Méditation quotidienne du vendredi 3 mars : Chemin de fraternité (No 166 – série 2022 – 2023)

Image par Gerd Altmann de Pixabay

Évangile du Vendredi 3 mars 2023 – 1re semaine de Carême (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Va d’abord te réconcilier avec ton frère » Mt 5, 20-26

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Je vous le dis : Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux. Vous avez appris qu’il a été dit aux anciens : Tu ne commettras pas de meurtre, et si quelqu’un commet un meurtre, il devra passer en jugement. Eh bien ! moi, je vous dis : Tout homme qui se met en colère contre son frère devra passer en jugement. Si quelqu’un insulte son frère, il devra passer devant le tribunal. Si quelqu’un le traite de fou, il sera passible de la géhenne de feu. Donc, lorsque tu vas présenter ton offrande à l’autel, si, là, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse ton offrande, là, devant l’autel, va d’abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande. Mets-toi vite d’accord avec ton adversaire pendant que tu es en chemin avec lui, pour éviter que ton adversaire ne te livre au juge, le juge au garde, et qu’on ne te jette en prison. Amen, je te le dis : tu n’en sortiras pas avant d’avoir payé jusqu’au dernier sou. »

Méditation

« Va d’abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande ».

La réconciliation tient non seulement une place de choix dans le sermon sur la montagne, mais elle est prédominante sur toute manifestation de foi et de dévotion 

Nous ne pouvons prétendre aimer Dieu qui nous est invisible si nous ne sommes pas capables d’aimer notre prochain qui nous est proche et visible. « Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu », alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu, qu’il ne voit pas » (1Jn 4,20).

Ne pas commettre de meurtre, ne pas juger, ne pas se mettre en colère contre le prochain, ne pas le détruire avec des propos haineux… toute cette justice nouvelle qui surpasse celle des scribes et des pharisiens, est la loi suprême de l’Amour divin. Malgré l’apparence simple des propos de Jésus, les choses ne sont pas en réalité si faciles que cela. Vivre en frères et sœurs dans l’amour et la charité, recèlent de vraies difficultés; nous savons bien, que les relations humaines ne sont pas toujours un long fleuve tranquille. Forcer la paix et la réconciliation avec des propos moralisants et culpabilisants ne résout nullement le problème, pire, nous courons le risque de refouler des conflits et des injustices qui vont rejaillir un jour ou l’autre. Nier qu’il peut y avoir parfois des désaccords d’opinion, des tensions, des conflits, des pleurs et des frustrations c’est nier notre propre humanité et celle de l’autre. Jésus a épousé l’humanité dans sa personne-même, Il a vécu sur notre terre et a expérimenté les tiraillements, la haine et la médisance, la colère et les larmes, les confrontations et les injustices, et… Il a choisi l’amour et la miséricorde.

L’amour véritable prend origine dans l’intelligence et la volonté, dans la liberté et la dignité, à travers une posture intérieure de charité choisie et donnée; il se traduit par des actes personnels délibérés qui ne sont pas imposés par une contrainte légale extérieure mais qui sont des cris d’un cœur habité par la miséricorde, des petites réponses d’amour.

Qu’est-ce que vivre la fraternité sinon se frotter, se heurter, se confronter et oser choisir l’amour, la miséricorde, la réconciliation intérieure et extérieure?

La charité s’origine par un choix dans la liberté du cœur et ne peut devenir vivante et féconde que si elle est reçue et accueillie comme don de Dieu; elle est grâce et liberté.

La difficulté fondamentale n’est peut-être pas notre capacité à aimer notre prochain, mais plutôt celle de nous aimer nous-même; la vraie réconciliation commence dans notre cœur profond par une unification de notre être avec l’Être qui nous habite, de notre identité avec celle du fils/fille de Dieu que nous sommes. « Comment pouvons-nous penser aimer les autres en vue d’une réconciliation, si nous ne nous sentons pas profondément aimés? Si, nous tous, qui sommes chrétiens, n’avons pas la certitude que Dieu nous aime? » (Chiara Lubich) Se savoir aimé.e par Dieu, nous décentre de nous-mêmes, nous permet de jeter sur notre histoire blessée et notre pauvreté humaine, un regard de bienveillance et d’espérance; alors seulement nous serons capables de regarder l’autre avec ce même regard converti, et la réconciliation deviendra alors possible.

Dans son discours aux diplomates en 2021, le pape François a insisté sur la crise la plus grave de l’humanité, celle des relations humaines expression d’une crise anthropologique plus grave et plus profonde que la crise sanitaire (Pape François). La crise des relations humaines bien qu’exacerbée gravement par la pandémie, n’en est pas uniquement sa conséquence, elle a l’âge de l’humanité.

Si la réconciliation est au centre de la vie chrétienne, elle ne peut être mise en œuvre en dehors des relations humaines, ni en dehors de la communion au même Amour et à la même Vie Divine, « ainsi, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps en Christ, et nous sommes tous membres les uns des autres » (Rm12,5).

A l’origine de toute réconciliation authentique, il y a l’Amour du Christ à travers lequel chacun.e de nous existe, il y a la Lumière de l’Esprit Saint qui grave en nous le feu dévorant de la Charité divine; la réconciliation est avant tout, une profonde expérience de l’Amour du Père avec notre pauvreté humaine.

Choisir et apprendre à faire ce chemin de fraternité et de réconciliation c’est reconnaitre en chacun.e la même Présence, la même Vie et le même Visage du Christ.  Ce qui m’attirait vers cette sœur, c’était Jésus caché au fond de son âme disait Thérèse de Lisieux.

Ce chemin d’amour fraternel, commence par la prière, ne peut être traversé qu’avec la prière, et ne peut s’accomplir sans la prière. « Le banc d’essai de la prière est l’amour concret pour le prochain[1] »

L’A(a)mour ne se commande pas et ne s’impose pas, il échappe à toute emprise et tout contrôle. L’A(a)mour se reçoit et se donne dans la gratuité et la liberté. Nous ne pouvons recevoir et éprouver cette grâce que dans le recueillement, en puisant constamment à Sa Source, en écoutant silencieusement au creux de notre cœur Jésus nous murmurer le secret de l’Éternelle tendresse et l’infinie miséricorde divine.

Gladys EL Helou (gladyshelou@gmail.com)


[1] (Pape François, audience générale 7 octobre 2010)

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