Veuillez noter que les méditations cesseront le dimanche 25 juin pour la période des vacances et recommenceront en septembre prochain. Toute notre gratitude d’avoir marché avec nous et demeurons unis dans la prière.
Évangile du jeudi 22 juin – 11e semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)
« Vous donc, priez ainsi » Mt 6, 7-15
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Lorsque vous priez, ne rabâchez pas comme les païens : ils s’imaginent qu’à force de paroles ils seront exaucés. Ne les imitez donc pas, car votre Père sait de quoi vous avez besoin, avant même que vous l’ayez demandé. Vous donc, priez ainsi : Notre Père, qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour. Remets-nous nos dettes, comme nous-mêmes nous remettons leurs dettes à nos débiteurs. Et ne nous laisse pas entrer en tentation, mais délivre-nous du Mal.
Car, si vous pardonnez aux hommes leurs fautes, votre Père céleste vous pardonnera aussi. Mais si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père non plus ne pardonnera pas vos fautes. »
Méditation
Le Notre Père enseigné par Jésus est-il une prière à réciter ou est-ce un enseignement sur comment vivre toute prière ou, même, notre vie spirituelle ? Comme nous la récitons déjà, cette méditation va répondre à la deuxième question en parlant de la prière mais en sachant que tout ce que je dirai s’appliquera tout autant à notre vie spirituelle.
« Notre Père qui es aux cieux », voilà le début de tout. Toute prière est une descente en nous dans le ciel qui nous habite, en cette Personne du Père qui est l’Origine de toute la Trinité. C’est se poser en ce Silence amoureux sans saisie possible, car il est le Tout Autre, l’au-delà de tout. Il nous apparaît ici seulement dans la nuit de la foi, comme une Lumière si infinie qu’elle nous aveugle. La prière nous ouvre donc d’entrée dans un Insaisissable où l’humain ne peut que s’agenouiller et demeurer en Silence, un Silence qui n’est pas le sien mais le Silence d’adoration d’un Autre. En s’y tenant, nous sommes appelés à ne pas « rabâcher », croyant « qu’à force de paroles nous serons exaucés ».
C’est d’autant plus vrai que, placés en ce Silence de l’Origine, tout notre être doit être en écoute pour entendre la Parole du Père qui surgit de son Silence, comme un don qui conjugue l’Amour ou nous conjugue d’Amour. Ici, nous sommes entraînés dans la naissance éternelle du Fils. Nous sommes engendrés par ce Verbe qui se fait chair en nous, par ce Nom qui est au-dessus de tout nom et qui, en le Père, est l’origine de chacun de nos noms et, en fait, en lequel toute la création trouve sa Source. C’est par cette Parole entendue en nous en le « Père qui es aux cieux » que, se tenant au lieu de notre genèse, nous recevons notre propre nom. La prière demeurera toujours une expérience d’Annonciation où, à l’ombre du Père, sous le souffle sanctifiant de l’Esprit, nous vivrons en toute gratuité la naissance du Fils en nous et notre naissance en Lui. C’est ce Nom sanctifié dans l’Esprit qui nous garde dans le Père.
Ces mots de l’Annonciation, « l’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c’est pourquoi l’être saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu » (Lc 1, 35), traduisent cette expérience profonde où il nous est possible de vivre « que ton règne vienne ». En naissant d’en haut au cœur de la Sainte Trinité, nous sommes devenus habitants du Royaume. Parce que nous avons « accueilli le Verbe en nous, il nous a donné pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom » (Jn 1, 12).
Devenus filles ou fils de Dieu, car nés au ciel trinitaire, la volonté du Père dans le Fils sous le souffle de l’Esprit se fait alors sur la terre. En nous, la prière devient accord de nos volontés, celle de Dieu et la nôtre. C’est pourquoi saint Augustin disait : « aime et fais ce que tu veux ».
Nous vivons alors dans cette communion avec Dieu où le Fils, et toute la Trinité en Lui, est notre pain quotidien. Placés là en l’Origine du Père, dans le surgissement de la Parole créatrice et de ce Souffle sanctificateur, nous ne manquerons jamais de rien. Car si la prière est d’entrer en soi-même et d’apprendre à naître au lieu même de toute création, à savoir la Trinité, qu’est-ce que le Verbe créateur ne pourrait pas nous donner « par surcroît ».
Nous éprouvons alors ce que Jésus disait à ses apôtres : « Moi, je suis venu pour qu’on ait la vie et qu’on l’ait surabondante » (Jn 10, 10). Nous sommes saisis par le fait que, au cœur de la Trinité, tout ne se vit que « par don ». Le Père, le Fils et l’Esprit ne se vivent que dans la dépossession continuelle de ce qu’ils sont. Si bien qu’il n’y a ici aucun regard qui s’attarde à la faute ou au péché mais, simplement, le « par don » amoureux des Personnes divines entre elles. C’est ce « par don » qui « remets nos dettes, et nous donne de remettre nos dettes à nos débiteurs ». Car notre dette à Dieu comme à nous sera toujours d’avoir retenu le don de soi et de ne pas avoir accordé à l’autre notre « par don ». La Vie éternelle ne peut t’être que ce « par don mutuel et infini ». Voilà la véritable eucharistie de la Vie et de nos vies. La prière n’est qu’entrée dans ce grand mouvement de « par don ».
Au final, toute tentation et tout consentement au mal demeureront toujours de refuser le chemin de la prière que je viens de décrire en croyant que l’on peut posséder Dieu à son profit et, ce faisant, ne plus nous vivre « par don », dans ce grand mouvement de dépossession d’Amour, de Vérité, de Vie… des Personnes divines. Entrer dans la prière, c’est entrer dans ce mouvement qui nous libère du mal et nous empêche d’y sombrer.
Notre vie spirituelle est donc ce magnifique chemin de prière où nous apprenons à vivre « par don ».
Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)
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