté devant tes yeux (…) Les eaux m’ont assailli jusqu’à l’âme, l’abîme m’a cerné ; les algues m’enveloppent la tête » (2, 5-6). Mais voilà que Jonas se souvient du Seigneur (2, 8) qui le sauve du malheur. Il décide alors de se rendre à Ninive. C’est alors qu’à sa prédication tous les habitants, « du plus grand au plus petit » (3, 5), se convertissent. Mais Jonas est alors frustré et en colère et explique à Dieu pourquoi il ne voulait pas y aller au départ : « C’est pour cela que je m’étais d’abord enfui à Tarsis. Je savais bien que tu es un Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment » (4, 2).
C’est alors qu’il dira au Seigneur par deux fois, ce qui me semble le cœur du problème de l’Évangile que nous lisons : « Eh bien, Seigneur, prends ma vie ; mieux vaut pour moi mourir que vivre » (4, 3.8). Et son attitude nous oblige à nous demander si, aujourd’hui, nous ne sommes pas arrivés à ce point de préférer la mort à la vie, et ce, malgré que, dans nos vies, nous ayons vu, comme Jonas, la puissance de salut et d’amour du Seigneur.
Je suis obligé de croire que nous sommes devenus cette « génération mauvaise », car nous poussons l’absurdité de nos conduites à choisir la mort à la vie, non seulement pour nous-mêmes mais pour les autres. D’un côté entre les sports extrêmes, l’hyper-consommation de drogues, du taux de suicide, d’un faux « droit à mourir »,… et, de l’autre, de tuer à coup de bombes à Gaza, en Ukraine ou ailleurs… en invoquant une (fausse) juste guerre, la mort a pris le pas sur la vie. Tuer enfants, femmes, personnes âgées… tuer l’humain…met comme premier principe notre violence, notre haine, notre colère, nos ressentiments… au lieu d’y placer l’autre, notre humanité et Dieu.
Nous faisons carrément le choix de la mort et ce Dieu qui est « tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment », nous ne l’invoquons plus, car nous tenons plus à la violence de nos présumées justices qu’à son Amour, qui peut et veut nous sauver.
Que nous soyons juifs, musulmans ou chrétiens, si nous en arrivons là, cela signifie que nous avons abandonné Dieu et, ce faisant, nous sommes les disciples du mal; et la haine et la destruction sont devenues notre slogan. Le temps du Carême nous pose donc cette question fondamentale : Dans ma vie, qu’est ce que je choisis et préfère : la mort ou la vie ? La mort au détriment de soi, des autres, de la création et de Dieu ou la vie afin de permettre à tous de vivre et de croître ?
Ces questions demeurent troublantes sur le refus que nous portons de la vie. Quand on regarde à Jonas, qui a connu le Seigneur, a été appelé par Lui, a vu son salut dans sa propre vie et a vu la puissance de sa Parole face aux ninivites, et qui termine son chemin en préférant la mort à la vie, cela est bouleversant. Alors, il y a ici un appel à mettre notre espérance en le Fils de Dieu qui s’est incarné afin d’ouvrir, dans l’intime de nos refus, un chemin nouveau vers Dieu. Prions-le de nous aider !
Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)
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