Méditation quotidienne du lundi 20 mars : « L’homme qui songe » (No 183 – série 2022 – 2023)

Image par Robert Cheaib de Pixabay

Évangile du Lundi 20 mars 2023 – St-Joseph – 4e semaine de Carême (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Joseph fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit » Mt 1, 16. 18-21. 24a

Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie, de laquelle fut engendré Jésus, que l’on appelle Christ.
Or, voici comment fut engendré Jésus Christ : Marie, sa mère, avait été accordée en mariage à Joseph ; avant qu’ils aient habité ensemble, elle fut enceinte par l’action de l’Esprit Saint. Joseph, son époux, qui était un homme juste, et ne voulait pas la dénoncer publiquement, décida de la renvoyer en secret. Comme il avait formé ce projet, voici que l’ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint ; elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus (c’est-à-dire : Le-Seigneur-sauve), car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. »
Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit.

Méditation

Un imprévu heurte Joseph : sa fiancée est enceinte avant leur vie commune. Ce jeune fiancé souhaitait accomplir ses rêves humains les plus légitimes. Comme chacun de ses ancêtres, il désirait se marier et donner une descendance. Matthieu vient d’établir la généalogie de Joseph à partir du roi David.

Cette fleur du désir est brisée sur la branche. Chacun, qui a vécu le piège d’une situation incompréhensible, voit en Joseph un frère. Combien de vies bouleversées trouvent en Saint Joseph un havre de paix ! Quand les bourrasques secouent un homme jusque dans ses fondations, qu’il est salutaire d’avoir une vie appuyée sur le Dieu vivant ! Joseph fréquente ce chemin de Moïse. Comme Moïse avant lui, Joseph a besoin de Dieu, il écoute : « L’Éternel parlait avec Moïse face à face, comme un homme parle à son ami. » (Exode 33,11). Joseph, qui respecte la loi de Moïse, est « un homme juste », parce qu’il est ajusté à la volonté de Dieu.

Dans une situation dramatique, nous pouvons nous révolter contre la vie, contre notre prochain, contre Dieu ! Combien de fois cela arrive-t-il ? Et pourtant, dans le creuset du plus dramatique se cache, pour qui sait voir, une Providence qui « forme et illumine de sens même la douleur qui nous a frappés » (Pape François, audience 01/12/2021). Nous pouvons nous enfermer dans la douleur de ce qui nous est arrivé. Alors, les mâchoires du malheur qui se referment sur nous digèrent notre joie, et nous sortons liquéfiés par l’amertume. Mais, dans la communion des saints, nous pouvons également, à la suite de Saint Joseph, discerner l’étoile qui brille dans l’épaisse obscurité. Cette lueur, comme un minuscule hommage du jour à la nuit, trace un rayon qui invite à la marche.  

Mais, souvent, dans notre vie, nous nous recroquevillons sur notre détresse. Nous nous endurcissons dans le désespoir. Ainsi, la Providence qui nous parle paraît incompréhensible, l’amour divin qui cherche à Se dire est inaudible. Nous ne comprenons plus la langue de Dieu. Nous nous brisons dans notre révolte (Ps 8, 3).

Joseph a l’habitude de Dieu qui est un ami. Malgré l’incompréhension, Joseph sait que Dieu est bienveillant. Il se consolide dans la confiance. Et Marie, qu’il aime tendrement, Joseph choisit de ne pas la répudier publiquement. Il invente une solution secrète qui protègera son aimée. C’est une délicatesse pleine d’invention. Lorsque quelqu’un semble avoir fait un faux-pas, comment réagissons-nous ? Nous nous répandons en commérage. Joseph ne rumine pas, il entre dans un silence qui signe l’authenticité de sa vie spirituelle.

De quel silence parle-t-on ? Il existe de nombreuses formes de silence : le mutisme de celui dont on a volé la voie, le silence de la victime menacée, le silence qui se referme comme la porte d’un tombeau. Le silence de Joseph n’est pas une déficience, ni une indigence de mots. Joseph était sans doute jovial, aimant les blagues et rieur. Son silence porte une densité spirituelle. Joseph ferme la porte aux discussions inutiles et entre dans la chambre secrète de l’âme. Entrer dans le mystère, s’y enfoncer, c’est s’envelopper de secret, c’est dans la foi, se savoir regardé par notre Père. « Quand tu pries, entre dans ta chambre, ferme ta porte, et prie ton Père qui est là dans le lieu secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. » (Mt 6,6) Nul ne sort de la nuit sans y être entré, sans l’avoir traversée.

Dans les situations dramatiques, Joseph est l’homme qui a des songes. Le songe se met à l’école d’un Autre plus grand. Chez Joseph, ce qui est petit ne se rétrécit pas en devenant mesquin, la blessure n’est pas infectée de soupçon. L’attention, tournée vers l’impossible de Dieu, voit s’ouvrir un tiroir secret qui élargit.

Dieu parle par le songe, mais en nous, il n’y a pas que la voix de Dieu. La voix de la peur crie fortement ! Tous les désirs ne sont pas des rêves et tous les rêves ne sont pas des songes. Beaucoup de rêves ne sont que des écrans de fumées… parfois un écran de fumées toxiques !

Le silence est donc nécessaire pour cultiver le discernement qui interprète. Ce que Jésus dit à propos de la loi : « Qu’est-il écrit dans la loi ? Qu’y lis-tu ? » (Lc 10,26), Joseph l’applique à propos de sa vie intérieure. « Qu’y lis-tu ? » Quand nous relisons notre vie, avons-nous l’habitude d’y voir clair,  d’y lire quelque chose qui fait signe vers la présence de Quelqu’un ?

Avec le Pape François, tournons-nous, en ce mois de mars dédié à Saint Joseph, vers ce modèle très actuel de force dans l’épreuve :

« Saint Joseph, tu es l’homme qui songe, apprends-nous à retrouver la vie spirituelle comme le lieu intérieur où Dieu se manifeste et nous sauve. Éloigne de nous la pensée que prier soit inutile; aide chacun de nous à correspondre à ce que le Seigneur nous indique.

Que nos raisonnements soient irradiés de la lumière de l’Esprit,notre cœur encouragé par Sa force et nos peurs sauvées par Sa miséricorde. Amen. » (Pape François, audience générale du mercredi 26 janvier 2022)

Vincent Reiffsteck

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