Pour favoriser la prière des personnes qui sont dans d’autres pays, nous avons décidé de rendre disponible par courriel la méditation de chaque jour le soir précédent à 17 h heure du Québec. Sur le site du Pèlerin, elle sera déjà accessible à 16 h.
Évangile du Dimanche 10 septembre – 23e dimanche du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)
« S’il t’écoute, tu as gagné ton frère » Mt 18, 15-20
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère. S’il ne t’écoute pas, prends en plus avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins. S’il refuse de les écouter, dis-le à l’assemblée de l’Église ; s’il refuse encore d’écouter l’Église, considère-le comme un païen et un publicain. Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel.
Et pareillement, amen, je vous le dis, si deux d’entre vous sur la terre se mettent d’accord pour demander quoi que ce soit, ils l’obtiendront de mon Père qui est aux cieux. En effet, quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux. »
Méditation
Cet Évangile sur la correction fraternelle, nous aimons plutôt le survoler, car il est bien difficile de s’y décider et, comme le dit l’expression consacrée : « la situation est trop compliquée à expliquer ». Dans cette complication, il y a le contexte social. Dans l’individualisme moderne avec ses droits égocentriques, il est impossible de reprocher à quiconque sa faute. De plus, au Québec, depuis de nombreuses années, les chrétiens se sont tus; mis à l’index, leurs paroles sont condamnées avant même d’être prononcées.
Et disons-le, personnellement, notre dialogue intérieur est lui aussi compliqué face à cet appel de l’Évangile : « Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul à seul ». S’il est vrai que nous sommes plus habiles à voir la paille dans l’œil du voisin que la poutre dans le nôtre, c’est que la faute de l’autre nous ramène à la nôtre. Comment peut-on alors faire une correction FRATERNELLE, quand tout rage en nous ? Comment la faire aussi sans accuser ou condamner ? Nous prenons donc un temps fou à décider si nous devrions aller voir l’autre, si bien qu’au final, le temps passant, il ne fait plus de sens de poser le geste. Imaginez alors l’impossible situation d’aller en parler à deux ou trois personnes puis à la communauté.
Mais au-delà de cette situation sociale, ecclésiale ou personnelle, le vrai problème tient au fait que la correction fraternelle appartient au sacrement de la réconciliation. Le texte nous le proclame haut et fort par l’avant dernier verset : « Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel ». En ce sens, la correction fraternelle élargit le sacrement de la confession pour nous en révéler le sens fraternel et communautaire. Et nous pose cette question : Quel est le but de la confession ?
Bien sûr, la première réponse est une confession de Dieu et du fils ou de la fille de Dieu que nous sommes tout en vivant une démarche de demande de pardon à Dieu pour le mal que nous avons fait ou le bien que nous n’avons pas fait. Mais ce sacrement signifie, de par son geste où nous nous approchons de l’un de nos frères pour nous confesser, que nous confessons que le geste posé est véritablement un geste de réconciliation entre nous et qu’il cherche à rétablir la communion. De la même façon, nous y venons en voulant demander au Père de nous pardonner par son Fils dans l’Esprit.
C’est sur cette base du sacrement de la réconciliation qu’il nous faut comprendre la correction fraternelle. Le sens premier est de nous rappeler que nous ne pouvons corriger notre frère si nous n’avons pas regardé en nous, avec le regard amoureux de Dieu, la poutre de nos fautes. Seul un « pécheur » qui a éprouvé en lui le pardon de Dieu peut se présenter réellement devant l’autre comme plus pécheur que lui et dire à l’autre de ne plus demeurer dans la mort, car il a vécu, grâce au Fils, la joie de ce passage de la mort à la Vie. La correction fraternelle est donc possible si cet acte de confession sur nos propres péchés est bien ancré en nous. Nous ne nous présentons pas alors devant l’autre fautif comme meilleur que lui mais comme un témoin bien pauvre du salut éprouvé et apporté par le Christ. Nous confessons comment la foi en le Christ transforme l’existence et remet debout. Et qu’un tel appel est aussi pour lui.
De plus, cette correction a une conséquence possible formidable, celle « de nous gagner notre frère ou notre soeur». La confession de nos péchés n’est pas un reproche sur le mal commis mais une tristesse et une honte profondes que nos fautes ont blessé les autres et Dieu. La correction fraternelle met donc en acte cette conscience que ce que nous disons, nous faisons ou nous omettons de faire atteint l’autre, que, sans l’aide mutuelle de nos frères et soeurs, il nous est impossible de tenir sur le chemin spirituel et que, sans cette correction fraternelle, notre filiation demeure un voeu pieux.
Au final, la correction fraternelle n’est possible que si, de l’intérieur, nous avons été saisis par une autre Parole, celle du Fils qui, au cœur du sacrement de la confession, s’est donnée à nous pour nous sauver. Quand nous allons vers notre frère ou notre sœur, la Parole que nous annonçons n’est pas la nôtre, si bien que les effets de cette Parole en l’autre ne nous appartiennent pas. La seule chose que le Fils nous demande est, comme chrétiens, à travers entre autres la correction fraternelle, que nous exercions, en son Nom, le ministère de réconciliation qu’Il nous a confié.
Puissions-nous alors porter ce ministère de réconciliation dans un monde qui a tellement besoin d’entendre la Vérité sur cet Amour infini de Dieu pour chacun.e ! Le vrai gain étant de “gagner notre frère ou notre soeur” par cet Amour qui filie tout !
Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)
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