Méditation quotidienne du lundi 22 janvier : Petits arrangements entre ennemis (No 127 – série 2023-2024)

Image par Gerd Altmann de Pixabay

Évangile du Lundi 22 janvier – 3e semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« C’en est fini de Satan » Mc 3, 22-30

En ce temps-là, les scribes, qui étaient descendus de Jérusalem, disaient : « Ce Jésus est possédé par Béelzéboul ; c’est par le chef des démons qu’il expulse les démons. »
Les appelant près de lui, Jésus leur dit en parabole : « Comment Satan peut-il expulser Satan ? Si un royaume est divisé contre lui-même, ce royaume ne peut pas tenir. Si les gens d’une même maison se divisent entre eux, ces gens ne pourront pas tenir. Si Satan s’est dressé contre lui-même, s’il est divisé, il ne peut pas tenir ; c’en est fini de lui. Mais personne ne peut entrer dans la maison d’un homme fort et piller ses biens, s’il ne l’a d’abord ligoté. Alors seulement il pillera sa maison.
Amen, je vous le dis : Tout sera pardonné aux enfants des hommes : leurs péchés et les blasphèmes qu’ils auront proférés. Mais si quelqu’un blasphème contre l’Esprit Saint, il n’aura jamais de pardon. Il est coupable d’un péché pour toujours. » Jésus parla ainsi parce qu’ils avaient dit : « Il est possédé par un esprit impur. »

Méditation

La puissance de Jésus, qui vient de faire plusieurs miracles, s’offre au regard de tous.  Comme un soleil qui tombe du ciel, l’amour de Dieu brille sur notre terre dans son éclat surnaturel. Tout le monde se raffermit de la force de Son amour divin. Pourtant, les scribes, au lieu de faire de ces miracles un chemin qui monte vers Dieu, soutiennent que Jésus expulse les démons par le pouvoir d’un autre démon Béelzéboul. Fermés aux réalités divines, les scribes s’embourbent dans leur état d’esprit impur. Jésus reprochait aux scribes leur division intérieure (Mt 23,13). Coupé en deux, le cœur, qui ne monte pas vers Dieu, se retourne contre lui-même. En effet, partagés, les scribes demeurent prisonniers des compromis et des arrangements. Les scribes représentent une manière de croire en Dieu tout en s’accommodant avec le péché par des tractations dissimulées dans les replis de la conscience : « Je crois en Dieu », mais pas 24 heures sur 24, mais pas dans ce petit coin-là que je me réserve… « Je crois en Dieu », mais je m’arrange pour conserver intactes mes fausses croyances… A côté du « credo » qui célèbre l’amour de Dieu, j’ajoute, en contrebande, l’éloge de mes blessures. Habitués aux compromis et aux marchandages, les scribes appliquent à Jésus leur propre manière de penser. Selon ces hommes divisés, Jésus expulserait les démons par le pouvoir d’un démon. Jésus achèterait un avantage en le payant avec une monnaie de contrefaçon, sans être de plain-pied dans l’amour du Père. Cet état d’esprit impur, n’est-il pas le nôtre lorsque nous acceptons tel bénéfice secondaire en compensation d’une dégradation de notre être ?

Souvent, nous ressemblons à ces scribes lorsque nous dominons une passion par une passion contraire. Comme le conseillent certains coachs, après trois ans de mariage, il faut, dans les couples, pimenter la baisse de l’amour en excitant les fantasmes sexuels les plus déréglés. Une libido ensauvagée compenserait la routine… Ou encore, à une violence subie, on fait répondre une autre violence qui relance l’avenir. Dans Le Comte de Monte-Christo d’Alexandre Dumas, Edmond Dantès, ce héros humilié, supporte l’injustice sous réserve de nourrir en son sein le démon de la vengeance. Capitulant avant d’avoir lutté, on fait le malin en croyant pouvoir s’arranger avec son pire ennemi pour recouvrer la maîtrise de sa vie. Mais, finalement, qui gagne ?     

Nourrir son vice, est-ce le dominer ? Faire une place au mal qui se blottit dans une routine, est-ce le vaincre ? Est-ce participer à la victoire du Christ ? « Ce n’est pas là vaincre, ce n’est pas là se délivrer de la servitude ; c’est peut-être changer de maître pour quelque temps, ou plutôt c’est étendre son esclavage ; c’est devenir sage, heureux et libre seulement en apparence, et souffrir en effet une dure et cruelle servitude. » (1)

Contre Satan qui se vante d’être « un homme fort », le Christ entre victorieux dans la Création pour ligoter Satan et ficeler ses démons. Le Christ victorieux pille le trésor accumulé par Satan, trésor composé d’âmes ravies à l’amour du Père. Pour que le vol libérateur s’accomplisse, le Christ a seulement besoin de notre confiance. Le salut demande d’abord de laisser Dieu être Dieu et ensuite d’être vrai face à ce Dieu enfin reconnu, c’est-à-dire conscient de notre péché. Laisser l’Esprit Saint qui circule dans la vie trinitaire Se proposer aux hommes. Les scribes refusent à Dieu le droit d’être Dieu. Ils dénient dans le Christ la présence de l’Esprit qui relie au Père. Ils refusent que Dieu sauve comme Il sait le faire. Ensuite, divisés, ils n’entrent pas franchement dans leur vie. Or, si notre naissance au monde fut une générosité de Dieu reçue sans notre décision, notre seconde naissance au salut exige notre entière adhésion : « Celui qui t’a créé sans toi, ne te sauvera pas sans toi. » (2) Nous avons à participer librement à l’œuvre d’un Autre en nous. Cette humilité est tout à la fois le sommet de la dépendance et de la liberté.  

Vincent REIFFSTECK.       vincent.reiffsteck@wanadoo.fr

(1) Nicolas de Malebranche, De la recherche de la vérité, livre II, troisième partie, ch.III.

(2) Saint Augustin, Sermon 169, 11, 13.

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