Méditation : L’habitant du désert (No 91 – série 2022-2023)

Image par Petra de Pixabay

Évangile du Dimanche 4 décembre 2022 – 2e dimanche de l’Avent (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Convertissez-vous, car le royaume des Cieux est tout proche » Mt 3, 1-12

En ces jours-là, paraît Jean le Baptiste, qui proclame dans le désert de Judée : « Convertissez-vous, car le royaume des Cieux est tout proche. » Jean est celui que désignait la parole prononcée par le prophète Isaïe : Voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers.
Lui, Jean, portait un vêtement de poils de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins ; il avait pour nourriture des sauterelles et du miel sauvage. Alors Jérusalem, toute la Judée et toute la région du Jourdain se rendaient auprès de lui, et ils étaient baptisés par lui dans le Jourdain en reconnaissant leurs péchés. Voyant beaucoup de pharisiens et de sadducéens se présenter à son baptême, il leur dit : « Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ? Produisez donc un fruit digne de la conversion. N’allez pas dire en vous-mêmes : “Nous avons Abraham pour père” ; car, je vous le dis : des pierres que voici, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham. Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres : tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu.
Moi, je vous baptise dans l’eau, en vue de la conversion. Mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. Il tient dans sa main la pelle à vanner, il va nettoyer son aire à battre le blé, et il amassera son grain dans le grenier ; quant à la paille, il la brûlera au feu qui ne s’éteint pas. »

Méditation

Chacun.e de nous, nous connaissons bien des déserts dans une vie : désert de relations, désert de rejet, désert de violence, désert d’abandon, désert d’oubli, etc. Mais si ces déserts nous les connaissons par imposition, je connais peu de gens qui font le choix du désert par Amour. Aujourd’hui, en ce chemin de l’Avent, nous sommes devant un humain qui a fait ce choix, Jean-Baptiste. Mais que nous apprend-il ?

Sur les longues dunes de sable du désert, n’existe pas le chaos de nos villes avec ses incessants tintamarres. Il ne demeure qu’une « voix qui crie dans le désert ». Toutefois, si à l’extérieur tout semble calme, à l’intérieur c’est le combat, car l’humain se retrouve face à lui-même, face aux combats que, trop souvent, il cherche à oublier en se plongeant dans les bruits du monde. Par exemple, sa violence intérieure se cache dans les violences extérieures des canaux d’information, des films et des sports, s’empêchant ainsi de regarder celles qui se cachent en lui. Bien au contraire, de cette façon, il les banalise et s’en déculpabilise. Mais, au désert, le cri qui est en lui simplement crie, comme dans une douleur d’enfantement, dans l’espérance d’un autre chemin, de sentiers plus droits. Se mêlent à ce cri les gémissements de l’Esprit qui viennent éclairer toutes nos guerres intérieures dans une invitation vers la Vie.

Le désert nous permet de redécouvrir non seulement la voix de notre souffrance, chantant les déroutes de notre mal, mais laisse surgir doucement la voix de Dieu en nous et notre voix en Dieu. Mais, pour faire ce travail intérieur, nous devons nous habiller de désert et nous nourrir au désert. Le texte nous dit que «Jean, portait un vêtement de poils de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins ; il avait pour nourriture des sauterelles et du miel sauvage ».

Au désert, les vêtements qui siéent sont le dépouillement et la sobriété.  Les riches vêtements de nos superbes, de nos ambitions, de nos orgueils, de nos convoitises et de nos envies sont beaucoup trop lourds à traîner et ils enlisent notre chemin. Seul l’être dépouillé jusqu’à la nudité et sobre jusqu’au jeûne trouvera sa paix et son rassasiement au désert.  Marchant sans rien posséder et comptant sur la solidarité du désert, se laissant buriner jusqu’à l’authenticité, reconnu en ses péchés et ses faiblesses, il trouvera alors le « repentez-vous », le « convertissez-vous » ou le « faites retour » (traduction de Chouraqui).

Oui, le désert ne peut que conduire à un “faire retour” vers soi-même et vers Dieu. Nous ne pouvons y vivre en évaluant notre grandeur ou en prétendant que « nous avons Abraham pour père », car, ici, tout se vit en dépossession et en manne de V(v)ie librement offerte. Rien ne repose sur nous, tout se vit dans cette humilité agenouillée devant les mystères de Dieu, de l’humain et de la création et dans une simple prière d’adoration et de gratitude face à l’Indicible.

Au creux du désert, quand nous nous laissons libres pour ce qui survient, spécialement Celui que Jean décrit ainsi, Il « est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales », c’est alors que l’habitant du désert choisi et béni est « immergé dans le feu du souffle sacré » (Chouraqui) par Celui qui a le pouvoir de « purifier son aire », à savoir le cœur de l’humain, afin d’engranger dans ce grenier fait pour Dieu et pour l’humain des trésors de ciel et d’humanité.

En ce deuxième dimanche de l’Avent, l’Évangile nous invite avec Jean le Baptiste à choisir le désert et, ainsi, vivre de ce feu de l’Esprit qui brûle en nous tous les attachements extérieurs et intérieurs. Le désert seul peut nous préparer à la crèche et à la Croix. Devenons donc des habitants du désert !

Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)

DROIT D’AUTEUR

La méditation peut être partagée à toutes et à tous, en tout ou en partie, mais le nom de l’auteur et l’indication du centre le Pèlerin avec l’adresse du site (www.lepelerin.org) doivent être inscrits, car les droits d’auteur demeurent. Merci de votre compréhension.