Méditation : Le Baptême de la Vie (No 80)

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Évangile de l’Avent du Mercredi 15 décembre (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« Allez annoncer à Jean ce que vous avez vu et entendu » Lc 7, 18b-23

En ce temps-là, Jean le Baptiste appela deux de ses disciples et les envoya demander au Seigneur : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » Arrivés près de Jésus, ils lui dirent : « Jean le Baptiste nous a envoyés te demander : Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? »
À cette heure-là, Jésus guérit beaucoup de gens de leurs maladies, de leurs infirmités et des esprits mauvais dont ils étaient affligés, et à beaucoup d’aveugles, il accorda de voir. Puis il répondit aux envoyés : « Allez annoncer à Jean ce que vous avez vu et entendu : les aveugles retrouvent la vue, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle. Heureux celui qui ne trébuchera pas à cause de moi ! »

Méditation

Ce passage de Luc semble nous plonger dans le combat spirituel. Et, au coeur de ce combat, il y a Jean-Baptiste. Et Luc est tout à fait unique dans sa façon de raconter l’histoire de Jean. En Matthieu et Marc, Jean baptise Jésus dès de début de son ministère, tout en entendant ces paroles du Père : « Tu es mon Fils bien-aimé, tu as toute ma faveur » (Mc 1, 11 et Mt 3, 17). De plus, chez ces deux mêmes évangélistes, l’arrestation de Jean arrive beaucoup plus tard dans leur évangile : Matthieu au chapitre 14 et Marc au chapitre 6. Chez Luc, baptême et arrestation se mêlent au chapitre 3 en un récit impossible. Impossible, car en Lc 3, 19-20 est raconté l’enfermement en prison par Hérode de Jean et, au verset 21, Luc raconte le baptême de Jésus mais sans nommer personne qui l’accomplit. Comment Jean peut-il baptiser Jésus s’il est en prison ?

C’est comme si Jean, pour Luc, ne pouvait baptiser Jésus que de sa prison ou qu’il ne pouvait avoir part au baptême de Jésus sans lui-même être entré dans sa propre « passion ». Jean est plongé dans un instant de profond dépouillement, livré déjà à une mort prochaine. Il n’est pas sans surprise que la question qui marque le début de l’évangile d’aujourd’hui sort de sa bouche, du coeur même de son emprisonnement (notera Matthieu 11, 2) : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? »

Le véritable baptême de Jésus est sur la Croix, comme le dira Jésus aux apôtres Jacques et Jean (Mc 10, 35-40) : « La coupe que je vais boire, vous la boirez, et le baptême dont je vais être baptisé, vous en serez baptisés » (v. 39). C’est comme si Luc, par sa façon de raconter l’histoire de Jean, nous disait : « À chaque fois que nous traversons une épreuve, là se trouve le baptême (et le combat) de la Croix ». Et Jean-Baptiste, dans sa prison en marche vers sa décapitation, lui qui a été le premier disciple de Jésus dès le ventre d’Élisabeth, sa mère, en qui il a tressailli d’allégresse au contact de Jésus dans le ventre de Marie, est le précurseur qui marche à la Croix. Nous pourrions dire qu’il baptise Jésus dans la mesure où il entre, en anticipé, dans le baptême de Jésus sur la Croix.

La question n’est pas seulement celle de Jean mais celle de tout disciple, comme d’ailleurs le deux disciples dans le récit d’aujourd’hui. Oserons-nous croire que Jésus est Celui qui devait venir ? ou, finalement, perdons-nous espoir et cherchons-nous ailleurs Celui qui peut nous sauver ? À tous les disciples, depuis Jean, Jésus nous répond :  » Allez annoncer à Jean ce que vous avez vu et entendu ». Il nous demande simplement, au coeur de nos emprisonnements, de nos noirceurs… de nos croix, quand la mort se profile et semble afficher sa victoire : voyez et entendez.

Voir et entendre avec le coeur afin de percevoir sa Présence et d’entendre la voix du Père nous dire que nous sommes ses fils et ses fils bien-aimés. Ceci signifie au fond, : « dans la foi, apprenez à me reconnaître même dans l’absence ». Ou, « que votre foi voit et entende ce que toutes et tous ont cessé de percevoir et d’entendre : cette Vie qui surgit et triomphe ! »

Le combat spirituel n’est pas comme à la guerre de lutter contre le mal et l’ennemi, ce serait lui accorder une importance et une valeur que ce mal n’aura jamais. Mais l’appel est de contempler Dieu ! De ne jamais le perdre de vue ! Dieu seul suffit. Son Amour sur nous suffit ! Si notre foi reste fixée en Lui, la victoire est assurée :  » les aveugles retrouvent la vue, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle. »

Comme tout humain, le combattant du Christ ne peut éviter le mal qui l’atteint mais en demeurant fixé sur Celui qui est la Vie, il se tient hors d’atteinte du mal. Ce combattant est varlopé, abrasé par la souffrance et la mort qui cherche sa victoire mais, par grâce, il reste debout. La Croix est glorieuse.

Jésus, dans ce récit, avec beaucoup de tendresse se rappelle à Jean et lui dit de garder, du fond de sa prison, les yeux sur l’essentiel, car c’est dans la mort de Jésus qu’il est baptisé. Et il insiste sur le bonheur qui l’attend :  » Heureux celui qui ne trébuchera pas à cause de moi ! ». Oui, « heureux » est celui ou celle qui d’Amour restera fixé.e sur Jésus, car il connaîtra la béatitude éternelle. Même dans les chutes provoquées par le mal, « il ne trébuchera pas » et ne saurait se perdre, car en Dieu il se tient par le Fils.

Tous les torrents du mal ne sauraient faire vaciller cette maison. Et toute mort apparente éclatera en Résurrection.

Ne craignons pas le combat spirituel, ne le fuyons pas, car il est le lieu de notre baptême en Jésus et du baptême de Jésus en nous. Participons en tout ce que nous vivons au baptême de la Vie et entendons ces paroles : « Tu es mon Fils bien-aimé, tu as toute ma faveur. »

Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)

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