Méditation : Mystère de notre identité (No 19 – série 2022-2023)

Image par Pete Linforth de Pixabay

Évangile du Vendredi 23 septembre 2022 – 25e semaine du temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Tu es le Christ, le Messie de Dieu. – Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup » Lc 9, 18-22

En ce jour-là, Jésus était en prière à l’écart. Comme ses disciples étaient là, il les interrogea : « Au dire des foules, qui suis-je ? » Ils répondirent : « Jean le Baptiste ; mais pour d’autres, Élie ; et pour d’autres, un prophète d’autrefois qui serait ressuscité. » Jésus leur demanda : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Alors Pierre prit la parole et dit : « Le Christ, le Messie de Dieu. » Mais Jésus, avec autorité, leur défendit vivement de le dire à personne, et déclara : « Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, le troisième jour, il ressuscite. »

Méditation

« Jésus était en prière à l’écart ». Ce jour-là, dans sa prière à l’écart, Jésus, seul avec Son Père qui habite au plus intime de Son être, a dû toucher profondément à Son identité. Il s’était peut-être posé la question en premier : « Qui Suis-Je réellement? » L’on sait combien cette question de l’identité est importante! C’est dans sa prière que Jésus a expérimenté qui Il était et, suite à cela, probablement qu’Il a décidé que le moment était venu d’ouvrir la conscience de Ses disciples à cette question décisive. Ces derniers venaient d’assister à la multiplication des pains, ils ont vu de leurs propres yeux, entendus de leurs propres oreilles ce que nul n’a vu ni entendu. Ont-ils réalisé qu’ils étaient en présence de Dieu ?

Jésus commence par les interroger sur l’opinion publique « Au dire des foules, qui suis-je ? », pour ensuite les confronter à leur propre opinion « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? ». Quelle pédagogie! Jésus les invite à un virement vers l’intérieur, à un changement de regard. La foule a un regard extérieur, elle attend encore, peut-être l’intervention définitive, ou l’envoyé final des derniers temps. La foule voit mais ne reconnait pas Jésus; les disciples eux, sont invités à un regard intérieur, à une connaissance intime de Celui qui est en leur présence.

Aujourd’hui, happés par le rythme de notre quotidien, nous restons très souvent avec un regard de foule, un regard extérieur; à force de courir pour rattraper le temps, pour pêcher le bonheur dans le lac artificiel des joies mondaines éphémères et fragiles, nous ne nous arrêtons plus pour nous demander : qui sommes-nous? Qui est à l’Origine de notre être ? Au nom de Qui nous assumons notre vie?  Pire encore, notre société postmoderne nous convainc que nous n’avons plus besoin de cette question fondamentale. L’amour de ce monde s’est tellement banalisé que la tristesse, le vide et le désespoir sont devenus des locataires permanents chez nous. La valeur de notre vie a dramatiquement chuté depuis que nous avons cessé de la redresser par une référence aux Béatitudes.

Cette question de Jésus oblige notre regard à quitter la sphère du visible pour plonger dans le mystère de notre existence qui ne peut se révéler que dans une attitude de prière intime devant Dieu. Cette posture de relation avec le Créateur, de vis-à-vis avec Dieu le Père nous conduit dans le tréfonds de notre âme, où nous entrevoyons le mystère de notre identité existentielle, sans toutefois pouvoir en rendre compte conceptuellement. Voilà pourquoi, les paroles souvent énigmatiques de Jésus ont cet effet de conversion thérapeutique. Quand nous les accueillons et les méditons dans notre cœur profond, elles nous conduisent vers un autre plan; il nous est alors révélé, non seulement le mystère de Jésus, mais également celui de notre propre identité.

Cette question ancienne refait surface à la croisée des chemins de toute existence. Que de fois nous rencontrons au Pèlerin des personnes qui viennent en accompagnement parce qu’elles ne se reconnaissent plus. Cette question identitaire est l’enjeu le plus important de notre siècle, que l’humain a bien enfermé dans le grenier de sa conscience.

« Pour vous, qui suis-je ? » Éviter de méditer sur cette question nous conduit à perdre le sens de l’être humain. C’est une question rédemptrice parce qu’elle nous ouvre à notre identité profonde : filles et fils du Père. En nous offrant Sa Vie, en nous ouvrant à travers Sa question sur Son identité, Jésus nous rétablit dans la nôtre.

Tout comme Jésus, nous aussi, nous ne pouvons répondre à cette question qu’à travers la prière et la contemplation. Lorsque nous détournons notre regard de Jésus, notre vie spirituelle se dessèche et ne nous offre que son versant aride. Si nous ne nous abreuvons pas continuellement à la Source de la Parole, la lourdeur des soucis quotidiens et le poids de la vie peuvent nous amener à expérimenter le sens de l’humanité et de la fraternité, comme de gros échecs.

À Son image et ressemblance, Il nous a créés. Nous sommes tous des sœurs et des frères d’un même Père, qui est tout Amour, et d’un même Fils qui ne nous a rien renié de cet Amour, qui nous a tout offert jusqu’à la Croix.

Méditons ensemble sur cette question vitale de Jésus, contemplons le mystère du Père révélé en Lui et réconcilions-nous avec notre vraie identité.

Ne laissons pas le parfum de la joie filiale s’évaporer de notre vie et de nos communautés. En dépit de toutes nos incertitudes et nos craintes, de toutes nos blessures et nos chutes, de toutes nos différences et nos maladresses, de toutes nos fatigues et nos épreuves, rappelons-nous toujours que nous sommes tous appelés par la même Parole, aimés par le même Amour, ancrés à la racine d’une même identité profonde et en route vers la même Gloire auprès du Père.

C’est aujourd’hui même, ici et maintenant, que nous sommes appelés à s’approprier notre identité filiale. En chacun de nos instants, qu’il soit trempé dans la joie ou dans l’amertume, dans la paix ou dans un cœur brisé, se trouve la Vie nouvelle au versant de la mort. Notre joie profonde inaltérable ne peut se reposer que sur la conscience de notre identité filiale.

Gladys EL Helou (gladyshelou@gmail.com)

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