Méditation quotidienne du 1er février 2023 : À Lui (No 136 – série 2022-2023)

Évangile du Mercredi 1 février 2023 – 4e semaine du Temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Un prophète n’est méprisé que dans son pays » Mc 6, 1-6

En ce temps-là, Jésus se rendit dans son lieu d’origine, et ses disciples le suivirent. Le jour du sabbat, il se mit à enseigner dans la synagogue. De nombreux auditeurs, frappés d’étonnement, disaient : « D’où cela lui vient-il ? Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée, et ces grands miracles qui se réalisent par ses mains ? N’est-il pas le charpentier, le fils de Marie, et le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas ici chez nous ? » Et ils étaient profondément choqués à son sujet. Jésus leur disait : « Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa parenté et sa maison. » Et là il ne pouvait accomplir aucun miracle ; il guérit seulement quelques malades en leur imposant les mains. Et il s’étonna de leur manque de foi. Alors Jésus parcourait les villages d’alentour en enseignant.

Méditation

Il est pourtant nôtre, il est pourtant proche, mais il est si différent avec cette sagesse et ces prodiges. Il est notre proche, il est peut-être notre piège. D’où vient cette sagesse, comment fait-il de tels prodiges alors que nous partageons la même parenté, la même chair? Proche et lointain, pourquoi, cela arrive-t-il à lui ?

Je me rappelle lors du baptême des enfants, mon beau-père, haut dignitaire au royaume des sciences et des universités, avait couru jusqu’au parvis afin de nous barrer le chemin. Devant la porte de l’église, les bras en croix, il nous a déclaré, non sans émotion, qu’il ne laisserait pas ses petits-enfants entrer dans l’antre funeste. Ces petits enfants, les siens, les nôtres, n’allaient certainement pas se faire endoctriner dans une religion aussi oppressive que chimérique. De le voir crucifié par ma déraison, il s’est sûrement demandé, pourquoi cela arrive-t-il à moi ? Elle est pourtant des nôtres…

Sagesse objectivable, mesurable, sagesse d’appartenance, sagesse clanique. Sagesse sertie d’un réel toujours maîtrisé, maîtrisable, méprisé et raisonnable. Pourtant, une sagesse qui renferme, des prodiges qui rabaissent, est impensable. Beau-papa me parlait d’enfermement et de rabaissement alors que je voulais enraciner le ciel en ces enfants. Laissez venir à moi les petits enfants, ils seront sagesse et prodige murmurait ce Dieu inaudible et inaccessible derrière la porte verrouillée par la sagesse des hommes. Sagesse désacralisée en écho aux paroles de Christiane Singer : « Tu n’es pas né pour regarder les fleurs mais pour végéter avec nous dans la vase. Il faut que tu le saches. Tu ne vivras pas! Tu es des nôtres (Où cours-tu, 2001, p. 78) ».

Objet de chute et de scandale, piège qui se referme sur les proches, je faisais trébucher par ma folie toute une famille respectable. Et pourtant le rabaissement n’est pas l’abaissement et je comprends les vives blessures d’une Église qui a trébuché sur ses fidèles, un pan de passé sans prodige et des hommes dénués de sainteté et de sagesse. Mais n’est-ce pas sagesse vraie que de croire en un Dieu amoureux, laveur de pieds, ceint d’un tablier, qui se donne pour guérir nos pauvretés, pardonner nos manques, embrasser notre humanité ?  Sans ce Dieu comment pourrons-nous être et demeurer humain en ce monde déchiré, incarcéré ? Depuis quand l’A(a)mour est-il devenu sage, depuis quand n’est-il plus prodigieux, depuis quand s’est-il enlisé dans une réalité vaseuse et indépassable ? On me veut sage, il me veut fou disait Charles de Foucauld.

L’Amour est folle sagesse insaisissable, incommensurable, pleine de vie et prodigieuse. Comme une enfance présentée au baptême. Les instruments du laboratoire réputé de mon beau-père, l’emprise des avancées technologiquement vertigineuses ne pourront s’emparer de cette sagesse sacramentelle, car elle n’est pas fixée en ce monde, fossilisée dans le réel. Où trouve-t-on la sagesse, en quel lieu est le discernement ? demandait Job à Dieu (Jb 28.12), elle n’est ni dans l’abîme ni dans la richesse et le précieux. L’homme n’est pas dans l’intimité de sa valeur et elle ne se trouve pas sur la terre des vivants (Jb 28.13). Quand Dieu a pesé le souffle, il a remarqué la sagesse. Il lui a donné l’existence (Jb 28.26-27). Elle est mouvement de son Esprit qui porte la vie, qui réveille le créé et souffle l’amour à travers nos ouvertures, fenêtres et blessures.

Oui, cette sagesse lui arrive à lui, existe par et en lui, puisque qu’il en est le chemin, la vie et la vérité. Intimité comme chemin de liberté, union vivante qui délie des appartenances, vérité qui défait les clans et les enfermements. Devant la porte barrée de l’église par la sagesse des hommes, l’enfance grouillant de vie en nos bras, Dieu nous a fait signe de le suivre, faire un pas de côté. Il nous a ouvert sagement la petite porte étroite de la sacristie.

Barbara Martel (bmartel@lepelerin.org)

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