Méditation : Récit de l’Autre Rive (No 111)

Image par kordula vahle de Pixabay

Évangile du Samedi 29 janvier 2022 3e semaine du temps ordinaire (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? » Mc 4, 35-41

Ce jour-là, le soir venu, Jésus dit à ses disciples : « Passons sur l’autre rive. » Quittant la foule, ils emmenèrent Jésus, comme il était, dans la barque, et d’autres barques l’accompagnaient.
Survient une violente tempête. Les vagues se jetaient sur la barque, si bien que déjà elle se remplissait. Lui dormait sur le coussin à l’arrière. Les disciples le réveillent et lui disent : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? » Réveillé, il menaça le vent et dit à la mer : « Silence, tais-toi ! » Le vent tomba, et il se fit un grand calme. Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N’avez- vous pas encore la foi ? » Saisis d’une grande crainte, ils se disaient entre eux : « Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? »

Méditation

Je crois que le Seigneur se sert de tout ce qui survient dans notre vie, comme il l’a fait dans celle des disciples, pour nous apprendre le chemin de l’Autre Rive, afin que nous puissions y poser notre être. Les premiers mots de Jésus, « passons sur l’autre rive », sont donc l’appel à un passage, à une pâques, à un chemin de conversion.

Le passage est possible pour les disciples, et pour nous, si nous laissons monter Jésus « dans (notre) barque ». Et il nous faut le prendre « comme il était » ou, traduira Chouraqui, « tel quel ». La relation est vraiment différente avec Jésus qu’entre une autre personne où, souvent, nous voulons changer l’autre. Mais, avec Jésus, cette prétention ne peut exister, car nous savons trop bien que le chemin spirituel n’est pas de vouloir changer Dieu pour en faire un dieu à notre image mais de l’accueillir tel qu’ « Il Est », afin que Lui nous transforme.

Dans la traversée de nos vies, vers cet Autre Rive, celle de Dieu, nous ne sommes pas seuls, « d’autres barques l’accompagnaient », car à toutes et à tous s’adressent ces paroles : « passons sur l’autre rive ». C’est une injonction qui est inscrite dans notre chair : notre être, depuis l’origine, n’a-t-il pas été façonné pour que toutes nos traversées nous conduisent à Dieu ?!

Et nous le savons toutes et tous, quand nous osons écouter cette Parole inscrite en nous par le Verbe même, nous voilà face à la tempête, car tout est questionné en nous. « Les vagues (se jettent) sur notre barque » et, rapidement, nous nous sentons submergés. Et Jésus, Dieu, dort « à l’arrière ».

Est-Il indifférent ou insouciant au fait que « nous sommes perdus » ? C’est bien ce que les disciples croient et que nous croyons. Mais Jésus se donne en exemple pour nous révéler la vie sur l’Autre Rive. Sur Celle-ci, qu’importe les tempêtes, il nous est possible de reposer en paix… dans le Cœur du Père.

Quand Jésus « menac(e) le vent et dit à la mer : « Silence, tais-toi ! » », c’est également un enseignement de l’Autre Rive. Il nous dit que, dans la création, tout ce qui existe obéit à Dieu, alors de quoi avons-nous peur ? C’est d’ailleurs le reproche qu’Il leur fait : « Pourquoi avez-vous peur ainsi ? Comment n’avez- vous pas de foi ? » (bible de Jérusalem)

Cet évangile me tourmente, car je sais combien il y a de peur en moi et, par ce passage, met en lumière mon peu de foi. Mais l’Autre Rive, nous ne l’atteignons que par la foi.  Cette foi, elle nous fait entrer dans l’obéissance à la Parole où tout se tait et entre en silence (dans le Père). La girouette de notre être balayé par le vent trouve son port, son repos, par la foi.

Jésus dort car, comme l’a révélé saint Jean de la Croix, celui qui a la foi ne traverse que de « nuit ».  Tout notre être est dans la nuit. Toutes les facultés de notre être ont accepté de perdre pied, de se reposer sur et en Dieu et d’entrer dans un chemin d’inconnaissance, éblouies par la proximité divine. Nos cœurs passent alors de la peur à la crainte filiale (‘saisis d’une grande crainte »), c’est-à-dire que, dans la foi, ils commencent à s’agenouiller devant le Tout Autre en esprit et en vérité. Leurs vies sont sous « l’autorité » de Dieu.

Là, sur l’Autre Rive, ils trouveront le repos, le silence, l’obéissance, la paix (l’apaisement de la tempête) et la crainte de Dieu, tout cela s’ils acceptent de traverser en foi, de vivre en foi, d’aimer en foi, de connaître en foi, de marcher en foi…

En ce temps difficile que nous traversons et en toutes les tempêtes qui frapperont notre barque, le repos, le silence, l’obéissance, la paix (l’apaisement de la tempête) et la crainte de Dieu nous sont offerts si, en foi, nous traversons.

Que Dieu vous bénisse chacun.e !

Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)

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