Méditation quotidienne du vendredi 3 novembre : Quel Homme et Quel Dieu? (No 61 – série 2023-2024)

Évangile du Vendredi 3 novembre – 30e semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Si l’un de vous a un fils ou un bœuf qui tombe dans un puits, ne va-t-il pas aussitôt l’en retirer, même le jour du sabbat ? » Lc 14, 1-6

Un jour de sabbat, Jésus était entré dans la maison d’un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et ces derniers l’observaient. Or voici qu’il y avait devant lui un homme atteint d’hydropisie. Prenant la parole, Jésus s’adressa aux docteurs de la Loi et aux pharisiens pour leur demander : « Est-il permis, oui ou non, de faire une guérison le jour du sabbat ? » Ils gardèrent le silence. Tenant alors le malade, Jésus le guérit et le laissa aller. Puis il leur dit : « Si l’un de vous a un fils ou un bœuf qui tombe dans un puits, ne va-t-il pas aussitôt l’en retirer, même le jour du sabbat ? » Et ils furent incapables de trouver une réponse.

Méditation

« Est-il permis, oui ou non, de faire une guérison le jour du sabbat ? »

Le septième jour de la création, appelé le sabbat, marque le jour du repos de Dieu lorsqu’Il chôma de son œuvre « ce jour-là, il se reposa de toute l’œuvre de création qu’il avait faite » (Gn2,3). La consigne du sabbat permettait au juif de se reposer comme, et avec Dieu, du travail pénible de la semaine. Lors de cette journée, Dieu enjoint l’homme à abandonner le faire pour entrer dans l’Ê(ê)tre. Dieu bénit, consacre et sanctifie toute Sa Création en s’y reposant. Chômer avec Dieu, c’est contempler Sa Création et la bénir, c’est entrer dans le repos bienveillant de Sa Présence, dans cet espace sacré de la rencontre avec l’A(a)utre.

Le sabbat, qui, à l’origine, permettait à l’homme de se libérer de l’idolâtrie du travail, est devenu une contrainte si rigoureusement codifiée qu’il a entraîné l’homme dans l’idolâtrie des lois; il a été corrompu dans son esprit par une forme de religion qui prétendait le protéger et le voilà devenu un absolu catégorique.

Jésus a opéré une guérison le jour du sabbat, quelle horreur pour ces gens bien-pensants, si bien installés dans leur certitude! Quelle audace d’avoir enfreint la loi qui interdit de soigner le jour de Dieu! Une affaire qui coûtera d’ailleurs cher à Jésus.

Malheureux sont ces scribes et ces pharisiens qui n’avaient rien compris et qui étaient confinés dans une obligation absolue qui classe Dieu dans des cases.   

Mais, ne sommes-nous pas encore si souvent comme eux? Et même pire, parfois?

 Combien de fois avons-nous entendu mettre sur le compte de Dieu toutes sortes de choses horribles et terribles, qui sont indignes de Lui et de nous. N’avons-nous pas inventé en Son Nom et pendant des décennies, une religion qui a asservit l’homme? N’avons-nous pas souffert de pratiques religieuses héritées telles des conditionnements et qui n’atteignent pas nos cœurs? Ne nous arrive-t-il pas de modifier les catégories du mal de manière qu’un moindre mal devienne un bien?

Dieu ne nous a pas imposé les préceptes et les lois comme des fardeaux et des punitions, Il nous les a offerts comme des grâces et des signes d’Amour. Le cadeau ne doit jamais devenir plus important que Celui qui l’a offert. À la fin des temps, seul Dieu subsistera, pas les sabbats ni les dimanches.

Devant les questions de Jésus aux pharisiens, un autre questionnement surgit : « Quel Homme et Quel Dieu? »[1]

Jésus nous recentre sur l’essentiel : l’Amour qui est le cœur même de Dieu constamment offert à l’Homme. Il n’y a qu’une seule voie vers Dieu, c’est la charité, l’authentique bienveillance, ce mystère de foi qui nous permet d’entrevoir à travers chaque visage la dignité inviolable de la personne humaine, dont Dieu seul est le fondement.

Dieu se tient là où la liberté respire, là où la dignité prime, et là où l’Homme est humanisé et humanisant. Jésus est gardien de l’Espérance et non de la loi, passeur de bienveillance et non de jugement; Il a aimé l’homme jusqu’à la Croix. Un de Ses derniers gestes sur terre, était de se mettre à genoux et de laver les pieds de Ses disciples. Une de Ses dernières consignes était de nous aimer les uns les autres (Jn 13,34).

La foi n’a pas besoin de gardiens de Temple, de soldats qui défendent ses lois, mais de cœurs enflammés et débordants d’amour; « les vrais défenseurs de la doctrine ne sont pas ceux qui défendent la lettre, mais l’esprit ; non les idées mais l’homme ; non les formules mais la gratuité de l’amour de Dieu et de son pardon » (Pape François)

Quel Homme et Quel Dieu?

L’Homme n’est pas voué au mal qui l’habite, ni à l’esclavage des dogmes et des doctrines, chaque Humain est une œuvre d’art pétrie par la Main de Son Père, et dont la valeur est incommensurable, infinie et inviolable. C’est en ce sens, qu’il faut saisir le geste de Jésus ce jour de sabbat, ce n’est guère une rébellion irrespectueuse mais un engagement à délivrer l’Humain des fardeaux qui l’écrasent, à le libérer et à lui ouvrir la voie du Salut.

Le Dieu qu’Il manifeste n’est pas une force restrictive qui nous intimide et nous enferme en nous imposant ses désirs; Il est Celui qui nous amène à découvrir notre moi authentique et en Qui notre existence trouve son sens et son accomplissement. Il est l’Amour qui se donne et se communique, et lorsque nous l’accueillons, nous devenons semblables à Lui, un espace dépouillé, illimité, où toute l’humanité peut être accueillie et aimée. Jésus, l’unique Fils de l’Homme, nous a révélé l’unique visage de Dieu : l’Amour. Il nous appelle à être à Son image, de vrais filles/fils de l’Homme afin de devenir de vrais filles/fils de Dieu.

« Est-il permis oui ou non…? » La seule interdiction qui s’impose est l’absence d’A(a)mour. Un risque peut-être, comme celui qu’a pris Jésus, mais il est le seul chemin qui nous permettra d’être vrais et libres, de retrouver notre identité filiale, capable d’Infini, capable de Dieu, car chaque petit geste d’amour a une valeur divine, éternelle, infinie.

Puissions-nous toujours, là où l’on se trouve dans notre petit monde, être présence, être bienveillance, être A(a)mour; car c’est là que Dieu se tient.

Gladys EL Helou (gladyshelou@gmail.com)


[1] Zundel,M, Quel Homme et Quel Dieu, Éditions St Augustin, Suisse, 1997

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