Évangile du Mercredi 15 novembre – 32e semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)
« Il ne s’est trouvé parmi eux que cet étranger pour revenir sur ses pas et rendre gloire à Dieu ! » Lc 17, 11-19
En ce temps-là, Jésus, marchant vers Jérusalem, traversait la région située entre la Samarie et la Galilée. Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent à sa rencontre. Ils s’arrêtèrent à distance et lui crièrent : « Jésus, maître, prends pitié de nous. » À cette vue, Jésus leur dit : « Allez vous montrer aux prêtres. »
En cours de route, ils furent purifiés. L’un d’eux, voyant qu’il était guéri, revint sur ses pas, en glorifiant Dieu à pleine voix. Il se jeta face contre terre aux pieds de Jésus en lui rendant grâce. Or, c’était un Samaritain. Alors Jésus prit la parole en disant : « Tous les dix n’ont-ils pas été purifiés ? Les neuf autres, où sont-ils ? Il ne s’est trouvé parmi eux que cet étranger pour revenir sur ses pas et rendre gloire à Dieu ! » Jésus lui dit : « Relève-toi et va : ta foi t’a sauvé. »
Méditation
Dieu est un mystère de gratitude, car, s’il est Amour, entre les Aimés trinitaires, il ne peut y avoir qu’une gratitude infinie. Gratitude, gratuité et grâce sont une même réalité en Dieu; et, dans notre langage humain, dérivent du même mot latin « gratia ». Le monde que le Père a créé par le Fils dans l’Esprit est une réponse d’Amour de ces derniers à l’Amour du Père. Le monde est né de la gratitude du Père pour le Fils dans l’Esprit et de la gratitude du Fils dans l’Esprit pour le Père. C’est de ce même élan que le Fils s’incarnera et mourra sur la Croix, dans un surcroît d’Amour (de gratitude) pour le Père.
Le monde et, spécialement, chaque être humain, sont expressions dans le Fils de ce surcroît d’Amour qu’est la gratitude, faisant que tout en ce monde est grâce. Tout origine de l’Amour mutuel des Personnes divines et s’écoule vers nous en pure « gratuité ». Cette gratitude, gratuité et grâce des Personnes divines expriment donc l’essence de leur Amour tout en exprimant leur relation eucharistique, leur relation d’« action de grâce », dans cette dépossession amoureuse qu’ils vivent entre eux.
Cette dépossession révèle le sens de la gratitude qui est de se donner sans retour pour l’Autre. C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre les miracles de Jésus et, dans cet évangile, la guérison des dix lépreux. Les miracles sont des partages de grâce, des actes de gratitude des Personnes divines entre elles, et ce, afin de faire entrer l’humain dans la gratitude divine, dans un Amour qui se donne par pure gratuité. C’est pourquoi Jésus, ici, est bouleversé qu’un seul lépreux revient et se jette à ses pieds « en lui rendant grâce ». Comment est-il possible que les neuf autres n’aient pas été touchés par la Source d’Amour d’où s’écoule la grâce, par la gratitude qu’exprime le don mutuel des Personnes divines ? Mais n’est-ce pas là, de quelque manière, le vide du péché : celui de s’approprier tout sans retour vers l’A(a)utre, sans reconnaissance de l’A(a)utre, et ce, dans ce qu’Il est de plus précieux : son Don ?
Ce samaritain guéri par grâce se joint à l’action de grâce du Fils. Il lui rend, en quelque sorte, la grâce reçue avec la même gratuité. Il la lui redonne avec Amour du lieu même où ce geste prend source. Sa vie d’homme se fait ainsi gratitude. Elle entre dans l’eucharistie de la vie partagée des Personnes divines. Il devient signe pour le monde de cet Amour offert de Dieu. Cette gratitude exprimée brise en lui le cercle du mal, du péché, en le rétablissant dans son propre don et en lui donnant à son tour d’être don pour ce monde : « Relève-toi et va : ta foi t’a sauvé. ». La gratitude est d’embrasser sa vie comme un don et de mettre ce don au service du monde. Elle est un « oui reconnaissant » à être fille ou fils dans le Fils et, par Lui, avec Lui et en Lui, à partager d’Amour le don que nous sommes en Dieu.
C’est cette mise en don de soi dans la gratitude qui est l’antidote du péché et qui est l’essence de la Mission de l’Amour divin à laquelle on est appelé à participer. Aimer l’A(a)utre, aimer notre ennemi, voilà une vie en gratitude.
Imaginons un monde vécu dans cette gratitude. Aucune guerre ne serait alors possible, car notre don exprimé en surcroît d’Amour donnerait à chacun.e de devenir qui il est et, dans ce partage de vies, il ne pourrait y avoir qu’équité et solidarité. Quand nous regardons les guerres qui déchirent notre monde, nous ne pouvons que constater qu’il n’y a là qu’appropriation et non désappropriation, qu’emprise et non don, que séparation et non union…
Nous avons perdu dans nos vies la qualité de ce qu’est l’Amour, car nos actions se font sans grâce, sans gratuité et sans gratitude. Redécouvrons la valeur de la reconnaissance et du mot « merci » ! Merci pour ce monde confié par Dieu ! Merci à Dieu pour nous avoir fait des semblables avec qui partager la grâce du monde ! Merci pour le don de notre vie comme don de Dieu ! Merci pour le don éternel qu’est Dieu !
MERCI !
Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)
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