Méditation quotidienne du dimanche 5 mars : Voici l’Homme ! (No 168 – série 2022 – 2023)

Évangile du Dimanche 5 mars 2023 – 2e dimanche de Carême (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Son visage devint brillant comme le soleil » Mt 17, 1-9

En ce temps-là, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère, et il les emmena à l’écart, sur une haute montagne. Il fut transfiguré devant eux ; son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la lumière. Voici que leur apparurent Moïse et Élie, qui s’entretenaient avec lui. Pierre alors prit la parole et dit à Jésus : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. » Il parlait encore, lorsqu’une nuée lumineuse les couvrit de son ombre, et voici que, de la nuée, une voix disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le ! » Quand ils entendirent cela, les disciples tombèrent face contre terre et furent saisis d’une grande crainte. Jésus s’approcha, les toucha et leur dit : « Relevez-vous et soyez sans crainte ! » Levant les yeux, ils ne virent plus personne, sinon lui, Jésus, seul.
En descendant de la montagne, Jésus leur donna cet ordre : « Ne parlez de cette vision à personne, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts.

Méditation

“Ecce Homo”, “Voici l’homme” (Jn 19 , 5), voilà l’expression utilisée par Pilate pour décrire Jésus placé devant le peuple avec la couronne d’épines et revêtu du manteau de pourpre que portaient les empereurs romains. “Voici l’homme”, le seul véritable homme qui a existé, mais déjà défiguré par le mal humain et ses violences. Dans le texte médité de la Transfiguration, nous sommes aussi devant “voici l’homme” mais, cette fois, l’humain voulu selon Dieu, non pas défiguré mais transfiguré par, avec et en Dieu.

“Emmenés à l’écart, sur une haute montagne”, trois des disciples vont contempler, pour la première fois, ce qu’est un humain afin qu’ils puissent eux-mêmes, après la Résurrection, être entraînés dans cette transfiguration. Cette mise à l’écart n’est pas un retrait de la réalité du monde mais, pourrions-nous dire, un ensevelissement en lui dans l’élévation par et en sa Source qui est Dieu. La transfiguration est, à la fois, cette descente du Verbe dans la chair, de l’incarnation du Fils dans l’épaisseur du monde et, tout autant, l’élévation de l’humain par ce Verbe toujours en retour vers le Père.

Cette transfiguration ne serait pas possible si la chair humaine n’était pas sacrement du Divin et ne devait resplendir la Présence de Celui qui l’habite, et ce faisant, devenir pleinement humaine de par Dieu qui l’illumine de l’intérieur. Tous nos visages doivent devenir “brillants comme le soleil”, transfigurés dans l’Unique Figure de l’Invisible Divin, qui est le Fils, et resplendissants Dieu au coeur du monde. Même nos vêtements, c’est-à-dire tout ce qui nous vient de la création, sont appelés à devenir “blancs comme la lumière”, révélant, eux aussi, la Source de toute Vie. Ce “soleil” et cette “lumière” sont le rayonnement de la beauté d’un humain uni à Dieu et dont la Source même est l’Infini. Ce n’est pas cet humain réduit par nos violences et nos folies mais cet humain aux traits de Dieu.

Cet humain n’est pas un être en procès et placé seul en dérision devant le jugement du mal mais un être en pleine communion d’Amour non seulement avec les humains d’aujourd’hui mais ceux d’hier, symbolisés ici par Moïse et Élie. L’être humain ne se vit plus en exclusion mais en communion d’humanité et de création en Dieu. Et dans un tel monde, il y a une place ou une tente pour chacun.e où il fait bon vivre enfin : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. » Chacun.e a sa place, car chacun.e est un visage transfiguré de Dieu, porteur d’un visage de Dieu unique et, ainsi, témoin et ami personnel de Dieu.

Cet humain vit l’enveloppement de Dieu, son obombrement (c’est-à-dire “la nuée lumineuse (du Père) les couvrit de son ombre”) et, dans le coeur de chacun.e, ces paroles se font entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le ! » Toutes et tous engendrés en la Parole du Père qu’est le Fils peuvent, dans le plus intime de leur être, entendre cette Parole qui les engendre, entendre cette parole de Dieu unique que le Fils veut être par eux ou en elles au nom du Père et au coeur du monde. Écouter cette Parole et y obéir est non seulement dire oui à la naissance du Fils en nous mais à notre naissance en Dieu, l’une et l’autre étant consentement à notre identité unique dans toute l’histoire du monde. Cette Parole redonne à l’humain la Beauté de sa Source.

Dans cette expérience de transfiguration, nous ne pouvons, au départ, comme les trois disciples, que “tomber face contre terre”, car, devant ce Visage ensoleillé du Christ, nous ne pouvons échapper au regard sur notre défigure et saisir oh combien le mal nous empêche de rayonner le Dieu qui nous habite et l’être unique que nous sommes appelés à être. Ce “face contre terre” est le mouvement d’une confession de notre misère mais, plus encore, du Divin qui nous révèle sa grandeur et la nôtre, nous invitant ainsi, dorénavant, à vivre notre existence comme une confession humble de notre réelle humanité et de notre Source.

C’est pourquoi “Jésus s’approcha, les toucha et leur dit : « Relevez-vous et soyez sans crainte ! »” Dans ce simple mouvement d’approche, Jésus révèle à ses trois disciples et à nous aujourd’hui sa proximité divine et, nous touchant, nous rappelle la grandeur et la beauté de notre chair. En Jésus, Dieu est venu “toucher” notre chair et en faire la chair de Dieu, le lieu même où Dieu peut être touché, le lieu seul pour l’humain où Dieu peut être touché. Jésus nous relève donc en notre humanité et chasse de nous la crainte, celle avec laquelle le mal veut prendre emprise sur nous.

Un tel être transfiguré ne peut que “lever les yeux et ne voir plus personne, sinon lui, Jésus, seul“. En tout et en toutes et tous, nos yeux ne contemplent alors que Dieu seul, car nous saisissons de toute notre chair que Dieu seul suffit pour faire de nous son sacrement, son visage resplendissant, son témoin au coeur du monde. De tout notre coeur, laissons-nous transfigurer et être ce “voici l’humain en ce monde” !

Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)

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