Méditation : Le mystère de l’intime proximité avec Jésus (No 89)

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Évangile du Vendredi après l’Épiphanie 7 janvier 2022 (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« À l’instant même, la lèpre le quitta » Lc 5, 12-16

Jésus était dans une ville quand survint un homme couvert de lèpre ; voyant Jésus, il tomba face contre terre et le supplia : « Seigneur, si tu le veux, tu peux me purifier. » Jésus étendit la main et le toucha en disant : « Je le veux, sois purifié. » À l’instant même, la lèpre le quitta. Alors Jésus lui ordonna de ne le dire à personne : « Va plutôt te montrer au prêtre et donne pour ta purification ce que Moïse a prescrit ; ce sera pour tous un témoignage. »
De plus en plus, on parlait de Jésus. De grandes foules accouraient pour l’entendre et se faire guérir de leurs maladies. Mais lui se retirait dans les endroits déserts, et il priait.

Méditation

« Jésus était dans une ville quand survint un homme couvert de lèpre ». Le texte s’ouvre avec cette étrange apparition du lépreux, comme s’il surgissait de nulle part. Étonnant, puisque dans les temps anciens,les lépreux étaient mis en quarantaine jusqu’à ce que la mort survienne. Ils devaient porter une clochette afin que les gens s’éloignent en entendant son tintement. La lèpre n’était pas seulement considérée une maladie contagieuse mais une forme de châtiment divin, conséquence du péché, une impureté qui excluait la personne atteinte du monde matériel et spirituel. Elle se retrouvait alors privée de sa dignité humaine, privée de compassion et d’affection et un abîme se creusait entre ce que pouvait être sa vie d’avant et celle d’après la lèpre.

Mais voilà que notre lépreux aperçoit Jésus, une lumière vient de surgir, un autre son de cloche que celui qui pend à son cou vient de retentir.

« Seigneur, si tu le veux, tu peux me purifier. » Ne vient-il pas d’exprimer le désir même de Jésus qui est venu pour nous sauver ? et qui ne peut pour nous qu’à la mesure de notre volonté d’être sanctifié ? Le Créateur nous désire, l’Amour nous aime et notre pauvreté est la faiblesse de Dieu.

Ce lépreux est habité par une profonde pauvreté qui s’est ouverte au don de l’Autre dans une magnifique prière. Elle exprime toute la valeur de sa vie qui ne peut naître que du don de Dieu. Si, pour la société de jadis, ce lépreux avait perdu son identité, dans la profondeur de son âme réside encore ce lieu intact où la Parole de Dieu peut le féconder, l’engendrer à sa vraie identité et le faire ressusciter à la V(v)ie. De son état d’intouchable qui l’a fait chuter dans le gouffre de la non-existence, il ose encore l’espérance en criant à Jésus son désir de naître, de redevenir humain.

La vulnérabilité de ce lépreux, sa supplication et sa confiance laissent toute la place à la liberté de Jésus qui, ému aux entrailles, va risquer d’aller rejoindre jusqu’au plus bas la souffrance de cette personne en détresse d’amour. Il l’accueillit, enveloppa son être fragile de toute Sa tendresse et, dans un instant inouï d’extrême miséricorde, « Jésus étendit la main et le toucha ». Ce lépreux s’est recueilli et s’est blotti dans l’Amour et, lui aussi a touché à l’intouchable mystère de la divinité de Jésus.

« À l’instant même, la lèpre le quitta ». Quel est cet instant si puissant capable d’abolir immédiatement le mal ? C’est l’instant de la rencontre, du mystère de la proximité avec Jésus, l’instant de la vérité où nous reconnaissons le mal qui nous habite, la lèpre qui nous empêche de vivre en relation avec l’A(a)utre, l’instant où nous déposons notre pauvreté dans les bras de Dieu pour nous laisser sauver, purifier, guérir, l’instant de ce Toucher et de cette Parole qui nous restituent dans notre dignité humaine et nous rétablit dans notre identité filiale.

Dans cet espace de proximité, le lépreux et Jésus se sont tellement approchés qu’ils se sont mutuellement touchés, mutuellement anéantis l’un dans l’autre ne faisant plus qu’un. Le lépreux s’est tenu dans l’instant présent de cette communion à nue avec l’Autre, dans ce puissant instant éternel d’où la V(v)ie a jailli. Sa purification, sa rédemption n’est autre que la résurrection accomplie.

Et maintenant qu’il a touché au miracle de la proximité divine, que va-t-il faire de ce don reçu ? Jésus lui ordonne de ne pas en parler car ce qui lui a été offert n’est pas une destination mais un itinéraire. Il l’invite à se laisser guérir en silence, à contempler la Lumière et à laisser Son rayonnement être le vrai témoignage.

Ce récit du lépreux n’est-il pas en quelque sorte le nôtre avec la pandémie que nous traversons ? Un virus a surgi dans notre vie et voilà que nous sommes obligés de nous confiner, de nous abriter derrière des masques, de maintenir nos distances avec les autres…  Mesurons-nous la distance qui existe entre notre monde d’hier et celui d’aujourd’hui ? exclus les uns des autres. Notre humanité est en quelque sorte menacée puisque nous sommes privés de vivre pleinement nos relations, nous sommes privés de la proximité avec l’autre. Tout comme ce lépreux, nous désirons irrésistiblement la guérison de notre monde, le recouvrement de notre identité humaine.

Le coronavirus est notre lèpre d’aujourd’hui, sa clochette au cou de notre monde ne cesse de retentir l’alarme de tous nos faux systèmes de salut présents dans notre vie et dans notre société.

En ce temps de Noël, fixons notre regard sur la crèche afin d’apercevoir l’éclat de la Lumière dans l’obscurité de notre univers, afin d’entendre Jésus nous murmurer tendrement : « Mon enfant, si tu le veux, je peux te purifier ».

Reconnaissons le vrai mal qui nous habite et osons nous approcher de Lui avec la confiance du pauvre lépreux.

Vivons dans ce mystère de l’intime proximité avec Jésus, assez proche pour s’anéantir en Lui et Lui en nous et laissons-Le toucher nos plaies pour qu’elles deviennent dons, porteurs de vie.

À l’exemple du Saint frère André dont nous célébrons la fête aujourd’hui, transformons notre pauvreté en un espace de rencontre avec l’A(a)utre et notre vulnérabilité en un lieu de guérison et de naissance mutuelles.

Gladys El Helou

DROIT D’AUTEUR

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