Méditation : Infiniment petit, masculin et féminin (No 30)

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Évangile du mardi 26 octobre (tiré du Prions en Église et pour les personnes qui voudraient s’abonner au Prions)

« La graine a poussé, elle est devenue un arbre » Lc 13, 18-21

En ce temps-là, Jésus disait : « À quoi le règne de Dieu est-il comparable, à quoi vais-je le comparer ? Il est comparable à une graine de moutarde qu’un homme a prise et jetée dans son jardin. Elle a poussé, elle est devenue un arbre, et les oiseaux du ciel ont fait leur nid dans ses branches. » Il dit encore : « À quoi pourrai-je comparer le règne de Dieu ? Il est comparable au levain qu’une femme a pris et enfoui dans trois mesures de farine, jusqu’à ce que toute la pâte ait levé.»

Méditation

Un des premiers récits de l’Ancienne Alliance est celui de la tour de Babel. Les humains avaient décidé de se bâtir « une ville et une tour dont le sommet pénètre les cieux ! » (Gn 11, 4). Voilà le mouvement humain : atteindre les cieux par lui-même selon le désir de « se faire un nom ». Ces rêves de se dresser au-dessus de tout, de dominer, de s’élever jusqu’à devenir un dieu ne démontrent pas la grandeur humaine mais sa déroute.

Le Royaume de Dieu, de ce Dieu au-delà de tout et intime à tout, ne se décline pas selon cet orgueil mais dans l’humanité de ce qui est petit, tout petit comme une graine de moutarde ou comme le levain. Nous ne sommes pas dans l’ordre de la toute-puissance mais de la toute-Présence humble et cachée. Un Dieu, donc, qui s’est placé à hauteur d’humain. Un Verbe fait chair, épousant notre humanité en tous ses aspects.

Nous ne sommes pas dans une dynamique de première place mais du très-bas divin de la dernière place, d’où il soutient tout. Charles de Foucauld a médité et vécu pour une part ce mystère de la vie cachée de Dieu et nous invite, à sa façon, à une spiritualité chrétienne d’un Dieu qui se cache en creux de tout ce qui existe et de tout ce que nous vivons, lieux de ce trésor de grand prix. Et le texte d’aujourd’hui nous montre justement une voie de petitesse, le chemin de la vie cachée. Le texte le découvre, je dirais, de manière masculine et féminine.

Il est question dans le texte d’un homme qui « a pris et jeté dans son jardin » une graine de moutarde et d’une femme qui  » a pris et enfoui dans trois mesures de farine  » du levain. Les deux ont découvert le mystère du Royaume de Dieu. L’homme l’a vu dans la graine de moutarde, cette graine si petite. C’est à cette graine que l’évangéliste Luc comparera la foi. Cette foi, chaque humain est appelé à la prendre et à la jeter dans le grand jardin du monde et, surtout, dans le jardin intérieur de ses frères et soeurs humains. Il est appelé à être un « semeur de foi ». Cette pédagogie de la semence laisse à Dieu le travail de croissance dans le jardin de chacun.e, car c’est Lui qui grandit en chacun.e comme cet Arbre de Vie où tous pourront s’abriter.

La femme, quant à elle, prend un chemin plus intérieur. Elle ne jette pas, elle « enfouit ». C’est comme si elle entrait plus profondément dans le mystère de cette Présence qui se cache et, ce faisant, par cette rencontre amoureuse, donne au Pain de Vie, le Fils, de « lever ». Et se « levant » (naissant) en chacun.e, il découvre au monde la richesse infinie du Père. Cela ne rappelle-t-il pas Marie à l’incarnation !

La manière masculine ou féminine permet à la Vie de grandir, la première en jetant et la seconde en enfouissant. Par la première, nous sommes étonnés d’être témoins de la gratuité de la Vie, source d’un inattendu inouï. Par la seconde, d’entrer dans l’intériorité de la Vie pour qu’elle éclate de l’intérieur, comme un amour débordant et secret.

La Vie cachée se découvre à la fois à l’extérieur de nous dans toutes ces graines de foi qui, jetées dans le jardin des humains, révèlent la grandeur du coeur humain d’abriter Dieu, cet Arbre de la Vie. Mais la Vie cachée, bien sûr, se dévoile de l’intérieur par l’Amour d’une rencontre où Dieu élargit la tente de notre être jusqu’aux confins de Dieu. Mais en tout, qu’il s’agisse de « jeter » ou d’ « enfouir », nous nous trouvons devant et au coeur de l’infiniment petit d’un Dieu infiniment grand.

Stéfan Thériault (stheriault@lepelerin.org)

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