Évangile du Mercredi 23 mars 2022 – 3e semaine de Carême (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions
« Celui qui les observera et les enseignera, celui-là sera déclaré grand » Mt 5, 17-19
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Ne pensez pas que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu abolir, mais accomplir. Amen, je vous le dis : Avant que le ciel et la terre disparaissent, pas un seul iota, pas un seul trait ne disparaîtra de la Loi jusqu’à ce que tout se réalise. Donc, celui qui rejettera un seul de ces plus petits commandements, et qui enseignera aux hommes à faire ainsi, sera déclaré le plus petit dans le royaume des Cieux. Mais celui qui les observera et les enseignera, celui-là sera déclaré grand dans le royaume des Cieux. »
Méditation
Le Père a créé le monde par sa Parole. La création est, ainsi, le lieu de la première incarnation de la Parole, et, née de la Parole, elle ne peut que révéler Dieu. Cette révélation est plus encore vraie pour l’être humain dans sa chair, car, comme l’écrivait saint Paul, Adam est “figure de Celui qui devait venir…” (Rm 5, 14). L’humain est donc figure du Fils , image de Dieu en “l’Image du Dieu invisible” (Col 1, 15).
Le Fils en prenant chair, chair qu’Il a un jour façonnée, vient non seulement accomplir la Création mais accomplir l’humain. Il entrouvre par, avec et en la chair humaine ce mystère de la Parole qui a fait les siècles mais, plus encore, révèle et fait participer au mystère trinitaire, caché dans l’intimité du créé.
Cette Parole qui a parlé Dieu dès la Création a continué à parler Dieu à l’humain à travers la Loi et les Prophètes, et ce, parce que le grand désir de Dieu était d’entrer en relation avec le seul être capable d’entendre la Parole et de répondre à Dieu : l’humain. En ce sens, l’incarnation du Fils, de la Parole, en ce monde ne peut être que l’accomplissement de cette Parole qui est au fondement de la Création et qui est Celle qui se fait entendre à travers la Loi et les Prophètes. C’est ce qu’affirme le texte, “avant que le ciel et la terre disparaissent, pas un seul iota, pas un seul trait ne disparaîtra de la Loi jusqu’à ce que tout se réalise”, affirmant ainsi que ni la Création ni la Loi et les Prophètes ne sauraient disparaître sans que la Parole qu’ils portent trouvent sa pleine réalisation dans la Parole incarnée qu’est le Fils.
Ceci signifie que tout ce qui existe, tout ce qui est né de la Parole, sera conduit à la plénitude de la Vie, car “ce qui fut en (la Parole) était la vie, et la vie était la lumière des hommes” (Jn 1, 4). Ciel (le Divin), terre et humain, avec la Loi et les prophètes, sont Vie et sont trois dimensions de la réalité qui ne peuvent être séparées. “Et c’est la raison, écrivait Panikkar, pour laquelle chaque chose parle de “lui”, parce que c’est lui qui parle, qui dit toutes choses. Il n’existe, certainement, ni monde, ni homme sans cette dimension divine” (Vision trinitaire et cosmothéandrique : Dieu-Homme-Cosmos, Éd. du Cerf, 2013, p. 337).
C’est la Parole du Père qui dit “toutes choses” et tout être et qui, en s’incarnant, épouse de chair tout le cosmos et tout l’humain pour accomplir, et l’un et l’autre, jusqu’au moindre “i” de leurs paroles. Par l’incarnation de la Parole, l’existence humaine se montre formée de Divin, d’humain et de Création et il est dangereux de les séparer car ils sont dans le Fils sous le Souffle de l’Esprit une même Parole qui révèle le Père. Toute abolition ou destruction de la Création ou de l’humain est une atteinte à la Parole divine.
Le scandale du réchauffement de la planète, de son exploitation à outrance, de ses abus par l’humain… sont tout autant une atteinte profonde de l’humain, car les deux sont un en la Parole. Il en est de même de toute violence, de toute agression, de toute guerre… entre humains, elles sont autant d’atteintes à la Création, car cette Création attend avec impatience “la révélation des fils de Dieu” (Rm 8, 19), et sa libération “de la servitude de la corruption” (Rm 8, 21). Et toute blessure de mal qui touche l’humain et la Création est une crucifixion de la Parole, du Dieu vivant, car tout ce qui blesse l’U(u)n atteint l’A(a)utre.
Mais le Fils, la Parole, a pris sur Lui à la Croix tout le mal qui atteint l’humain et la Création, afin de les relever par la puissance de sa Parole. Malgré tout le mal que l’humain a glissé au coeur de la réalité, du Ciel, de la terre et de l’humain même, la Parole a le pouvoir de tout recréer et de tout sauver. Elle libère la Vie en chaque être et ouvre à la Vie éternelle.
L’Évangile d’aujourd’hui affirme donc avec éclat que Ciel, terre et humain sont un de par Dieu, que tout est révélation ou lieu de la rencontre avec Dieu, et ce, même au coeur de toutes nos croix. Car, sur la Croix, c’est Dieu qui recrée et sauve ! Cette recréation de même que notre accomplissement partent de notre ouverture à la Parole de Dieu en nous.
Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)
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